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05/04/2006 | FRANCE | N°269883

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 05 avril 2006, 269883


Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD, dont le siège est passage Marchand à Uzès (30700), Mme Danielle A, demeurant 39, boulevard Gambetta à Uzès (30700), M. Jean-Luc B, demeurant 35, boulevard Gambetta à Uzès (30700), M. Jean-Marc C, demeurant 5, avenue Jean-Jaurès à Uzès (30700) ; l'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 28 avril 2004 par

laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à l...

Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD, dont le siège est passage Marchand à Uzès (30700), Mme Danielle A, demeurant 39, boulevard Gambetta à Uzès (30700), M. Jean-Luc B, demeurant 35, boulevard Gambetta à Uzès (30700), M. Jean-Marc C, demeurant 5, avenue Jean-Jaurès à Uzès (30700) ; l'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 28 avril 2004 par laquelle la commission nationale d'équipement commercial a accordé à la SAS Immobilière Carrefour l'autorisation préalable requise en vue d'agrandir l'hypermarché à l'enseigne Carrefour et de créer une galerie marchande à Uzès (Gard) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée ;

Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre-Antoine Molina, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Yves Struillou, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la SAS Immobilière Carrefour :

Sur la régularité de la décision attaquée :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SAS Immobilière Carrefour est bénéficiaire d'une promesse de vente du terrain sur lequel son projet d'équipement commercial consistant à agrandir l'hypermarché situé à Uzès doit être réalisé ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait méconnu les dispositions de l'article 18 du décret du 9 mars 1993 relatif à l'autorisation d'implantation de certains magasins de commerce de détail, aux observatoires et aux commissions d'équipement commercial doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes du VIII de l'article L. 720-3 du code de commerce : Les demandes portant sur la création d'un magasin de commerce de détail (...) d'une surface de vente supérieure à 6 000 mètres carrés sont accompagnées des conclusions d'une enquête publique portant sur les aspects économiques, sociaux et d'aménagement du territoire (...) ;

Considérant que les sociétés requérantes soutiennent que la décision attaquée serait irrégulière faute pour le pétitionnaire d'avoir joint à sa demande les conclusions de l'enquête publique prévue par les dispositions citées ci-dessus alors que la surface de vente de l'établissement, après l'extension autorisée, aurait dépassé le seuil de 6 000 m² ; que, cependant, il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne s'appliquent qu'aux demandes portant sur des projets de création ; que, par suite, le moyen est inopérant ;

Sur les moyens tirés des insuffisances et inexactitudes du dossier de demande d'autorisation :

Considérant qu'il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que la commission nationale d'équipement commercial a autorisé la SAS Immobilière Carrefour à augmenter de 1 800 m2 la surface de vente de l'hypermarché Carrefour situé à Uzès afin de porter celle-ci à 5 136 m2 ; que la demande formée par ladite société tendait à ce que la surface de vente de l'hypermarché fût portée à cette même surface de vente ; que la commission nationale ne s'est dès lors pas méprise sur la portée de la demande dont elle était saisie ; que si l'autorisation litigieuse s'analyse aussi, pour partie, comme la régularisation de l'exploitation d'une surface de vente de 136 m2, une telle circonstance n'est pas, par elle-même, de nature à entacher d'illégalité la décision attaquée ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 720-3 du code de commerce, la commission départementale d'équipement commercial et, sur recours, la commission nationale d'équipement commercial statuent sur les demandes d'autorisation qui leur sont soumises suivant les principes définis aux articles L. 720-1 et L. 720-2 du même code en prenant en considération l'effet potentiel du projet sur l'appareil commercial et artisanal de la zone de chalandise concernée ; qu'aux termes de l'article 18-1 du décret du 9 mars 1993 définissant le contenu de la demande d'autorisation de création et d'extension d'équipement commercial : Pour les projets de magasins de commerce de détail, la demande (...) est accompagnée : (...) b) des renseignements suivants : 1° Délimitation de la zone de chalandise du projet et mention de la population de chaque commune comprise dans cette zone ainsi que de son évolution entre les deux derniers recensements généraux ; 2° Marché théorique de la zone de chalandise ; 3° Equipement commercial et artisanal de la zone de chalandise, y compris les marchés accueillant des commerçants non sédentaires ; 4° Equipements commerciaux exerçant une attraction sur la zone de chalandise (...) ;

