La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/04/2006 | FRANCE | N°267771

France | France, Conseil d'État, 7eme et 2eme sous-sections reunies, 05 avril 2006, 267771


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 mai et 20 septembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS, dont le siège est ... ; la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS (SNCF) demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 18 mars 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du 3 décembre 1998 du tribunal administratif de Melun et l'a condamnée à verser à la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône la somme de 411 612,35 euros en r

éparation du préjudice subi du fait des travaux d'interconnexion d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 mai et 20 septembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS, dont le siège est ... ; la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS (SNCF) demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 18 mars 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du 3 décembre 1998 du tribunal administratif de Melun et l'a condamnée à verser à la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône la somme de 411 612,35 euros en réparation du préjudice subi du fait des travaux d'interconnexion des lignes de TGV nord et sud-est ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nathalie Escaut, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Odent, avocat de la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS et de Me Bouthors, avocat de la société des autoroutes Paris ;Rhin-Rhône,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône (SAPRR), concessionnaire de l'autoroute A 5, a été contrainte de modifier le tracé de cette autoroute pour permettre la réalisation en Seine et Marne de l'interconnexion des lignes de train à grande vitesse nord et sud-est ; qu'elle a passé, le 28 janvier 1992, un accord avec la SNCF portant sur la coordination des travaux des deux chantiers et sur la prise en charge des frais supplémentaires en résultant pour elle ; qu'une convention d'échange de terrains a été ensuite conclue entre la SAPRR et la SNCF le 30 septembre 1994 ; que faisant droit à la demande de la SAPRR, la cour administrative d'appel de Paris a, par un arrêt en date du 18 mars 2004, condamné la SNCF à verser à la SAPRR, en exécution de la convention du 28 janvier 1992, une somme de 411 612,35 euros au titre des frais supplémentaires de dépollution supportés par cette dernière ; que la SNCF se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

Considérant que d'une part, il ressort des écritures de la SNCF devant la cour administrative d'appel de Paris que celle-ci n'avait pas, dans le cadre du litige contractuel, soulevé de moyen tiré de ce que la remise en état des terrains incombait à l'exploitant de l'installation classée et non au propriétaire du terrain ; que dès lors le fait que la cour n'a pas répondu à un tel moyen n'est pas de nature à entacher son arrêt d'irrégularité ; que d'autre part, en jugeant que si la SNCF soutient que la société requérante n'a fait aucune observation à ce titre lors de la conclusion de la convention d'échange du 30 septembre 1994 en vertu de laquelle a été transférée à cette dernière la propriété des terrains d'assiette des décharges litigieuses, il ressort de l'examen de cette convention que celle-ci avait un objet différent de celui de la convention du 28 janvier 1992, la cour a répondu au moyen de la SNCF fondé sur les conséquences sur la convention de 1992 de l'absence d'observation de la SAPRR sur les frais de dépollution lors de la conclusion de la convention d'échange de terrains du 30 septembre 1994 ; qu'ainsi la SNCF n'est pas fondée à soutenir que la cour n'aurait pas suffisamment motivé son arrêt ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et notamment, du préambule de la convention du 28 janvier 1992 qui indique que la déclaration d'utilité publique de l'interconnexion étant postérieure à celle de l'autoroute A 5, la SNCF supportera les dépenses et frais complémentaires, engagés par la SAPRR pour toutes modifications induites sur l'autoroute A 5 et ses annexes, qu'en jugeant que les dépenses de dépollution exposées par la SAPRR à la suite de la découverte de décharges sur les terrains nécessaires à la nouvelle emprise de l'autoroute, entraient dans le champ d'application de l'accord du 28 janvier 1992, la cour n'a pas dénaturé la commune intention des parties à cette convention ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la convention conclue le 30 septembre 1994 entre la SNCF et la SAPRR procède à l'échange des terrains nécessité par la modification du tracé de l'autoroute ; que son objet est ainsi différent de celui de la convention du 28 janvier 1992 qui porte sur la coordination des travaux des deux chantiers de la SAPRR et de la SNCF et sur la prise en charge des frais supplémentaires supportés par la SAPRR ; que par suite, en l'absence de toute stipulation en ce sens de la convention du 30 septembre 1994, la cour a pu, sans dénaturer ces documents contractuels, juger que l'absence d'observation de la SAPRR sur les frais de dépollution lors de la conclusion de la convention portant sur l'échange des terrains en 1994, n'interdisait pas à cette société de rechercher le paiement de ces frais par la SNCF sur le fondement de la convention du 28 janvier 1992 ;

Considérant que si la SNCF soutient que la cour aurait commis une erreur de droit en faisant application de la convention du 28 janvier 1992 alors qu'elle n'était plus en vigueur à la date de la demande d'indemnisation de la SAPRR, ce moyen est soulevé pour la première fois en cassation et est, dès lors, irrecevable ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNCF n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SNCF le paiement à la SAPRR de la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SNCF est rejetée.

Article 2 : La SNCF versera 3 000 euros à la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE NATIONALE DES CHEMINS DE FER FRANÇAIS et à la société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône.


Synthèse
Formation : 7eme et 2eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 267771
Date de la décision : 05/04/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - POUVOIRS ET OBLIGATIONS DU JUGE - POUVOIRS DU JUGE DU CONTRAT - INTERPRÉTATION DU CONTRAT - POUVOIRS DU JUGE DE CASSATION SAISI D'UN MOYEN DE DÉNATURATION DES STIPULATIONS CONTRACTUELLES - RÉFÉRENCE AU PRÉAMBULE DU CONTRAT.

39-08-03-02 Pour apprécier un moyen tiré de la dénaturation d'un contrat, le juge de cassation peut se référer au préambule de celui-ci.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - POUVOIRS DU JUGE DE CASSATION - INTERPRÉTATION DU CONTRAT - POUVOIRS DU JUGE SAISI D'UN MOYEN DE DÉNATURATION DES STIPULATIONS CONTRACTUELLES - RÉFÉRENCE AU PRÉAMBULE DU CONTRAT.

54-07-05 Pour apprécier un moyen tiré de la dénaturation d'un contrat, le juge de cassation peut se référer au préambule de celui-ci.

PROCÉDURE - VOIES DE RECOURS - CASSATION - CONTRÔLE DU JUGE DE CASSATION - RÉGULARITÉ INTERNE - DÉNATURATION - INTERPRÉTATION DU CONTRAT - POUVOIRS DU JUGE SAISI D'UN MOYEN DE DÉNATURATION DES STIPULATIONS CONTRACTUELLES - RÉFÉRENCE AU PRÉAMBULE DU CONTRAT.

54-08-02-02-01-04 Pour apprécier un moyen tiré de la dénaturation d'un contrat, le juge de cassation peut se référer au préambule de celui-ci.


Publications
Proposition de citation : CE, 05 avr. 2006, n° 267771
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mme Nathalie Escaut
Rapporteur public ?: M. Boulouis
Avocat(s) : ODENT ; BOUTHORS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:267771.20060405
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award