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07/07/2006 | FRANCE | N°272433

France | France, Conseil d'État, 8ème / 3ème ssr, 07 juillet 2006, 272433


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 septembre 2004 et 21 janvier 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE GRANDVILLIERS, représentée par son maire ; la COMMUNE DE GRANDVILLIERS demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 20 juillet 2004 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé les arrêtés des 10 juin 2002, 18 juillet 2002, 16 septembre 2002, 5 novembre 2002, 22 avril 2003, 26 mai 2003, 11 juin 2003, 15 juillet 2003, 10 septembre 2003 et 9 octobre 2003 du maire de Grandvilliers ;
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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 septembre 2004 et 21 janvier 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE GRANDVILLIERS, représentée par son maire ; la COMMUNE DE GRANDVILLIERS demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 20 juillet 2004 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé les arrêtés des 10 juin 2002, 18 juillet 2002, 16 septembre 2002, 5 novembre 2002, 22 avril 2003, 26 mai 2003, 11 juin 2003, 15 juillet 2003, 10 septembre 2003 et 9 octobre 2003 du maire de Grandvilliers ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;

Vu le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc El Nouchi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la COMMUNE DE GRANDVILLIERS et de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de MmeB...,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeB..., attachée territoriale de la COMMUNE DE GRANDVILLIERS (Oise) a bénéficié de douze mois consécutifs de congés de maladie ordinaire, du 9 avril 2001 au 9 avril 2002 ; que, saisi par le maire de cette commune de la situation applicable à cet agent à compter du 9 avril 2002, le comité médical départemental a émis le 28 mai 2002 l'avis suivant : "Prolongation de congé de maladie ordinaire du 9 janvier 2002 au 8 juillet 2002" ; que par un arrêté du 10 juin 2002, le maire de Grandvilliers a placé Mme B...en disponibilité d'office pour une période de trois mois du 9 avril au 9 juillet 2002 ; que cette mise en disponibilité a été prolongée par deux arrêtés des 18 juillet et 16 septembre 2002 ; qu'intervenant à nouveau à la demande du maire de Grandvilliers, le comité médical départemental a émis le 29 octobre 2002 le second avis suivant : "Disponibilité à prolonger dans l'attente d'une solution de compromis avec l'employeur" ; qu'à la suite de cet avis, le maire de la commune a prolongé la mise en disponibilité d'office de MmeB..., du 10 août 2002 au 10 novembre 2003, par sept arrêtés successifs en date des 5 novembre 2002 et 22 avril, 26 mai, 11 juin, 15 juillet, 10 septembre et 9 octobre 2003 ; que la COMMUNE DE GRANDVILLIERS se pourvoit en cassation contre le jugement du 20 juillet 2004, par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, à la demande de Mme B..., annulé les dix arrêtés susmentionnés du maire de Grandvilliers ;

Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions relatives à la fonction publique territoriale : "Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...)" ; que l'article 72 de la même loi dispose que : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2° (...) de l'article 57 (...)" ; qu'aux termes de l'article 81 de la même loi : "Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé" ; qu'en vertu de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 (...) portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux (...) et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, le comité médical départemental donne un avis "sur l'octroi et le renouvellement des congés de maladie et la réintégration à l'issue des congés de maladie" et est obligatoirement consulté pour "la mise en disponibilité d'office pour raison de santé et son renouvellement (...)" ; que l'article 17 du même décret dispose que : "(...) Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...)" ; qu'aux termes de l'article 37 du même décret : "Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée attribuable, reprendre son service est soit reclassé (...), soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...)" ; que l'article 38 du même décret précise que : "La mise en disponibilité visée aux articles 17 (...) du présent décret est prononcée après avis du comité médical (...) sur l'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions (...) Le renouvellement de la mise en disponibilité est prononcé après avis du comité médical (...)" ; que l'article 1er du décret du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions prévoit que : "Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial ne lui permet plus d'exercer normalement ses fonctions et que les nécessités du service ne permettent pas d'aménager ses conditions de travail, le fonctionnaire peut être affecté dans un autre emploi de son grade après avis de la commission administrative paritaire / L'autorité territoriale procède à cette affectation après avis (...) du comité médical si un tel congé a été accordé (...)" ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : "Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale (...), après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadres d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984" ;

Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant qu'il résultait des avis des 28 mai et 29 octobre 2002 du comité médical départemental que Mme B..."n'était pas apte médicalement à reprendre l'emploi qu'elle occupait antérieurement", le tribunal administratif a répondu au moyen tiré par la commune requérante de ce que Mme B...ne pouvait légalement reprendre son travail, pour la période allant du 9 janvier au 8 juillet 2002 ; qu'en jugeant qu'il résultait des mêmes avis que Mme B...n'était pas pour autant "inapte à occuper tout autre emploi de son grade", de sorte qu'en vertu des dispositions susmentionnées, le maire ne pouvait prononcer sa disponibilité d'office sans lui avoir au préalable proposé une affectation sur un autre poste vacant dans sa collectivité ou, à défaut, dans une autre collectivité, les juges du fond ont également suffisamment répondu au moyen tiré par la COMMUNE DE GRANDVILLIERS de ce qu'un fonctionnaire en congé de maladie depuis plus de douze mois consécutifs pouvait être placé en disponibilité d'office après avis défavorable du comité médical sur l'aptitude de l'intéressé à reprendre le travail ;

