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07/07/2006 | FRANCE | N°282354

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 07 juillet 2006, 282354


Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SARL CLINTRIALS RESEARCH, dont le siège est 19, rue du 4 septembre à Paris (75002) ; la SARL CLINTRIALS RESEARCH, dénommée à compter du 1er juillet 2005 : la SARL CHARLES RIVER LABORATOIRES CLINICAL SERVICES demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, l'instruction administrative n° BODGI 3-E-1-83 du 7 février 1983 de la direction générale des impôts, reprise à la documentation administrative n° 3 E 2226, à jour au 2 novembre 1996, en tant qu'elle

interdit toute possibilité de récupération de la taxe sur la valeu...

Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SARL CLINTRIALS RESEARCH, dont le siège est 19, rue du 4 septembre à Paris (75002) ; la SARL CLINTRIALS RESEARCH, dénommée à compter du 1er juillet 2005 : la SARL CHARLES RIVER LABORATOIRES CLINICAL SERVICES demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, l'instruction administrative n° BODGI 3-E-1-83 du 7 février 1983 de la direction générale des impôts, reprise à la documentation administrative n° 3 E 2226, à jour au 2 novembre 1996, en tant qu'elle interdit toute possibilité de récupération de la taxe sur la valeur ajoutée indûment facturée à un assujetti étranger non établi en France ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Daumas, Auditeur,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE CHARLES RIVER LABORATOIRES CLINICAL SERVICES, entreprise de prestations de services dans le domaine de la santé sise à Paris, demande l'annulation de l'interprétation de la loi fiscale contenue dans l'instruction ministérielle n° 3 E-1-83 du 7 février 1983, publiée au Bulletin officiel de la direction générale des impôts, et reprise au troisième alinéa du point 10 de la documentation administrative de base référencée 3 E 2226, à jour au 2 novembre 1996, selon laquelle est interdite toute possibilité de récupération par l'émetteur de la facture de la taxe sur la valeur ajoutée indûment facturée à un assujetti étranger non établi en France ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des dispositions attaquées :

Considérant que le 3 de l'article 283 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur au 2 novembre 1996, dispose que : Toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture ou tout autre document en tenant lieu est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation ; que le V de l'article 271 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la même date, dispose que : Ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que s'ils étaient soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : / (...) d) Les opérations non imposables en France réalisées par des assujettis dans la mesure où elles ouvriraient droit à déduction si leur lieu d'imposition se situait en France. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités et les limites du remboursement de la taxe déductible au titre de ces opérations ; ce décret peut instituer des règles différentes suivant que les assujettis sont domiciliés ou établis dans les Etats membres de la Communauté européenne ou dans d'autres pays ; que le 1 de l'article 242-0 M de l'annexe II au code général des impôts, pris pour l'application de ces dernières dispositions, dispose que : Les assujettis établis à l'étranger peuvent obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée qui leur a été régulièrement facturée... ;

Considérant que l'instruction contestée prévoit que lorsque le client est un assujetti étranger non établi en France qui peut obtenir le remboursement de la taxe [sur la valeur ajoutée] en application des articles 242-0 M à 242-0 T de l'annexe II au code [général des impôts] (...), l'envoi d'une facture rectificative (...) n'est pas autorisé. En outre, les notes d'avoir éventuellement adressées à ces mêmes assujettis doivent préciser que les rabais, ristournes ou remises sont nets de taxe. Dans ces conditions, la personne qui a facturé la taxe à tort ou accordé une remise ne peut imputer ou demander la restitution de cette taxe ou de celle correspondant à la remise. En contrepartie, il est admis que la taxe dont s'agit soit remboursée à l'assujetti étranger (...) selon les modalités prévues aux articles 242-0 M à 242-0 T de l'annexe II au code général des impôts. Pour la même raison, le remboursement qui lui aurait déjà été éventuellement accordé dans ces conditions n'est pas remis en cause ; qu'en édictant ces dispositions, le ministre s'est borné à donner l'interprétation qu'appelaient les dispositions du 3 de l'article 283 du code général des impôts précité, dans le cas particulier où le client destinataire de factures incluant à tort un montant de taxe sur la valeur ajoutée est un assujetti étranger non établi en France qui peut obtenir le remboursement des crédits de taxe sur la valeur ajoutée correspondant ; qu'il n'a, par suite, pas fixé, ce faisant, de règle nouvelle entachée d'incompétence ;

Sur le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions attaquées avec le droit communautaire :

Considérant que l'article 21 de la directive du Conseil du 17 mai 1977 susvisée (ci-après la 6ème directive) prévoit que : La taxe sur la valeur ajoutée est due (...) en régime intérieur (...) par toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture ou tout document en tenant lieu ; qu'il résulte de ces dispositions, qui ne prévoient aucune possibilité de régularisation, interprétées au regard du principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée, qu'il appartient en principe aux Etats membres, compte tenu des objectifs d'exacte perception de la taxe et de lutte contre la fraude, de déterminer les conditions dans lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée indûment facturée peut être régularisée, pourvu que cette régularisation ne dépende pas du pouvoir d'appréciation discrétionnaire de l'administration fiscale ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les dispositions attaquées prévoient, lorsque des montants de taxe sur la valeur ajoutée ont été facturés à tort à des clients étrangers non établis en France, la possibilité pour ces derniers d'obtenir leur remboursement, assurant ainsi la neutralité de la taxe, et n'excluent toute régularisation par l'émetteur des factures erronées que lorsque le client peut faire jouer la possibilité d'obtenir le remboursement de la taxe indûment facturée ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que ces dispositions seraient incompatibles avec les objectifs de l'article 21 de la 6ème directive précitée, interprétés au regard du principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur le moyen tiré de la violation du principe d'égalité et de la non discrimination au regard du droit communautaire :

Considérant que ce moyen n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL CHARLES RIVER LABORATOIRES CLINICAL SERVICES n'est pas fondée à demander l'annulation de l'interprétation de la loi fiscale attaquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SARL CHARLES RIVER LABORATOIRES CLINICAL SERVICES est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SARL CHARLES RIVER LABORATOIRES CLINICAL SERVICES et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 07 jui. 2006, n° 282354
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: M. Vincent Daumas
Rapporteur public ?: M. Olléon

Origine de la décision
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Date de la décision : 07/07/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 282354
Numéro NOR : CETATEXT000008240162 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-07-07;282354 ?
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