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05/04/2006 | FRANCE | N°278588

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 05 avril 2006, 278588


Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mlle X... Olga A, demeurant ... et pour Mme B, sa mère, demeurant ... ; Mlle A et Mme B demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de délivrance d'un visa d'entrée en France à Mlle A, ensemble la décision implicite de refus de visa prise par le consul général de France à Lomé ;

2°) d'enjoindre au

ministre des affaires étrangères de délivrer à Mlle A un visa de long séjour « f...

Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mlle X... Olga A, demeurant ... et pour Mme B, sa mère, demeurant ... ; Mlle A et Mme B demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté la demande de délivrance d'un visa d'entrée en France à Mlle A, ensemble la décision implicite de refus de visa prise par le consul général de France à Lomé ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères de délivrer à Mlle A un visa de long séjour « famille de Français » dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'en vertu de l'article 5 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, reprises depuis à l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile, la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France confirmant le rejet de la demande de visa présentée par l'enfant à charge de ressortissants français doit être motivée ; qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : « Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande… » ;

Considérant que Mlle A, ressortissante togolaise majeure qui soutient, sans être utilement contredite, être à charge de sa mère et de son beau-père de nationalité française, avait formé, le 8 novembre 2004, un recours contre le rejet de sa demande de visa par l'autorité consulaire, qu'elle s'est vue opposer une décision implicite de rejet par la commission de recours ; qu'elle en a demandé les motifs par un courrier reçu le 17 janvier 2005 par la commission ; que ces motifs ne lui ont été communiqués que par une lettre du 19 mai 2005, soit après l'expiration du délai d'un mois imparti par les dispositions susmentionnées ; que, contrairement à ce que soutient le ministre des affaires étrangères, cette lettre ne saurait régulariser le défaut de motivation de la décision attaquée dont, par suite, Mlle A est fondée à demander l'annulation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé » ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 : « Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet » ;

Considérant que si la présente décision, qui annule la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France opposée à Mlle A, n'implique pas nécessairement que les autorités compétentes lui délivrent un visa, elle a en revanche pour effet de saisir à nouveau ces autorités de la demande de l'intéressée ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au ministre des affaires étrangères de procéder à ce nouvel examen dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'il n'y a cependant pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par la requérante ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions de Mlle A tendant à ce que l'Etat lui verse la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision implicite par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de Mlle A est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre des affaires étrangères de procéder à un nouvel examen de la demande de Mlle A dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à Mlle A la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mlle X... Olga A, à Mme B, à la commission de recours contre les décisions de refus de visas d'entrée en France et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 278588
Date de la décision : 05/04/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 avr. 2006, n° 278588
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:278588.20060405
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