La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/07/2006 | FRANCE | N°264217

France | France, Conseil d'État, 5eme et 4eme sous-sections reunies, 07 juillet 2006, 264217


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 février et 4 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Régis A, demeurant ..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants mineurs ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 4 décembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 14 septembre 1999 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier régional unive

rsitaire de Caen soit condamné à lui verser 200 000 F et 100 000 F à ch...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 février et 4 juin 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Régis A, demeurant ..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de ses enfants mineurs ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 4 décembre 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 14 septembre 1999 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à ce que le centre hospitalier régional universitaire de Caen soit condamné à lui verser 200 000 F et 100 000 F à chacun de ses enfants mineurs en réparation du préjudice moral résultant pour eux du décès de Mme A ;

2°) statuant au fond, de condamner le centre hospitalier régional et universitaire de Caen à lui verser 30 489 euros et 15 244,90 euros à chacun de ses trois enfants, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal et avec capitalisation desdits intérêts ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional et universitaire de Caen le paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et ses enfants et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Sanson, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. Régis A et Me Odent, avocat du centre hospitalier régional et universitaire de Caen,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme a subi au centre hospitalier régional et universitaire de Caen, le 9 octobre 1995, une ponction lombaire et une injection de corticoïdes selon la méthode dite « de Luccherini » pour traiter une lombosciatique ; qu'après une aggravation brutale de son état de santé à partir du 14 octobre suivant, elle est décédée le 20 octobre 1995 à l'âge de 35 ans d'une thrombophlébite cérébrale ; que son époux, M. A, a demandé réparation du préjudice subi sur le fondement de la responsabilité sans faute du centre hospitalier ; que le tribunal administratif de Caen puis la cour administrative d'appel de Nantes ont rejeté sa demande ;

Considérant que, lorsqu'un acte médical nécessaire au diagnostic ou au traitement du malade présente un risque dont l'existence est connue mais dont la réalisation est exceptionnelle et dont aucune raison ne permet de penser que le patient y soit particulièrement exposé, la responsabilité du service public hospitalier est engagée si l'exécution de cet acte est la cause directe de dommages sans rapport avec l'état initial du patient comme avec l'évolution prévisible de cet état, et présentant un caractère d'extrême gravité ;

Considérant, en premier lieu, que M. A soutient que l'arrêt de la cour est entaché d'irrégularité, faute d'avoir répondu à son moyen tiré de ce qu'à la date des faits une étude scientifique avait mis en évidence une relation de cause à effet entre l'injection de corticoïdes et la survenance d'une thrombophlébite cérébrale ; que, toutefois, la cour a écarté explicitement le moyen en jugeant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise ordonnée par le juge des référés… que, contrairement à ce que soutient M. A, l'existence d'un risque de thrombophlébite cérébrale comme complication d'une infiltration selon la méthode dite « de Luccherini » n'était pas connue à la date à laquelle elle a été effectuée sur son épouse ; qu'elle a ainsi suffisamment motivé son arrêt sur ce point ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'étude produite par M. A, réalisée par un médecin du centre hospitalier régional et universitaire de Caen faisant état des risques de complication décrits ci-dessus, n'a été rédigée qu'au début de l'année 1997, plus d'un an après l'intervention pratiquée en octobre 1995 sur Mme A et que la connaissance de cas similaires à celui de Mme A et le rapprochement réalisé entre ces différents cas sont postérieurs à cette intervention ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait dénaturé cette étude en estimant que l'existence d'un risque de thrombophlébite cérébrale comme complication d'une infiltration selon la méthode dite « de Luccherini » n'était pas connue en 1995, doit être écarté ;

Considérant, enfin, qu'en jugeant que, faute pour la patiente d'avoir été exposée à un risque dont l'existence était connue au moment de l'intervention, l'une des conditions requises pour que la responsabilité sans faute du Centre hospitalier régional et universitaire de Caen soit engagée n'était pas remplie et en rejetant, par suite, la requête de M. A, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative de Nantes du 4 décembre 2003 ;

Sur les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du Centre hospitalier régional et universitaire de Caen qui n'est pas, dans la présente espèce, la partie perdante, le versement de la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Régis A, au centre hospitalier régional et universitaire (CHRU) de Caen, à la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados et au ministre de la santé et des solidarités.


Synthèse
Formation : 5eme et 4eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 264217
Date de la décision : 07/07/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2006, n° 264217
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Marc Sanson
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : SCP ROGER, SEVAUX ; ODENT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:264217.20060707
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award