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28/06/2006 | FRANCE | N°275130

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 28 juin 2006, 275130


Vu la décision en date du 7 octobre 2005 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, avant-dire-droit sur la requête de Mlle Mina A enregistrée le 13 décembre 2004 et tendant à l'annulation du jugement du 22 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 octobre 2004 du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de renvoi et à l'annulation de cet arrêté, a ordonné au préfet de police de produire devant le Conseil d'Etat

l'avis du médecin-chef de la préfecture de police du 27 décembre 200...

Vu la décision en date du 7 octobre 2005 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, avant-dire-droit sur la requête de Mlle Mina A enregistrée le 13 décembre 2004 et tendant à l'annulation du jugement du 22 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 octobre 2004 du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de renvoi et à l'annulation de cet arrêté, a ordonné au préfet de police de produire devant le Conseil d'Etat l'avis du médecin-chef de la préfecture de police du 27 décembre 2003 ainsi que, le cas échéant, tout autre document de nature à éclairer le Conseil d'Etat sur les affections dont Mlle A est atteinte ;

Vu le mémoire de production du préfet de police enregistré le 11 janvier 2006 ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 janvier 2006, présenté par Mlle A, qui persiste dans les conclusions de sa requête ; elle soutient en outre que contrairement à ce qu'affirme le rapport du médecin-chef de la préfecture de police, la gravité de son état de santé ne lui permet pas de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mlle Maud Vialettes, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle A, de nationalité marocaine, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 6 août 2004, de la décision du préfet de police du 2 août 2004 lui refusant le renouvellement d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant toutefois qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors en vigueur, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » prévue au premier alinéa du même article est délivrée de plein droit : « 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle A suit un traitement médical pour des affections gynécologiques ; qu'elle a obtenu des autorisations provisoires de séjour puis, après avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, une carte de séjour pour raison de santé, valable jusqu'au 26 décembre 2003 ; que, par un nouvel avis pris après examen de Mlle A, le 27 décembre 2003, le médecin-chef de la préfecture de police a toutefois estimé que Mlle A pouvait désormais bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que le renouvellement de son titre de sa carte de séjour lui a été en conséquence refusé ;

Considérant que, pour demander l'application à son profit des dispositions précitées de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, Mlle A se prévaut de certificats médicaux circonstanciés établis par des médecins hospitaliers ; qu'eu égard à l'argumentation qu'elle développe ainsi et pour pouvoir apprécier si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une extrême gravité et si un traitement approprié peut lui être dispensé dans son pays d'origine, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, par une décision avant-dire-droit en date du 7 octobre 2005, invité le préfet de police à lui communiquer l'avis établi le 27 décembre 2003 par le médecin-chef de la préfecture de police ainsi que, le cas échéant, tout autre document médical de nature à l'éclairer sur les affections dont Mlle A est atteinte ; que par un mémoire du 11 janvier 2006, le préfet de police n'a produit que l'avis en date du 27 décembre 2003 ; que cet avis se borne à affirmer que si l'état de santé de Mlle A nécessitait une prise en charge médicale et si le défaut de prise en charge pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée pourrait en bénéficier dans son pays d'origine et ne justifie pas ainsi des raisons pour lesquelles le traitement dispensé à Mlle A pourrait désormais être prodigué au Maroc ; que, dans ces conditions, Mlle A est fondée à soutenir qu'elle avait droit au renouvellement de son titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors en vigueur et que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a refusé d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2004 par lequel le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ;


D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 22 novembre 2004 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 11 octobre 2004 du préfet de police ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle A sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Mina A, au préfet de police et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 28 jui. 2006, n° 275130
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Bonichot
Rapporteur ?: Mlle Maud Vialettes
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias

Origine de la décision
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 28/06/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 275130
Numéro NOR : CETATEXT000018004400 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-06-28;275130 ?
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