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10/02/2006 | FRANCE | N°289418

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 10 février 2006, 289418


Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée Mme C épouse A, demeurant ... et par M. A, demeurant ... ; Mme C épouse A, et M. A, demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre la décision implicite du 13 décembre 2005 par laquelle le consul de France à Tbilissi a refusé de délivrer un visa à M. A ;

2°) d'enjoindre à l'administration de procéder dans un délai de 15 jours à compter de la décision à

intervenir au réexamen de la demande de visa ;

ils soutiennent que le refus de vi...

Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée Mme C épouse A, demeurant ... et par M. A, demeurant ... ; Mme C épouse A, et M. A, demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre la décision implicite du 13 décembre 2005 par laquelle le consul de France à Tbilissi a refusé de délivrer un visa à M. A ;

2°) d'enjoindre à l'administration de procéder dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir au réexamen de la demande de visa ;

ils soutiennent que le refus de visa est illégal dès lors qu'il devait faire l'objet d'une décision motivée en application de l'article 4 du décret du 11 mars 2004 modifié ; que M. A satisfait à toutes les conditions de délivrance d'un visa en sa qualité de conjoint d'un ressortissant français ; qu'il y a urgence à permettre aux époux, séparés depuis le 25 novembre 2005, de se rejoindre ; que cette séparation met gravement en péril la santé de Mme A ;

Vu la décision dont la suspension est demandée et le recours formé devant la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France ;

Vu le mémoire en défense, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 9 février 2006, présenté par le ministre des affaires étrangères et tendant au rejet de la requête par les moyens que le doute sérieux sur la légalité du refus de visa peut être écarté ; qu'en effet, il appartient à l'intéressé de demander communication des motifs du refus implicite de visa ; que le mariage de M. A n'a eu pour seul objet, au regard notamment de sa demande d'asile injustifiée et des nombreux délits commis depuis son arrivée en France, que de lui permettre de rester sur le territoire français ; que les autorités consulaires n'ont commis aucune erreur de droit et erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer un visa en sa qualité de conjoint de français ; que l'urgence peut aussi être écartée dès lors que son union n'a été contractée que dans le seul but de favoriser son installation en France ; que l'état de santé de son épouse, qui lui est exclusivement imputable, n'est pas de nature à justifier que la condition d'urgence est remplie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée, du séjour et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme C épouse A et M. A, d'autre part, le ministre des affaires étrangères ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 10 février 2006 à 15 H 15 au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Waquet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme C épouse A et de M. A ;

- Mme C épouse A ;

- le représentant du ministre des affaires étrangères ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;

Considérant qu'il ressort des pièces soumises au juge des référés que M. A, entré en France en octobre 2003, et Mme C se sont mariés le 27 avril 2005 ; qu'ayant fait l'objet d'une décision de refus de séjour en date du 26 avril 2005, M. A déclare être retourné en Géorgie le 3 septembre 2005 où son épouse l'a rejoint ; qu'il a déposé une demande de visa le 13 octobre 2005 ; que le consul de France à Tbilissi ayant gardé le silence sur cette demande, un refus implicite est né le 13 décembre 2005 ; que dans l'attente de la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France saisie le 18 janvier 2006, les époux JUKIRI demandent au juge des référés de suspendre l'exécution du refus implicite de visa du consul de France à Tbilissi et de lui enjoindre de réexaminer la demande ;

Considérant qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté devant l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener en France une vie familiale normale ; que toutefois, des circonstances particulières tenant à des motifs tirés par l'administration de la nécessité de préserver l'ordre public ou d'une fraude au mariage sont de nature à justifier légalement un refus de visa ;

Considérant que pour s'opposer à la délivrance du visa demandé par M. A, le ministre des affaires étrangères met en cause la sincérité de son mariage avec Mme C, ressortissante française ; qu'au soutien de la fraude au mariage invoquée le ministre fait état d'une part, des cinq condamnations pour vol, tentative de vol ou recel prononcées à l'encontre de M. A entre le 15 mars 2004 et 10 janvier 2005, à des peines allant de 15 jours d'emprisonnement avec sursis à 2 mois d'emprisonnement avec sursis ; que toutefois, ces circonstances, qui auraient pu le cas échéant être invoquées à l'appui d'un motif tiré d'une menace à l'ordre public, ne sont pas en soi de nature à établir la fraude au mariage ; que d'autre part, le ministre soutient que le comportement de M. A, dont la demande d'asile a été rejetée définitivement par la commission des recours des réfugiés le 4 février 2005 et qui s'est marié tout juste deux mois après, le 27 avril 2005, soit la veille de la notification de l'arrêté préfectoral du 26 avril 2005 ordonnant sa reconduite à la frontière, a traduit une telle volonté de contracter un mariage exclusivement pour se maintenir sur le territoire français et à des fins étrangères à l'union matrimoniale ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, que M. A et Mme C, âgés respectivement de 25 ans et 20 ans, ont vécu en concubinage dès le mois de décembre 2003, d'abord au domicile de la mère de la jeune femme, puis dans un foyer de jeune travailleur ; qu'après la notification de l'arrêté portant reconduite à la frontière, M. A est retourné en Géorgie où son épouse la rejoint pour l'aider à accomplir les démarches nécessaires en vue de l'obtention d'un visa et est restée à cette fin en ce pays du 3 octobre au 25 novembre 2005; que depuis son retour en France Mme C a prolongé ses démarches en vue d'obtenir un visa pour son époux ; que dans ces conditions, le moyen tiré par les requérants de l'erreur dans l'appréciation portée par le consul général de France à Tbilissi en refusant de délivrer un visa à M. JUKIRI apparaît ainsi de nature à créer un doute sérieux sur la légalité du refus ; que bien que la commission des recours contre les refus de visa d'entrée en France ait été saisie et soit appelée à statuer sur le recours de M. A, eu égard à l'état psychologique de Mme C, à la faiblesse de ses ressources qui rendent difficile des voyages en Géorgie pour retrouver son conjoint et à l'impossibilité pour le représentant du ministre des affaires étrangères, au cours de l'audience de référé, d'indiquer les délais dans lesquels la commission pourra statuer sur ce recours, il est satisfait en l'espèce à la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants sont fondés à demander à ce que soit ordonnée la suspension de la décision de refus de visa contestée et à ce qu'il soit fait injonction au consul général de France à Tbilissi de procéder, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente ordonnance, au réexamen de la demande de visa présentée par M. A :

O R D O N N E :

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Article 1er : Est ordonnée la suspension de la décision implicite du consul général de France à Tbilissi par laquelle a été rejetée la demande de visa présentée le 13 octobre 2005 par M. A.

Article 2 : Il est enjoint au consul général de France à Tbilissi de procéder à un réexamen de la demande de visa de M. A au vu des motifs de la présente ordonnance dans un délai de quinze jours à compter de sa notification au ministre des affaires étrangères.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme C épouse A, à M. A et au ministre des affaires étrangères.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 10 fév. 2006, n° 289418
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Schwartz
Rapporteur ?: M. Rémy Schwartz
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Formation : Juge des référés
Date de la décision : 10/02/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 289418
Numéro NOR : CETATEXT000008237696 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-02-10;289418 ?
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