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16/06/2006 | FRANCE | N°270807

France | France, Conseil d'État, 1ere sous-section jugeant seule, 16 juin 2006, 270807


Vu la requête, enregistrée le 4 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 9 juillet 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ses arrêtés du 17 mai 2004 décidant la reconduite à la frontière et fixant l'Algérie comme pays de destination de M. Ammar A, enjoint à ses services de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour et de statuer sur sa demande de certificat de réside

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Vu la requête, enregistrée le 4 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 9 juillet 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ses arrêtés du 17 mai 2004 décidant la reconduite à la frontière et fixant l'Algérie comme pays de destination de M. Ammar A, enjoint à ses services de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour et de statuer sur sa demande de certificat de résidence, enfin, mis à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 750 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco ;algérien du 27 décembre 1968 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 ;

Vu la loi n° 91 ;647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le décret n° 98-503 du 23 juin 1998 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Luc Derepas, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boullez, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants », et qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 25 juillet 1952, dans sa rédaction applicable à la date des décisions contestées : « Dans les conditions compatibles avec les intérêts du pays, l'asile territorial peut être accordé (…) à un étranger si celui-ci établit que sa vie ou sa liberté est menacée dans son pays ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a fait l'objet de menaces en Algérie en sa double qualité de citoyen ayant accepté d'accomplir son service militaire et d'intellectuel ; que le 16 février 2001, sa famille a été victime d'une agression de la part de militants islamistes armés à sa recherche, qui ont saccagé la maison familiale ; que, compte tenu du contexte local, les menaces évoquées conservent un caractère actuel et la vie de l'intéressé serait menacée en cas de retour en Algérie ; qu'ainsi, le refus opposé à sa demande d'asile territorial par le ministre de l'intérieur a été pris en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'arrêté du 17 mai 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ainsi que l'arrêté du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination de cette reconduite sont illégaux du seul fait de l'illégalité de la décision du ministre de l'intérieur lui refusant le bénéfice de l'asile territorial et, par voie de conséquence, du refus de titre de séjour pris sur le fondement de cette décision ; que, par suite, le PREFET DE L'ISERE n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ses arrêtés du 17 mai 2004 ;

Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant que si M. A a obtenu l'aide juridictionnelle, et si son avocat n'a pas demandé à percevoir de somme mise à la charge de la partie perdante dans les conditions définies à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le requérant justifie avoir lui ;même exposé des frais non couverts par l'aide juridictionnelle ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre la somme de 1 200 euros que M. A demande à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête du PREFT DE L'ISERE est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ISERE, à M. Ammar A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 16 jui. 2006, n° 270807
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Luc Derepas
Rapporteur public ?: M. Devys
Avocat(s) : SCP BOULLEZ

Origine de la décision
Formation : 1ere sous-section jugeant seule
Date de la décision : 16/06/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 270807
Numéro NOR : CETATEXT000008241399 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-06-16;270807 ?
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