La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/07/2006 | FRANCE | N°275093

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 07 juillet 2006, 275093


Vu 1°), sous le n° 275093, la requête, enregistrée le 10 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SYNDICAT PROFESSIONNEL DES ENTREPRISES LOCALES GAZIERES, dont le siège est 27 rue Saint-Ferdinand à Paris Cedex 17 (75848) ; le SYNDICAT PROFESSIONNEL DES ENTREPRISES LOCALES GAZIERES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et du ministre délégué à l'industrie du 12 novembre 2004 relatif aux prix de vente du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de dis

tribution, en tant qu'il a limité la hausse de ce prix à 0,15 c€/kWh en m...

Vu 1°), sous le n° 275093, la requête, enregistrée le 10 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le SYNDICAT PROFESSIONNEL DES ENTREPRISES LOCALES GAZIERES, dont le siège est 27 rue Saint-Ferdinand à Paris Cedex 17 (75848) ; le SYNDICAT PROFESSIONNEL DES ENTREPRISES LOCALES GAZIERES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et du ministre délégué à l'industrie du 12 novembre 2004 relatif aux prix de vente du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de distribution, en tant qu'il a limité la hausse de ce prix à 0,15 c€/kWh en moyenne à compter du 15 novembre 2004 ;

2°) d'enjoindre aux ministres compétents de prendre, dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, un nouvel arrêté fixant le prix du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de distribution à un niveau qui, conformément au II de l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003, devra être défini en fonction des caractéristiques intrinsèques des fournitures et des coûts liés à ces fournitures et couvrir l'ensemble de ces coûts, tels qu'ils seront constatés à la date d'adoption de ce nouvel arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 275655, la requête, enregistrée le 21 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le SYNDICAT FF2C COMBUSTIBLES et le SYNDICAT FF2C CHAUFFAGE, dont les sièges sont 114 avenue de Wagram, à Paris (75017) ; le SYNDICAT FF2C COMBUSTIBLES et autre demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et du ministre délégué à l'industrie du 12 novembre 2004 relatif aux prix de vente du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de distribution, en tant qu'il a limité la hausse de ce prix à 0,15 c€/kWh en moyenne à compter du 15 novembre 2004 ;

2°) d'enjoindre aux ministres compétents de prendre, dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, un nouvel arrêté fixant le prix du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de distribution à un niveau qui, conformément au II de l'article 7 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003, devra être défini en fonction des caractéristiques intrinsèques des fournitures et des coûts liés à ces fournitures et couvrir l'ensemble de ces coûts, tels qu'ils seront constatés à la date d'adoption de ce nouvel arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la note en délibéré présentée le 5 avril 2006 pour le SYNDICAT FF2C COMBUSTIBLES et autre ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la directive 2003/55/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 98/30/CE ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 ;

Vu le décret n° 90-1029 du 20 novembre 1990 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hugues Hourdin, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat du SYNDICAT FF2C COMBUSTIBLES et du SYNDICAT FF2C CHAUFFAGE,

- les conclusions de M. Stéphane Verclytte, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées, présentées par le SYNDICAT PROFESSIONNEL DES ENTREPRISES LOCALES GAZIERES, d'une part, et par le SYNDICAT FF2C COMBUSTIBLES et le SYNDICAT FF2C CHAUFFAGE, d'autre part, sont dirigées contre le même arrêté ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant que les syndicats requérants demandent l'annulation de l'arrêté du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et du ministre délégué à l'industrie, en date du 12 novembre 2004, relatif aux prix de vente du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de distribution, en tant qu'il a limité la hausse de ce prix à 0,15 c euros/kWh en moyenne à compter du 15 novembre 2004 ; qu'ils soutiennent que le tarif ainsi retenu n'a pas été fixé dans des conditions de transparence suffisante ; que ce tarif méconnaît, en outre, les dispositions légales qui imposent aux pouvoirs publics, dans l'exercice de leur compétence en matière de fixation de prix de vente du gaz en distribution publique, de tenir compte d'un certain nombre d'éléments relatifs au prix de revient de celui-ci et qu'au niveau où ce tarif a été fixé par l'arrêté attaqué, le prix retenu non seulement compromet la situation économique de chaque distributeur mais conduit également chacun de ceux-ci à pratiquer des prix de vente abusivement bas et les amène à porter atteinte, par ces conditions illégales de concurrence, à la situation des distributeurs de fioul ;

Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que la procédure à l'issue de laquelle l'arrêté attaqué a été pris ne respecterait pas l'obligation de transparence dans la fixation des tarifs imposée par le 1 de l'article 25 de la directive du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel doit être écarté, dès lors que cette obligation est satisfaite par la publication au Journal officiel de la République française de l'avis de la Commission de régulation de l'énergie sur le projet d'arrêté litigieux ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du II de l'article 7 de la loi du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie, dans sa rédaction issue de la loi du 9 août 2004 : Les tarifs de vente du gaz naturel aux clients non éligibles sont définis en fonction des caractéristiques intrinsèques des fournitures et des coûts liés à ces fournitures. Ils couvrent l'ensemble de ces coûts à l'exclusion de toute subvention en faveur des clients éligibles. (...) ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 20 novembre 1990 réglementant les prix du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de transport ou de distribution : Le prix du gaz combustible est déterminé et évolue, en moyenne pondérée, en tenant compte des variations :/ 1° Des coûts de construction, d'entretien et de renouvellement des installations de stockage, de transport et de distribution ;/ 2° Des coûts d'approvisionnement en gaz ;/ 3° Des coûts d'exploitation des équipements de stockage, de transport et de distribution ; qu'aux termes de l'article 5 du même décret : Le prix du gaz distribué peut varier, compte tenu des dispositions des articles 2, 3 et 4 ci-dessus, dans la limite des taux fixés, eu égard à l'évolution de la situation économique et des coûts, par arrêté du ministre chargé de l'économie ; qu'il résulte de ces dispositions que les tarifs de vente du gaz en distribution publique doivent être fixés par le ministre chargé de l'économie à un niveau égal ou supérieur, compte tenu du montant de l'abonnement payé par le consommateur, aux coûts complets moyens supportés, pour la fourniture de ce gaz, par chacun des distributeurs concernés ; qu'ils ne doivent pas permettre de subvention en faveur des clients éligibles ; que, dans les limites ainsi fixées par la loi du 3 janvier 2003, le ministre chargé de l'économie peut légalement, en application des dispositions combinées de l'article 7 de cette loi et de l'article 5 du décret du 20 novembre 1990, tenir compte de la situation économique générale, et plus particulièrement de celle des ménages, pour moduler l'évolution du prix de vente du gaz en distribution publique, sans être tenu de répercuter intégralement, dans les tarifs qu'il fixe, les variations, à la hausse ou à la baisse, des coûts complets moyens de fourniture du gaz ainsi distribué ;

Considérant, en troisième lieu, que les trois syndicats requérants soutiennent que les tarifs fixés par l'arrêté attaqué ne sont pas conformes aux dispositions de l'article L. 420-5 du code de commerce, qui prohibent les prix de vente abusivement bas ; que le SYNDICAT FF2C COMBUSTIBLES et le SYNDICAT FF2C CHAUFFAGE font valoir, en outre, que l'arrêté attaqué aurait pour effet, en raison d'une hausse insuffisante des tarifs du gaz en distribution publique, d'avantager certains distributeurs de gaz au détriment des distributeurs de fioul et méconnaîtrait ainsi les règles de concurrence rappelées par l'article 25 de la directive du 26 juin 2003, notamment la prohibition des abus de position dominante résultant des stipulations de l'article 82 du traité instituant la Communauté européenne ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 462-3 du code de commerce, le Conseil de la concurrence peut être consulté par les juridictions sur les pratiques anticoncurrentielles définies aux articles L. 420-1, L. 420-2 et L. 420-5 ainsi qu'aux articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne et relevées dans les affaires dont elles sont saisies... ; qu'en vertu de ces dispositions, le juge administratif peut, lorsqu'il doit apprécier la légalité d'un acte administratif en prenant en compte le droit de la concurrence, consulter le Conseil de la concurrence et lui demander des éléments d'appréciation ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions précitées du code de commerce et de demander au Conseil de la concurrence de lui fournir tous éléments nécessaires à l'appréciation des moyens ainsi soulevés, éléments comprenant en particulier la réponse à la question de savoir si, pour chaque distributeur concerné, les prix de vente du gaz en distribution publique résultant de l'arrêté attaqué sont au moins égaux, compte tenu du montant de l'abonnement payé par le consommateur, aux coûts complets moyens de fourniture du gaz ainsi distribué ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Avant dire droit sur les conclusions des requêtes du SYNDICAT PROFESSIONNEL DES ENTREPRISES LOCALES GAZIERES et du SYNDICAT FF2C COMBUSTIBLES et autre dirigées contre l'arrêté du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et du ministre délégué à l'industrie du 12 novembre 2004 relatif aux prix de vente du gaz combustible vendu à partir des réseaux publics de distribution, le Conseil de la concurrence sera invité, en se fondant notamment sur les informations que devront lui communiquer les distributeurs de gaz concernés, à fournir tous éléments d'appréciation susceptibles de permettre au Conseil d'Etat de déterminer, d'une part, si ledit arrêté a pour effet, en raison d'une hausse insuffisante des tarifs du gaz en distribution publique, d'avantager certains distributeurs de gaz au détriment des distributeurs de fioul et méconnaîtrait ainsi la prohibition des abus de position dominante résultant notamment des stipulations de l'article 82 du traité instituant la Communauté européenne et, d'autre part, si les tarifs fixés par l'arrêté attaqué sont conformes aux dispositions de l'article L. 420-5 du code de commerce. Le Conseil de la concurrence précisera, en particulier, le ou les marchés pertinents en ce qui concerne, d'une part, la vente de combustibles (gaz et fioul) et d'autre part, la fourniture de gaz en distribution publique. Il indiquera également, pour chaque distributeur concerné, si les prix de vente du gaz en distribution publique résultant de l'arrêté attaqué sont au moins égaux, compte tenu du montant de l'abonnement payé par le consommateur, aux coûts complets moyens de fourniture du gaz ainsi distribué.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT PROFESSIONNEL DES ENTREPRISES LOCALES GAZIERES, au SYNDICAT FF2C CHAUFFAGE, au SYNDICAT FF2C COMBUSTIBLES, au Conseil de la concurrence et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 275093
Date de la décision : 07/07/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2006, n° 275093
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Hugues Hourdin
Rapporteur public ?: M. Verclytte Stéphane

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:275093.20060707
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award