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05/04/2006 | FRANCE | N°275742

France | France, Conseil d'État, 10eme et 9eme sous-sections reunies, 05 avril 2006, 275742


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 décembre 2004 et 22 avril 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Evelyne A, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; M. Marc B, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Clémence C, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; M. Joël D, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Joséphine H, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Odette E, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Julie F, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Marie-José G

, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Raymonde J, demeurant ......

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 décembre 2004 et 22 avril 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Evelyne A, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; M. Marc B, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Clémence C, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; M. Joël D, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Joséphine H, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Odette E, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Julie F, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Marie-José G, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme Raymonde J, demeurant ... à Clohars-Carnoët (29360) ; Mme A et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 14 octobre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur requête en tierce opposition tendant à ce que cette cour déclare non avenu son arrêt du 18 février 2003 par lequel elle a annulé le jugement du 19 juillet 2001 du tribunal administratif de Rennes rejetant la demande de Monsieur Jacques I tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif qui lui a été délivré le 20 juillet 1999 par le maire de Clohars-Carnoët (Finistère), ensemble ledit certificat ;

2°) de les déclarer recevables en leur tierce opposition, de déclarer non avenu l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 18 février 2003 et de rejeter la demande de M. I dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 19 juillet 2001 ;

3°) de mettre à la charge de M. I la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 2002-285 du 28 février 2002 autorisant la ratification de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998, ensemble le décret n° 2002-1187 du 12 septembre 2002 portant publication de cette convention ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Fabienne Lambolez,

- les observations de Me Brouchot, avocat Mme Evelyne A et autres,

- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par un arrêt en date du 18 février 2003, la cour administrative d'appel de Nantes a, à la demande de M. I, annulé le jugement du 19 juillet 2001 du tribunal administratif de Rennes rejetant la demande de l'intéressé tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif qui lui avait été délivré le 20 juillet 1999 par le maire de Clohars-Carnoët, ainsi que ledit certificat ; que, par l'arrêt du 14 octobre 2004, la même cour a déclaré irrecevable la tierce opposition formée contre son arrêt du 18 février 2003 par Mme A et autres, voisins de la parcelle en cause, au motif que cet arrêt n'avait pas préjudicié à leurs droits et qu'en leur qualité de voisins, ils n'avaient pas à être appelés à l'instance dans laquelle M. I demandait l'annulation pour excès de pouvoir du certificat d'urbanisme négatif ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance de la convention d'Aarhus :

Considérant qu'aux termes du paragraphe 3 de l'article 9 de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998 : « … sans préjudice des procédures de recours visées aux paragraphes 1 et 2 ci-dessus, chaque Partie veille à ce que les membres du public … puissent engager des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions … d'autorités publiques allant à l'encontre des dispositions du droit national de l'environnement » et qu'aux termes du paragraphe 5 du même article : « pour rendre les dispositions du présent article encore plus efficaces, chaque Partie veille à ce que le public soit informé de la possibilité qui lui est donnée d'engager des procédures de recours administratif ou judiciaire, et envisage la mise en place de mécanismes appropriés d'assistance visant à éliminer ou à réduire les obstacles financiers ou autres qui entravent l'accès à la justice » ; que les stipulations précitées créent seulement des obligations entre les Etats parties à la convention et ne produisent pas d'effets directs dans l'ordre juridique interne ; qu'elles ne peuvent par suite, et en tout état de cause, être utilement invoquées par les requérants ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'aux termes de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ;

Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article R. 832-1 du code de justice administrative aux termes duquel « toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision», ne méconnaissent pas les stipulations précitées de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mais tendent au contraire à garantir le droit d'accès au juge que ces stipulations rappellent ;

