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28/04/2006 | FRANCE | N°265002

France | France, Conseil d'État, 5eme sous-section jugeant seule, 28 avril 2006, 265002


Vu la requête, enregistrée le 26 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 21 novembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté en date du 19 août 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A ;

2°) de rejeter la requête de Mme A devant ce même tribunal ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droit

s de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45 ;2658 du 2 novembre 1945...

Vu la requête, enregistrée le 26 février 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 21 novembre 2003 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté en date du 19 août 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A ;

2°) de rejeter la requête de Mme A devant ce même tribunal ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45 ;2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : « Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (..) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) » ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, de nationalité philippine, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 15 avril 2003, de la décision du 11 avril 2003 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a invitée à quitter le territoire ; qu'elle se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider de la reconduite à la frontière d'un étranger ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale prévue au premier alinéa du même article est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant. Les années durant lesquelles l'étranger s'est prévalu de documents d'identité falsifiés ou d'une identité usurpée ne sont pas prises en compte (…) ;

Considérant que si Mme A fait valoir qu'elle réside en France sans interruption depuis 1992, ses allégations ne sont pas assorties des pièces suffisantes, notamment s'agissant des années 1992 à 1996, pour établir sa présence habituelle en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière ; que, par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur ce que l'intéressée pouvait prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en application de l'article 12 bis, 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant toutefois qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme A devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant que l'arrêté attaqué a été signé par M. B, titulaire d'une délégation de signature consentie par le PREFET DE POLICE le 2 janvier 2003, et publiée au Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris le 7 janvier 2003 ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme A ne peut prétendre à un droit au séjour sur le fondement de l'article 12 bis, 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que le préfet soutient, sans être contesté, que M. Roméo X..., s'il vit en France en compagnie de son épouse Mme A, se trouve en situation irrégulière vis-à-vis des règles applicables en matière d'entrée et de séjour des étrangers en France et que les quatre enfants du couple résident aux Philippines ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaît le droit au respect de la vie familiale de Mme A ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 19 août 2003 ;

Sur les conclusions de Mme A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande Mme A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 21 novembre 2003 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme A et au ministre d'état, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 5eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 265002
Date de la décision : 28/04/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 avr. 2006, n° 265002
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hubac
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Olson

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:265002.20060428
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