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10/05/2006 | FRANCE | N°266198

France | France, Conseil d'État, 6eme sous-section jugeant seule, 10 mai 2006, 266198


Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 12 février 2004, par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 février 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Dmytro X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d

e New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;

Vu l'ordonnance n° 4...

Vu la requête, enregistrée le 5 avril 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 12 février 2004, par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 février 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Dmytro X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. , de nationalité ukrainienne, est entré en France et s'est maintenu sur le territoire jusqu'à son interpellation, le 9 février 2004, sans avoir obtenu de titre de séjour ; qu'il était ainsi dans le cas visé au 2° de l'article 22 ;I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 lorsque le Préfet des Yvelines a pris, le même jour, un arrêté décidant sa reconduite à la frontière ;

Considérant que si, à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. faisait valoir que l'aîné de ses enfants, âgé de six ans, ne parlait que le français et était scolarisé en France et que le second y était né en 2003 , il ressortait toutefois des pièces du dossier produit par l'intéressé devant le tribunal administratif de Paris qu'il ne pouvait justifier d'une durée importante de séjour sur le territoire français, que son épouse était également en situation irrégulière et qu'il ne justifiait pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où résidaient ses parents et où aucune pièce du dossier ne permettait de présumer qu'il ne pouvait pas, compte tenu de leur jeune âge, emmener ses enfants afin d'y poursuivre une vie familiale normale ; que si M. persiste à soutenir devant le Conseil d'Etat qu'il n'a plus aucune famille en Ukraine, cette seule circonstance ne saurait suffire à le faire regarder, eu égard à ce qui a été dit ci-dessus sur la situation de son épouse et l'âge de ses enfants, comme disposant désormais de ses attaches familiales en France ; que, par suite, l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de M. ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans ces conditions, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la violation de cet article pour prononcer l'annulation de son arrêté ;

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. tant devant le tribunal administratif de Paris que devant le Conseil d'Etat ;

Considérant que, par un arrêté du 2 juin 2003 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a donné à M. , secrétaire général adjoint, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait ;

Considérant que l'arrêté attaqué, qui énonce les considérations de droit et de fait qui le fondent, est suffisamment motivé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant, qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. ait, dans les circonstances de l'espèce, méconnu ces stipulations ;

Considérant que, si M. soutient que son mode de vie, notamment l'éducation française donnée à ses enfants, témoigne de sa volonté d'insertion en France, cette circonstance ne permet pas d'établir que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences que l'arrêté attaqué pouvait avoir sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à demander l'annulation du jugement du 12 février 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 9 février 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 12 février 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Paris par M. X... est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, M. X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 10 mai. 2006, n° 266198
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: M. Bruno Chavanat
Rapporteur public ?: M. Aguila

Origine de la décision
Formation : 6eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 10/05/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 266198
Numéro NOR : CETATEXT000008255776 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-05-10;266198 ?
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