Considérant, en deuxième lieu, d'une part, qu'en estimant que l'avis du 28 mai 2002 du comité médical départemental, qui, interrogé sur l'aptitude de Mme B...à reprendre son emploi, avait recommandé la prolongation du congé de maladie ordinaire de l'intéressée, devait être regardé comme reconnaissant que cette dernière n'était pas apte à reprendre l'emploi qu'elle occupait antérieurement, le tribunal administratif n'a pas entaché les pièces du dossier de dénaturation ; qu'en regardant, d'autre part, la recommandation du même comité, dans son avis précité du 29 octobre 2002, de maintenir l'intéressée en position de disponibilité jusqu'à ce qu'un compromis soit trouvé avec l'autorité hiérarchique, comme ne concluant pas à l'inaptitude de Mme B...à occuper un autre emploi de son grade après reclassement, le tribunal administratif n'a pas davantage entaché son appréciation des pièces du dossier de dénaturation ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées, et notamment des articles 57, 72 et 81 de la loi du 26 janvier 1984, de l'article 37 du décret du 30 juillet 1987 et de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985, que lorsqu'un fonctionnaire a été, à l'issue de ses droits statutaires à congé de maladie, reconnu inapte à la reprise des fonctions qu'il occupait antérieurement et alors que, comme c'est le cas en l'espèce, le comité médical ne s'est pas prononcé sur sa capacité à occuper, par voie de réaffectation, de détachement ou de reclassement, un autre emploi, éventuellement dans un autre corps ou un autre grade, l'autorité hiérarchique ne peut placer cet agent en disponibilité d'office, sans l'avoir préalablement invité à présenter, s'il le souhaite, une demande de reclassement ; que la mise en disponibilité d'office peut ensuite être prononcée soit en l'absence d'une telle demande, soit si cette dernière ne peut être immédiatement satisfaite ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le maire de Grandvilliers a placé Mme B...en disponibilité d'office, par les dix arrêtés successifs contestés, sans que l'intéressée ait été invitée à présenter une demande de reclassement dans un autre emploi de la commune ou d'une autre collectivité publique ; que, dès lors, en jugeant que le maire de la commune requérante, en s'estimant tenu de placer d'office en position de disponibilité MmeB..., avait privé cette dernière de la possibilité d'exercer son droit à reclassement alors qu'il incombait au maire de lui en permettre l'exercice, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la COMMUNE DE GRANDVILLIERS n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la COMMUNE DE GRANDVILLIERS la somme de 3 000 euros que demande Mme B...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE GRANDVILLIERS est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE GRANVILLIERS versera à Mme B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE GRANDVILLIERS et à Mme A...B....


Synthèse
Formation : 8ème / 3ème ssr
Numéro d'arrêt : 272433
Date de la décision : 07/07/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - POSITIONS - DISPONIBILITÉ - DISPONIBILITÉ D'OFFICE EN CAS D'INAPTITUDE À LA REPRISE DES FONCTIONS APRÈS UN CONGÉ DE MALADIE - PROCÉDURE - INVITATION PRÉALABLE À PRÉSENTER UNE DEMANDE DE RECLASSEMENT [RJ1].

36-05-02 Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 57, 72 et 81 de la loi du 26 janvier 1984, de l'article 37 du décret du 30 juillet 1987 et de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985, que lorsqu'un fonctionnaire a été, à l'expiration de ses droits statutaires à congé de maladie, reconnu inapte à la reprise des fonctions qu'il occupait antérieurement et alors que, comme c'est le cas en l'espèce, le comité médical ne s'est pas prononcé sur sa capacité à occuper, par voie de réaffectation, de détachement ou de reclassement, un autre emploi, éventuellement dans un autre corps ou un autre grade, l'autorité hiérarchique ne peut placer cet agent en disponibilité d'office sans l'avoir préalablement invité à présenter, s'il le souhaite, une demande de reclassement. La mise en disponibilité d'office peut ensuite être prononcée, soit en l'absence d'une telle demande, soit si cette dernière ne peut être immédiatement satisfaite.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - POSITIONS - CONGÉS - CONGÉS DE MALADIE - QUESTIONS COMMUNES - DISPONIBILITÉ D'OFFICE EN CAS D'INAPTITUDE À LA REPRISE DES FONCTIONS APRÈS UN CONGÉ DE MALADIE - PROCÉDURE - INVITATION PRÉALABLE À PRÉSENTER UNE DEMANDE DE RECLASSEMENT [RJ1].

36-05-04-01-01 Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 57, 72 et 81 de la loi du 26 janvier 1984, de l'article 37 du décret du 30 juillet 1987 et de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985, que lorsqu'un fonctionnaire a été, à l'expiration de ses droits statutaires à congé de maladie, reconnu inapte à la reprise des fonctions qu'il occupait antérieurement et alors que, comme c'est le cas en l'espèce, le comité médical ne s'est pas prononcé sur sa capacité à occuper, par voie de réaffectation, de détachement ou de reclassement, un autre emploi, éventuellement dans un autre corps ou un autre grade, l'autorité hiérarchique ne peut placer cet agent en disponibilité d'office sans l'avoir préalablement invité à présenter, s'il le souhaite, une demande de reclassement. La mise en disponibilité d'office peut ensuite être prononcée, soit en l'absence d'une telle demande, soit si cette dernière ne peut être immédiatement satisfaite.


Références :

[RJ1]

Rappr. 2 octobre 2002, Chambre de commerce et d'industrie de Meurthe-et-Moselle, p. 320.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2006, n° 272433
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc El Nouchi
Rapporteur public ?: M. Olléon
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:272433.20060707
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