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21/02/2006 | FRANCE | N°289812

France | France, Conseil d'État, Juge des referes, 21 février 2006, 289812


Vu la requête, enregistrée le 3 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme A, de nationalité française, demeurant ...78000), en qualité de représentante légale de ses enfants : B ; elle demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision en date du 21 juin 2005 par laquelle le consul général de France à Douala a refusé de délivrer un visa long séjour à ses enfants B ;

2°) d'enjoindre à l'administration de

procéder dans un délai de 30 jours au réexamen des demandes de visas ;

3°) de mettr...

Vu la requête, enregistrée le 3 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme A, de nationalité française, demeurant ...78000), en qualité de représentante légale de ses enfants : B ; elle demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision en date du 21 juin 2005 par laquelle le consul général de France à Douala a refusé de délivrer un visa long séjour à ses enfants B ;

2°) d'enjoindre à l'administration de procéder dans un délai de 30 jours au réexamen des demandes de visas ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient qu'elle a acquis la nationalité française par déclaration à raison de son mariage avec M. X..., ressortissant français, le 29 septembre 2003 ; que le 18 février 2005, elle a déposé des demandes de visas d'établissement pour ses six enfants ; que le consul général de France a rejeté ses demandes par une décision en date du 21 juin 2005 ; que cette décision, qui a pour conséquence de séparer de jeunes enfants de leur mère depuis plusieurs mois, est constitutive d'une situation d'urgence ; qu'au surplus, Séverin Z...
Y... présente des signes d'infirmité d'origine cérébrale nécessitant des soins dont il ne peut bénéficier dans son pays d'origine ; que plusieurs moyens sont, en l'état de l'instruction, susceptibles de créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; que cette dernière est insuffisamment motivée ; qu'elle porte une atteinte disproportionnée au droit de mener une vie familiale normale des intéressés et viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que la décision attaquée, qui se fonde sur le caractère frauduleux des actes de naissance des enfants, est entachée d'erreur de fait ; que, compte tenu de ces éléments, l'administration a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu la décision dont la suspension est demandée et le recours formé devant la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 14 février 2006, présenté par le ministre des affaires étrangères qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que les conclusions tendant à enjoindre à l'administration de procéder au réexamen des demandes de visas, qui auraient des effets en tous points identiques à ceux qui résulteraient de l'annulation de la décision attaquée, sont irrecevables ; qu'en ce qui concerne les conclusions à fin de suspension, il n'existe pas, en l'état de l'instruction, de doute sérieux quant à la légalité de la mesure contestée ; qu'en effet, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation est inopérant, la décision de la commission de recours contre les refus de visa devant se substituer à celle de l'autorité consulaire ; que l'administration n'a commis ni erreur de fait ni erreur manifeste d'appréciation ; qu'en effet, le 13 décembre 2004, le procureur de la République de Nantes a refusé la transcription des actes de naissance des six enfants au motif que ces actes n'étaient pas authentiques ; que les actes de naissances présentés dans le cadre des demandes de visas sont identiques à ceux présentés lors de la demande de transcription ; que les demandes de visas litigieuses sont donc entachées d'une tentative de fraude qui constitue un motif d'ordre public ; qu'à titre subsidiaire, l'existence de reconnaissances de paternité de complaisance, pour lesquelles Mme X... et son époux ont été reconnus coupables le 18 octobre 2005 par le tribunal de grande instance de Versailles, attestent des intentions frauduleuses de la requérante ; qu'il n'a pas été porté d'atteinte disproportionnée au droit de mener une vie familiale normale des intéressés dès lors que le lien de filiation des enfants à l'égard de Mme X... n'est pas avéré ; que, pour cette même raison, les dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant sont inapplicables en l'espèce ; que la condition d'urgence ne peut, par suite, être considérée comme remplie en ce qui concerne l'atteinte à la vie familiale ; qu'il n'est pas non plus établi que l'état de santé de Séverin Z...
Y... soit constitutif d'une situation d'urgence ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 16 février 2006, présenté par Mme A, elle reprend les conclusions et les moyens de sa requête ; elle ajoute que ses conclusions à fin d'injonction sont recevables ; que le caractère non authentique des actes de naissance produits n'est établi par aucune pièce explicative émanant des autorités camerounaises ; que la seule décision du Parquet de Nantes du 13 décembre 2004 ne suffit pas à les caractériser comme tels ; que le moyen tiré de la condamnation des époux pour reconnaissance de paternité de complaisance relève d'un contentieux distinct et ne peut être invoqué en l'espèce ;

Vu les observations complémentaires, enregistrées le 16 février 2006 présentées par Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme A et d'autre part, le ministre des affaires étrangères ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 21 février 2006 à 11 heures au cours de laquelle a été entendu le représentant du ministre des affaires étrangères ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;

Considérant que pour demander la suspension de la décision de refus de visa qu'elle conteste, la requérante fait valoir que cette décision est insuffisamment motivée, qu'elle méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant en ce qu'elle porte atteinte au droit de ses six enfants à vivre avec leur mère, qu'elle est entachée d'erreur de fait en ce qu'elle retient que les actes de naissance produits ne sont pas authentiques sans se fonder sur aucun élément précis émanant des autorités locales confirmant ce caractère et qu'enfin, l'appréciation portée par le consul général de France à Douala sur la situation de ces enfants et l'importance des liens familiaux avec leur mère est entachée d'une erreur manifeste et enfin, que la circonstance que la requérante et son époux ont été poursuivis et condamnés pour reconnaissance mensongère des six enfants en cause est sans rapport avec le contentieux engagé devant le Conseil d'Etat ; qu'en l'état de l'instruction aucun de ces moyens n'est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter la demande de suspension présentée par la requérante et par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce qu'une injonction soit adressée à l'administration et à se voir reconnaître le bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : Juge des referes
Numéro d'arrêt : 289812
Date de la décision : 21/02/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 fév. 2006, n° 289812
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:289812.20060221
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