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01/03/2006 | FRANCE | N°271135

France | France, Conseil d'État, 7eme et 2eme sous-sections reunies, 01 mars 2006, 271135


Vu 1°) la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés sous le n° 271135 les 11 et 18 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Philippe X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la défense, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours formé à l'encontre de la décision du 5 décembre 2003 refusant son inscription au tableau d'avancement au titre de l'année 2004 pour le grade d'ingénieur en chef de l'armement, ensemble la dit

e décision ;

2°) d'enjoindre au ministre de la défense, sur le fondement ...

Vu 1°) la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés sous le n° 271135 les 11 et 18 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Philippe X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la défense, après avis de la commission des recours des militaires, a rejeté son recours formé à l'encontre de la décision du 5 décembre 2003 refusant son inscription au tableau d'avancement au titre de l'année 2004 pour le grade d'ingénieur en chef de l'armement, ensemble la dite décision ;

2°) d'enjoindre au ministre de la défense, sur le fondement des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, de réexaminer sa candidature au tableau d'avancement dans un délai de trois mois à compter de la notification de votre décision, ceci sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 450 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°) la requête, enregistrée sous le n° 271136 le 11 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Philippe X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision implicite rejetant son recours contre le décret du Président de la République du 17 mars 2004 portant nomination et promotion en tant qu'il ne figure pas parmi les ingénieurs en chef de l'armement, ensemble ce décret, et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 450 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………

Vu 3°) la requête, enregistrée sous le n° 271332 le 18 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Philippe X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision implicite rejetant son recours contre le décret du 29 avril 2004 portant nomination et promotion en tant qu'il ne figure pas parmi les ingénieurs en chef de l'armement, ensemble ce décret et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 450 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;

Vu le décret n° 82-1067 du 15 décembre 1982 ;

Vu le décret n° 83-1252 du 31 décembre 1983 ;

Vu le décret n° 2001-407 du 7 mai 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Sibyle Petitjean, Auditeur,

- les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes de M. XX présentent à juger des questions semblables ou connexes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

En ce qui concerne la requête n° 271135 :

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre de la défense en date du 5 décembre 2003 en tant qu'elle refuse l'inscription de M. X sur le tableau d'avancement pour le grade d'ingénieur en chef pour l'année 2004 :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 7 mai 2001 alors applicable organisant la procédure de recours administratif préalable au recours contentieux formés à l'encontre d'actes relatifs à la situation personnelle des militaires : Il est institué auprès du ministre de la défense une commission chargée d'examiner les recours formés par les militaires à l 'encontre d'actes relatifs à leur situation personnelle (…). La saisine de la commission est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier ; que, M. X ayant saisi cette commission d'un recours contre la décision du ministre de la défense, en date du 5 décembre 2003, refusant son inscription au tableau d'avancement pour l'année 2004, la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de la défense, après avis de cette commission, s'est substituée entièrement à celle du 5 décembre 2003 en tant qu'il n'y figure pas ; qu'ainsi, les conclusions de M. X dirigées contre la décision du 5 décembre 2003 sont irrecevables et ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet par le ministre de la défense du recours dirigé contre la décision du 5 décembre 2003 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22 du décret du 15 décembre 1982 portant statut particulier du corps militaire des ingénieurs de l'armement : Les membres de la commission prévue à l'article 41 de la loi du 13 juillet 1972 susvisée et leurs suppléants sont désignés par arrêté du ministre de la défense. Cette commission est placée sous la présidence du délégué général pour l'armement ou de son représentant. Elle comprend notamment l'ingénieur général de l'armement inspecteur général des armées et le directeur des ressources humaines de l'armement ou leur représentant ; que l'arrêté du ministre de la défense du 21 octobre 2003 modifiant l'arrêté du 20 décembre 1982 pris en application de ces dispositions n'a été publié au bulletin officiel que le 10 novembre 2003 ; que, par suite, la commission d'avancement qui s'est réunie le 22 octobre 2003 devait être composée conformément aux dispositions de l'arrêté du 20 décembre 1982 dans sa rédaction antérieure à l'arrêté du 21 octobre 2003 ; qu'en vertu de ces dispositions, cette commission était composée de huit membres ; que, par suite, la participation à cette réunion, en qualité de neuvième membre, de l'inspecteur de l'armement, chef de l'inspection, dont la présence n'est prévue que par l'arrêté du 21 octobre 2003, est irrégulière ; qu'il en résulte que l'avis rendu par cette commission est irrégulier et qu'en conséquence le tableau d'avancement au grade d'ingénieur en chef du corps des ingénieurs de l'armement pour l'année 2004 est entaché d'illégalité ; que, dès lors, M. X est fondé à demander l'annulation du rejet par le ministre de la défense de son recours tendant à l'annulation de la décision du 5 décembre 2003 refusant de l'inscrire sur ce tableau ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'il y a lieu, sur le fondement des dispositions de l'article L. 911 ;2 du code de justice administrative, d'enjoindre au ministre de la défense de refaire le tableau d'avancement au grade d'ingénieur en chef du corps des ingénieurs de l'armement pour l'année 2004 dans le délai de six mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, contrairement à ce que soutient M. X, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'annulation des décrets du Président de la République des 17 mars et 29 avril 2004 portant nomination et promotion dans le grade d'ingénieur en chef de l'armement en tant qu'il n'y figure pas :