Considérant que, pour l'application de ces dispositions, la zone de chalandise de l'équipement commercial faisant l'objet d'une demande d'autorisation, qui correspond à la zone d'attraction que cet équipement est susceptible d'exercer sur la clientèle, est délimitée en tenant compte des conditions d'accès au site d'implantation du projet et des temps de déplacement nécessaires pour y accéder ; que, dans un second temps, l'inventaire des équipements commerciaux ou artisanaux de la zone de chalandise ainsi délimitée est effectué en retenant l'ensemble de ceux qui relèvent du même secteur d'activité que celui du projet, y compris ceux qui sont exploités sous la même enseigne que celle sous laquelle le projet, objet de l'autorisation, a été présenté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de sa demande d'autorisation d'exploitation commerciale relative à l'extension d'un hypermarché et à la création d'une galerie marchande, à Uzès (Gard), la SAS Immobilière Carrefour a délimité une zone de chalandise correspondant à un temps de desserte de 30 minutes environ, comprenant 57 communes ; que, compte tenu notamment des résultats de l'étude de clientèle effectuée par le demandeur, l'exclusion des communes de Nîmes, des Angles et d'Avignon situées en périphérie de la zone de chalandise n'entache pas, en l'espèce, d'irrégularité la délimitation de cette zone ; que les inexactitudes qui affecteraient la délimitation des sous-zones de chalandise sont sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;

Considérant que le moyen tiré de ce que le pétitionnaire, en ne faisant pas état dans son dossier de demande de projets de déviation du trafic routier par un contournement d'Uzès et de création d'un giratoire, aurait méconnu les prescriptions de l'article L. 720-3 du code de commerce relatives à la prise en considération de l'impact global du projet sur les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison, manque en fait ;

Sur l'appréciation portée par la commission nationale sur les conséquences du projet :

Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et des articles L. 720-1 à L. 720-3 du code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet appréciés, d'une part, en tenant compte de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs et, d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'importance non contestée de la population saisonnière, la densité, d'une part, en hypermarchés, d'autre part, en grandes ou moyennes surfaces spécialisées dans le secteur de l'équipement de la personne et de la maison restera, après la réalisation du projet contesté, dans la zone de chalandise, à un niveau inférieur aux densités moyennes de référence ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la réalisation du projet conduira l'enseigne Carrefour à occuper dans cette zone une position dominante dont elle pourrait abuser ; que, dans ces conditions, l'autorisation contestée ne méconnaît pas les objectifs fixés par le législateur ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat et de la SAS Immobilière Carrefour, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, les sommes demandées par les requérantes, au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la SAS Immobilière Carrefour tendant à ce que l'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD et autres lui versent la somme de 3 000 euros au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de l'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD et autres sont rejetées.

Article 2 : L'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD et autres verseront à la SAS Immobilière Carrefour la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'UNION DES COMMERCANTS, INDUSTRIELS ET ARTISANS D'UZES ET DU GARD, à Mme Danielle A, à M. Jean-Luc B, à M. Jean-Marc C, à la SAS Immobilière Carrefour, à la commission nationale d'équipement commercial et au ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05-01-01 COMMERCE, INDUSTRIE, INTERVENTION ÉCONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. RÉGLEMENTATION DES ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES. ACTIVITÉS SOUMISES À RÉGLEMENTATION. URBANISME COMMERCIAL. CHAMP D'APPLICATION. CRÉATION ET TRANSFORMATION. - OBLIGATION D'ENQUÊTE PUBLIQUE (ART. L. 720-3 VII DU CODE DE COMMERCE) - A) CRÉATION - EXISTENCE - B) EXTENSION - ABSENCE.

14-02-01-05-01-01 a) Il résulte des termes mêmes du VIII de l'article L. 720-3 du code de commerce que ces dispositions, qui imposent la réalisation d'une enquête publique portant sur les aspects économiques, sociaux et d'aménagement du territoire, ne s'appliquent qu'aux demandes portant sur des projets de création.,,b) Elles ne sont donc pas applicables aux projets d'extension.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 05 avr. 2006, n° 269883
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: M. Pierre-Antoine Molina
Rapporteur public ?: M. Struillou

Origine de la décision
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Date de la décision : 05/04/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 269883
Numéro NOR : CETATEXT000008223991 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-04-05;269883 ?
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