Considérant, en second lieu, que l'annulation par une décision juridictionnelle d'un certificat d'urbanisme négatif ne rend pas le demandeur titulaire d'un certificat positif et ne crée aucun droit à son profit ; qu'une telle annulation ne saurait, dès lors, préjudicier à des droits détenus par les tiers ; qu'en outre, dans l'hypothèse où à la suite d'une telle annulation, le demandeur obtiendrait la délivrance d'un certificat positif à la faveur d'une nouvelle demande, les tiers intéressés seraient recevables à contester la légalité de ce certificat positif devant la juridiction administrative ; qu'ainsi, la cour n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 6 en estimant que l'annulation du certificat d'urbanisme négatif délivré à M. I n'avait pas préjudicié aux droits des requérants, qui se bornaient à faire valoir leur qualité de voisins de la parcelle en cause, et en déclarant pour ce motif leur tierce opposition irrecevable ;

Sur le moyen dirigé contre l'arrêt du 18 février 2003 :

Considérant que si les requérants soutiennent que la cour a commis une erreur sur la qualification d'espaces terrestres et marins remarquables, ce moyen, qui n'est pas relatif à l'arrêt attaqué, ne saurait utilement être invoqué à l'encontre de celui-ci ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur tierce opposition dirigée contre l'arrêt du 18 février 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens, soit mise à la charge de M. I qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de Mme A et autres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Evelyne A, M. Marc B, Mme Clémence C, M. Joël D, Mme Joséphine H, Mme Odette E, Mme Julie F, Mme Marie-José G et Mme Raymonde J. Une copie sera transmise à la commune de Clohars-Carnoët, à M. Jacques I et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - VOIES DE RECOURS - TIERCE-OPPOSITION - RECEVABILITÉ - ABSENCE - TIERS CONTESTANT L'ANNULATION D'UN CERTIFICAT D'URBANISME NÉGATIF.

54-08-04-01 L'annulation par une décision juridictionnelle d'un certificat d'urbanisme négatif ne rend pas le demandeur titulaire d'un certificat positif et ne crée aucun droit à son profit. Une telle annulation ne saurait, dès lors, préjudicier à des droits détenus par les tiers qui, par suite, ne sont pas recevables à former tierce opposition contre elle. En outre, dans l'hypothèse où à la suite d'une telle annulation, le demandeur obtiendrait la délivrance d'un certificat positif à la faveur d'une nouvelle demande, les tiers intéressés seraient recevables à contester la légalité de ce certificat positif devant la juridiction administrative.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - CERTIFICAT D'URBANISME - EFFETS DE L'ANNULATION DU REFUS D'ACCORDER UN CERTIFICAT D'URBANISME - ATTRIBUTION D'UN CERTIFICAT D'URBANISME POSITIF AU TITULAIRE - ABSENCE - CONSÉQUENCE - ANNULATION NE PRÉJUDICIANT PAS AUX DROITS DES TIERS - IRRECEVABILITÉ DE LA TIERCE-OPPOSITION FORMÉE PAR DES TIERS CONTRE CETTE ANNULATION JURIDICTIONNELLE.

68-025 L'annulation par une décision juridictionnelle d'un certificat d'urbanisme négatif ne rend pas le demandeur titulaire d'un certificat positif et ne crée aucun droit à son profit. Une telle annulation ne saurait, dès lors, préjudicier à des droits détenus par les tiers qui, par suite, ne sont pas recevables à former tierce opposition contre elle. En outre, dans l'hypothèse où à la suite d'une telle annulation, le demandeur obtiendrait la délivrance d'un certificat positif à la faveur d'une nouvelle demande, les tiers intéressés seraient recevables à contester la légalité de ce certificat positif devant la juridiction administrative.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 05 avr. 2006, n° 275742
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: Mme Fabienne Lambolez
Rapporteur public ?: Mme Mitjavile
Avocat(s) : BROUCHOT

Origine de la décision
Formation : 10eme et 9eme sous-sections reunies
Date de la décision : 05/04/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 275742
Numéro NOR : CETATEXT000008260654 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-04-05;275742 ?
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