Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE ; le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 juin 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 3 juin 2004 en tant qu'il désigne la Turquie comme pays à destination duquel M. Mehmet A sera reconduit ;
2°) de rejeter les conclusions présentées par M. A devant le tribunal administratif de Rennes et tendant à l'annulation de la mesure distincte fixant la Turquie comme pays à destination duquel il sera reconduit ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45 ;2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Agnès Karbouch-Polizzi, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Laurent Vallée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que M. A fait valoir qu'il est d'origine kurde, que le village où il habitait a été rasé en 1994, qu'il n'a pas rempli ses obligations militaires en Turquie et que l'un de ses oncles a été tué par balles fin avril 2003 ; que, toutefois, l'intéressé, dont la demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par l'office français pour la protection des réfugiés et apatrides le 18 décembre 2003, n'apporte pas d'éléments de nature à établir la réalité d'un engagement direct pour la cause kurde, ni l'existence de risques sérieux auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour en Turquie ; que, par suite, en se fondant sur le moyen tiré de ce que la décision contestée exposerait M. A à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes a fait une inexacte application de ces stipulations ; que, par suite, le PREFET D'ILLE-ET-VILAINE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes, retenant l'unique moyen invoqué à l'appui des conclusions sur ce point, a annulé son arrêté du 3 juin 2004 en tant qu'il désignait la Turquie comme pays à destination duquel M. A serait reconduit ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 1er du jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Rennes en date du 7 juin 2004 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de M. A présentées devant le président du tribunal administratif de Rennes et tendant à l'annulation de l'arrêté du PREFET D'ILLE-ET-VILAINE du 3 juin 2004 en tant qu'il désigne la Turquie comme pays à destination duquel M. A sera reconduit, sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET D'ILLE-ET-VILAINE, à M. Mehmet A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.