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31/03/2006 | FRANCE | N°275730

France | France, Conseil d'État, 5eme et 4eme sous-sections reunies, 31 mars 2006, 275730


Vu, 1°) sous le n° 275730, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 décembre 2004 et 22 avril 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société LILL'IMMO, dont le siège est ... représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège ; la société LILL'IMMO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 21 octobre 2004 par lequel le tribunal administratif de Lille, d'une part, a confirmé l'arrêté de péril non imminent du 5 décembre 2003 par lequel le maire de Tourcoing a mis en demeure la

société requérante de faire procéder dans un délai de trente jours, à la démoli...

Vu, 1°) sous le n° 275730, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 décembre 2004 et 22 avril 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société LILL'IMMO, dont le siège est ... représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège ; la société LILL'IMMO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 21 octobre 2004 par lequel le tribunal administratif de Lille, d'une part, a confirmé l'arrêté de péril non imminent du 5 décembre 2003 par lequel le maire de Tourcoing a mis en demeure la société requérante de faire procéder dans un délai de trente jours, à la démolition totale de son immeuble, sis ..., d'autre part, lui a accordé un délai d'un mois pour exécuter les travaux prescrits par ledit arrêté ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Tourcoing, le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°) sous le n° 275731 la requête, enregistrée le 22 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la société LILL'IMMO, dont le siège est ..., représentée par son gérant domicilié en cette qualité audit siège ; la société LILL'IMMO demande au Conseil d'Etat qu'il soit sursis à l'exécution du jugement susvisé en date du 21 octobre 2004 par lequel le tribunal administratif de Lille a, d'une part, confirmé l'arrêté de péril du 5 décembre 2003 par lequel le maire de Tourcoing a mis en demeure la société requérante de faire procéder dans un délai de trente jours à la démolition totale de son immeuble sis ... et, d'autre part, lui a accordé un délai d'un mois pour exécuter les travaux prescrits par ledit arrêté ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la société LILL'IMMO et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la commune de Tourcoing,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes enregistrées sous les n°s 275730 et 275731 présentent à juger des questions communes ; qu'il y a lieu de les joindre afin qu'elles fassent l'objet d'une seule décision ;

Sur la régularité du jugement du tribunal administratif :

Considérant que le mémoire produit après la clôture de l'instruction par la société LILL'IMMO soulevait une question relative à la recevabilité de la demande de la commune transmise au tribunal administratif selon la procédure définie par les articles L. 511 ;2 et R. 511 ;1 du code de construction de l'habitation ; qu'en jugeant qu'un tel mémoire ne constituait pas « une circonstance de droit nouvelle » pouvant être invoquée après la clôture de l'instruction, alors qu'il portait sur une question de recevabilité sur laquelle le tribunal devait s'interroger, le premier juge a commis une erreur de droit ; que la société LILL'IMMO est, par suite, fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non ;recevoir opposée par la société ILL'IMMO :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation : « Dans les cas prévus au premier alinéa de l'article L. 511-1, le propriétaire est mis en demeure d'effectuer dans un délai déterminé les travaux de réparation ou de démolition de l'immeuble menaçant ruine et, si le propriétaire conteste le péril, de faire commettre un expert chargé de procéder, contradictoirement et au jour fixé par l'arrêté, à la constatation de l'état du bâtiment et de dresser rapport. - Si, au jour indiqué, le propriétaire n'a point fait cesser le péril et s'il n'a pas cru devoir désigner un expert, il sera passé outre et procédé à la visite par l'expert seul nommé par l'administration. - Le tribunal administratif, après avoir entendu les parties dûment convoquées conformément à la loi, statue sur le litige de l'expertise, fixe, s'il y a lieu, le délai pour l'exécution des travaux ou pour la démolition. Il peut autoriser le maire à y faire procéder d'office et aux frais du propriétaire si cette exécution n'a pas eu lieu à l'époque prescrite… » ; que l'article R. 511-1 du même code dispose que : « Dans le cas prévu par l'article L. 511-1, l'arrêté du maire prescrivant la réparation ou la démolition d'un bâtiment menaçant ruine et les rapports d'experts nommés comme il est dit à l'article L. 511-2, sont transmis immédiatement au tribunal administratif. Dans les huit jours qui suivent le dépôt au greffe, le tribunal, s'il y a désaccord entre les experts, désigne un homme de l'art pour procéder à la même opération. - Dans le cas d'une constatation unique, le tribunal administratif peut ordonner telles vérifications qu'il croit nécessaires » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté de péril pris le 5 décembre 2003 par le maire de Tourcoing mettait la société LILL'IMMO en demeure de démolir dans un délai d'un mois l'immeuble lui appartenant, sis au ..., en précisant que si la société entendait contester le péril, elle devait commettre un expert afin de procéder le 22 janvier 2004, contradictoirement avec l'expert de la commune, à la vérification de l'état des lieux ; que le maire a transmis l'arrêté de péril au tribunal administratif de Lille le 17 septembre 2004, en y joignant, d'une part, une expertise réalisée le 10 novembre 2003 par un expert désigné par le tribunal d'instance dans le cadre d'une procédure de péril imminent conduite antérieurement sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation et, d'autre part, le compte rendu, établi le 20 avril 2004 par les services de la commune, d'une réunion qui s'était tenue sur les lieux le 22 janvier, en présence du représentant de la société et d'un architecte désigné par lui ; que ce compte rendu se bornait à indiquer que l'immeuble n'avait pas été démoli ; que, faute d'avoir été dressé par un expert et de constater l'état de péril du bâtiment en prenant parti sur les mesures de nature à rétablir la sécurité, ce document ne peut être regardé comme le rapport d'expert exigé par les dispositions de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation ; qu'en l'absence d'un tel rapport, l'arrêté de péril ne saurait être confirmé ; que par suite, la demande de la commune de Tourcoing tendant à l'homologation de l'arrêté de péril pris le 5 décembre 2003 doit être rejetée ;

Considérant que, dès lors que la présente décision statue sur le recours en cassation dirigé contre le jugement du 21 octobre 2004 du tribunal administratif de Lille, la requête n° 275731, tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement, a perdu son objet ; qu'il n'y a donc pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions relatives à la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mis à la charge de la société LILL'IMMO qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, les frais exposés par la commune de Tourcoing ; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application desdites dispositions et de mettre à la charge de la commune de Tourcoing la somme de 3 000 euros que demande la société LILL'IMMO au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 21 octobre 2004 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande de la commune de Tourcoing tendant à l'homologation de l'arrêté de péril pris le 5 décembre 2003 est rejetée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 275731.

Article 4 : La commune de Tourcoing versera à la société LILL'IMMO une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. La demande présentée par la commune et tendant au remboursement de ses frais est rejetée.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société LILL'IMMO, à la commune de Tourcoing et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 5eme et 4eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 275730
Date de la décision : 31/03/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 31 mar. 2006, n° 275730
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY ; SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:275730.20060331
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