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28/04/2006 | FRANCE | N°291795

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 28 avril 2006, 291795


Vu la requête, enregistrée le 29 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. B...A..., demeurant ... ; M. A...demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1° ) de suspendre l'exécution de la décision du 7 octobre 2005 du président de l'université de Paris III La Sorbonne Nouvelle d'engager une démarche visant à rattacher son emploi de professeur des universités à l'unité de formation et de recherche " langues et littérature française et latine " ( LLFL) et de

lui confier une mission exploratoire pouvant valoir décharge d'enseignem...

Vu la requête, enregistrée le 29 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. B...A..., demeurant ... ; M. A...demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1° ) de suspendre l'exécution de la décision du 7 octobre 2005 du président de l'université de Paris III La Sorbonne Nouvelle d'engager une démarche visant à rattacher son emploi de professeur des universités à l'unité de formation et de recherche " langues et littérature française et latine " ( LLFL) et de lui confier une mission exploratoire pouvant valoir décharge d'enseignement et de la décision du 19 janvier 2006 rejetant son recours gracieux contre cette décision ;

2°) d'enjoindre au président de l'université de le rétablir dans l'ensemble de ses droits et fonctions de recherche et d'enseignement au sein de l'unité de formation et de recherche de communication, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'université la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient qu'à la suite de la décision contestée à laquelle il n'a donné son accord que sous la contrainte, il n'a plus été autorisé à assurer ses enseignements au sein de l'UFR de communication ; que ses étudiants ont été invités à choisir un autre directeur de recherche ou un autre membre de jury de thèse ; que le centre de recherche qu'il dirige, dénommé CEISME, n'a plus été mentionné dans la plaquette de l'école doctorale ; qu'il n'a plus disposé d'un bureau et que son courrier a été retenu ; que ses droits et prérogatives de professeur des universités ont ainsi été gravement méconnus ; que la décision dont la suspension est demandée porte en outre une atteinte grave aux intérêts de ses étudiants et à l'équipe de recherche qu'il dirige ainsi qu'en attestent les intéressés et est préjudiciable aux intérêts généraux de la recherche scientifique ; qu'il justifie ainsi de l'urgence ; que la décision contestée n'est pas motivée ; qu'il n'a pas reçu au préalable communication de son dossier alors que cette décision constitue, sinon une sanction disciplinaire déguisée, à tout le moins une mesure prise en considération de la personne ; que sa charge d'enseignement ne pouvait être modifiée sans consultation préalable du conseil de l'unité de formation et de recherche et des présidents des commissions de spécialistes concernées ; qu'a aussi été méconnu l'article 34 du décret du 6 juin 1984 prévoyant que les changements de discipline doivent faire l'objet d'un avis favorable de la commission de spécialistes et du conseil scientifique siégeant en formation restreinte aux enseignants d'un rang au moins égal ; que le motif tiré de ce qu'il aurait donné son consentement à son rattachement à l'unité de formation et de recherche LLFL est matériellement inexact ; que la décision repose sur une appréciation manifestement erronée de l'intérêt du service et de ses compétences scientifiques ; que l'attribution des enseignements qu'il dispensait à un chargé de cours recruté à cet effet méconnaît le critère de l'ancienneté dans l'établissement et l'article 7 du décret du 6 juin 1984 ; qu'enfin, le principe d'indépendance des enseignants-chercheurs repris par l'article L. 123-9 du code de l'éducation s'opposait aux mesures prises à son égard ; que ces moyens sont de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

Vu les décisions dont la suspension est demandée ;

