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10/05/2006 | FRANCE | N°275813

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 10 mai 2006, 275813


Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Roger A, demeurant ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 août 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) de mettre à la

charge de l'Etat la somme de 1 524 euros au titre des frais exposés par lui et non compris d...

Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Roger A, demeurant ... ; M. A demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 août 2003 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 524 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité camerounaise, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 27 mars 2003, de la décision du préfet de police du même jour lui refusant le renouvellement du titre de séjour qu'il détenait en qualité d'étudiant et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention étudiant (...) ; que l'article 8 du décret du 30 juin 1946 modifié, dispose que : l'étranger déjà admis à résider en France qui sollicite le renouvellement d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande : (...) 4° S'il entend se maintenir en France pour y faire des études ou y suivre un enseignement ou un stage de formation, la justification de moyens suffisants d'existence et d'un certificat d'immatriculation, d'inscription ou de préinscription dans un établissement d'enseignement ou de formation professionnelle public ou privé fonctionnant dans des conditions conformes aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur (...) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A était inscrit pour l'année universitaire 2001-2002 en quatrième année de l'Ecole supérieure appliquée aux affaires à Paris après avoir obtenu un brevet de technicien supérieur en commerce international en 1997 ; que si au titre de l'année universitaire 2001-2002 M. A a passé avec succès les épreuves théoriques de cette quatrième année, il n'a pu effectuer son stage professionnel à l'étranger et soutenir son rapport de stage, lequel est obligatoire pour valider son cursus, au cours de cette même année universitaire ; que toutefois, M. A a obtenu de son école, par une décision du 30 avril 2002, que soit différée d'une année la validation de son diplôme afin qu'il puisse effectuer son stage à l'étranger et en soutenir le rapport ; qu'il ressort effectivement des pièces du dossier que l'intéressé a effectué un stage professionnel de juin à novembre 2002 au Royaume-Uni puis a soutenu son mémoire et obtenu son diplôme le 5 décembre 2003 ; que, par suite, bien qu'en l'absence d'une inscription universitaire l'ensemble des éléments précités attestent de la réalité des études de l'intéressé au titre de l'année 2002-2003 ;

Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a souscrit en décembre 2001 un emprunt de 127 000 F sur 9 ans pour lui permettre de financer ses études ; que le montant de ce prêt est suffisant, en l'espèce, pour considérer qu'à la date de la mesure contestée l'intéressé justifiait de moyens d'existence suffisants ;

Considérant que M. A remplissait ainsi les conditions énoncées par les dispositions du 4° de l'article 8 du décret du 30 novembre 1946 pour obtenir le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant ; qu'en conséquence, en refusant de renouveler le titre de séjour de l'intéressé le préfet de police a entaché sa décision du 27 mars 2003 d'une erreur d'appréciation ; que, par suite, la décision de refus de titre de séjour précitée ne pouvait légalement servir de fondement à la mesure de reconduite à la frontière du 8 août 2003 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 12 novembre 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police en date du 8 août 2003 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Roger A et au préfet de police.

Copie en sera adressée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 275813
Date de la décision : 10/05/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 mai. 2006, n° 275813
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Imbert-Quaretta
Rapporteur public ?: M. Glaser

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:275813.20060510
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