Considérant que M. X ayant saisi la commission des recours des militaires respectivement les 6 avril et 7 mai 2004 de deux recours dirigés contre les décrets susanalysés, les décisions prises par le ministre de la défense, après avis de la commission, de refuser de proposer au Président de la République sa nomination au grade d'ingénieur en chef de l'armement, se sont entièrement substituées à ces décrets en tant qu'ils ne font pas figurer M. X au nombre des ingénieurs de l'armement promus au grade d'ingénieur en chef de l'armement pour 2004 ; qu'ainsi, les conclusions de M. X dirigées contre ces décrets sont irrecevables et ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions dirigées contre les décisions prises par le ministre de la défense après saisine de la commission des recours des militaires par M. X contre les décrets du Président de la République des 17 mars et 29 avril 2004 portant nomination et promotion dans le grade d'ingénieur en chef de l'armement en tant qu'il n'y figure pas :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 7 mai 2001 : Dans un délai de quatre mois à compter de la saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision prise sur son recours par lettre recommandée avec accusé de réception. (…) L'absence de décision notifiée à l'expiration du délai de quatre mois vaut décision de rejet du recours formé devant la commission. ; que le silence gardé pendant 4 mois par le ministre de la défense sur les recours formés par M. X contre les décrets du Président de la République des 17 mars et 29 avril 2004 portant nomination et promotion dans le grade d'ingénieur en chef en tant qu'il n'y figure pas, a fait naître deux décisions implicites de rejet ; que pour refuser ainsi de proposer au Président de la République la nomination de au grade d'ingénieur en chef de l'armement pour l'année 2004, le ministre de la défense s'est fondé sur sa décision en date du 5 décembre 2003 arrêtant le tableau d'avancement pour ce grade pour l'année 2004 qui, ainsi qu'il a été constaté ci-dessus, est entachée d'illégalité ; qu'il en résulte que les décisions contestées du ministre de la défense sont privées de base légale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation de ces deux décisions implicites de rejet ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Sont annulées la décision du ministre de la défense rejetant le recours formé par M. X devant la commission des recours des militaires contre la décision du 5 décembre 2003 portant inscription au tableau d'avancement pour le grade d'ingénieur en chef de l'armement pour l'année 2004, ainsi que les deux décisions implicites par lesquelles le ministre de la défense a, après recours de l'intéressé devant la commission précitée, refusé de proposer au Président de la République sa nomination au grade d'ingénieur en chef de l'armement.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de la défense de refaire le tableau d'avancement au grade d'ingénieur en chef de l'armement au titre de l'année 2004 dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à M. une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. X est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe X et au ministre de la défense.


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-02-01 PROCÉDURE. - INTRODUCTION DE L'INSTANCE. - LIAISON DE L'INSTANCE. - RECOURS ADMINISTRATIF PRÉALABLE. - EFFET - SUBSTITUTION DE LA DÉCISION PRISE SUR RECOURS À LA DÉCISION INITIALE - CONSÉQUENCE - POSSIBILITÉ, POUR L'AUTORITÉ ADMINISTRATIVE STATUANT SUR LE RECOURS, DE REMÉDIER, DANS LA LIMITE DE SES COMPÉTENCES, AUX ILLÉGALITÉS ENTACHANT LA DÉCISION INITIALE - LIMITE - NOUVELLE DÉCISION SOUMISE ELLE-MÊME AU PRINCIPE DE LÉGALITÉ - ILLÉGALITÉ DE LA NOUVELLE DÉCISION DÈS LORS QU'ELLE EST PRISE SUR LA BASE D'UNE PRÉCÉDENTE DÉCISION ENTACHÉE D'ILLÉGALITÉ [RJ1].

54-01-02-01 Le silence gardé pendant 4 mois par le ministre de la défense sur les recours formés contre les décrets du Président de la République des 17 mars et 29 avril 2004 portant nomination et promotion dans le grade d'ingénieur en chef en tant que le requérant n'y figure pas, a fait naître deux décisions implicites de rejet. Pour refuser ainsi de proposer au Président de la République la nomination du requérant au grade d'ingénieur en chef de l'armement pour l'année 2004, le ministre de la défense s'est fondé sur sa décision en date du 5 décembre 2003 arrêtant le tableau d'avancement pour ce grade pour l'année 2004. Dès lors que cette décision était entachée d'illégalité, il en résulte que les décisions contestées du ministre de la défense sont privées de base légale.


Références :

[RJ1]

Cf. Section, 18 novembre 2005, Houlbreque, n°270075 à publier au Recueil, feuilles roses p. 65.


Publications
Proposition de citation: CE, 01 mar. 2006, n° 271135
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mlle Sibyle Petitjean
Rapporteur public ?: M. Casas

Origine de la décision
Formation : 7eme et 2eme sous-sections reunies
Date de la décision : 01/03/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 271135
Numéro NOR : CETATEXT000008219298 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-03-01;271135 ?
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