Vu, enregistré le 21 avril 2006, le mémoire en défense présenté par le président de l'université de Paris III qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du requérant par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient qu'elle est dirigée contre un acte qui est dépourvu de tout caractère décisoire ; que la lettre du 7 octobre 2005, dont le contenu a d'ailleurs été approuvé par M. A..., se borne à mentionner l'ouverture des procédures de consultation nécessaires pour rattacher l'emploi du requérant à une autre unité de formation et de recherche sans préjuger de leur résultat ; qu'une telle démarche n'implique par elle-même aucune modification des attributions de l'intéressé dans les domaines de l'enseignement et de la recherche ; que, d'ailleurs, si sa situation a été modifiée sur divers points, des arrangements ont été trouvés par le président de l'université pour répondre à ses inquiétudes et lui assurer les moyens de poursuivre ses enseignements et ses activités de recherche ; qu'à supposer la requête recevable, il n'est justifié ni de l'urgence ni de moyens propres à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué ;

Vu, enregistré le 26 avril 2006, le mémoire en réplique présenté pour M.A..., tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; il soutient en outre que les mesures qui modifient gravement la situation et les prérogatives des enseignants-chercheurs quant aux services d'enseignement qui leur sont confiés et les moyens mis à leur disposition ont le caractère d'actes faisant grief ; que les mesures en cause, prises en considération de la personne, devaient être précédées de la communication au requérant de son dossier ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. A...et d'autre part, le président de l'université de Paris III La Sorbonne Nouvelle ;

Vu le procès verbal de l'audience publique du 27 avril 2006 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Coutard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A... ;

- M.A... ;

- Me Hémery, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du président de l'université de Paris III La Sorbonne Nouvelle ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et des indications données lors de l'audience publique qu'à la suite de difficultés survenues notamment au sein de l'unité de formation et de recherche Communication de l'université de Paris III à laquelle est rattaché l'emploi de professeur des universités de M.A..., des arrangements ont été recherchés par le président de l'université en concertation avec les intéressés ; que dans une lettre du 7 octobre 2005, sur le contenu de laquelle M. A...a dans un premier temps donné son accord, le président de l'université a résumé ces entretiens en indiquant qu'il entamait les démarches en vue du rattachement de l'emploi de ce professeur à une autre unité de formation et de recherche tout en lui confiant une mission exploratoire aux fins de définir les modalités lui permettant de poursuivre ses enseignements et ses recherches dans sa discipline ; que M. A...a demandé l'annulation et, par la présente requête, la suspension, de cette lettre en tant qu'elle comporte l'engagement de la " démarche visant à rattacher " son emploi à l'unité de formation et de recherche de langue et de littérature française et latine ;

Considérant que la modification du rattachement d'un emploi d'enseignant-chercheur à une unité de formation et de recherche ne peut être prononcée qu'à la suite de la consultation des conseils des unités concernées et de la commission de spécialistes dont relève l'enseignant-chercheur nommé sur cet emploi ; que par la lettre contestée le président de l'université s'est borné à indiquer qu'il engageait ces procédures de consultation ; que la conduite de ces procédures n'impliquait par elle-même aucune modification de la situation statutaire et des prérogatives de M.A..., professeur des universités en communication et n'a pas pour conséquence de modifier la discipline dont il relève ; qu'ainsi cette lettre est dépourvue de caractère décisoire ; que les conclusions d'annulation ne sont pas dirigées contre les mesures qui ont suivi concernant ses attributions et ses moyens de travail pendant la période des consultations conduites en vue de son éventuel rattachement à une autre unité de formation et de recherche ; qu'en raison de l'irrecevabilité des conclusions de M. A...tendant à l'annulation de la lettre du 7 octobre 2005, aucun des moyens n'apparaît propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à sa légalité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de M. A...ne peut qu'être rejetée ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, de ses conclusions tendant à ce que, par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l'université de Paris III ; que, dans les circonstances de l'affaire, l'université de Paris est fondée à demander qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A...par application des mêmes dispositions ;

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de M. B...A...est rejetée.

Article 2 : M. A...versera à l'université de Paris III la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B...A...et à l'université de Paris III.

Copie de la présente ordonnance sera transmise pour information au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 28 avr. 2006, n° 291795
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP COUTARD, MAYER ; HEMERY

Origine de la décision
Formation : Juge des référés
Date de la décision : 28/04/2006
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 291795
Numéro NOR : CETATEXT000008221257 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-04-28;291795 ?
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