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26/07/2006 | FRANCE | N°290951

France | France, Conseil d'État, 8eme et 3eme sous-sections reunies, 26 juillet 2006, 290951


Vu l'ordonnance du 28 décembre 2005 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête enregistrée le 7 mai 2002, par laquelle la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA dont le siège est ..., venant aux droits de la société Brasserie le Phénix demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 mars 2002 par lequel le tribunal administratif de Marseille, saisi par la ville de Marseille d'une question préjudicielle relative à l'interprétation d

'un arrêté préfectoral du 9 juillet 1922, posée par la cour d'app...

Vu l'ordonnance du 28 décembre 2005 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête enregistrée le 7 mai 2002, par laquelle la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA dont le siège est ..., venant aux droits de la société Brasserie le Phénix demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 12 mars 2002 par lequel le tribunal administratif de Marseille, saisi par la ville de Marseille d'une question préjudicielle relative à l'interprétation d'un arrêté préfectoral du 9 juillet 1922, posée par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a déclaré, d'une part, que la société requérante était propriétaire de l'ouvrage souterrain d'adduction d'eau dont la réalisation a été autorisée par l'arrêté susmentionné, d'autre part, que lui incombaient, en cette qualité, les obligations fixées par l'arrêté autorisant cet ouvrage ;

2°) de dire que la galerie est propriété de la ville de Marseille et que l'autorisation de voirie accordée à la société requérante par arrêté préfectoral du 9 juillet 1922 est devenue sans objet ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Eliane Chemla, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions de la société les Grands Moulins Maurel :

Considérant que, par sa requête dirigée contre le jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a déclaré la brasserie Heineken propriétaire de l'ouvrage souterrain d'adduction d'eau autorisé par l'arrêté préfectoral du 9 juillet 1922 et tenue sur le même fondement de diverses obligations, la société des Grands Moulins Maurel demande à être mise hors de cause ; que ces conclusions, qui ne sont pas dirigées contre le dispositif du jugement attaqué, lequel ne la met pas en cause, ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions de la société Heineken :

En tant que la requête est dirigée contre l'article 3 du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête ;

Considérant que si, saisi d'une question préjudicielle, le juge administratif est tenu de répondre à l'intégralité de la question posée, il est cependant tenu de refuser de se prononcer sur une question qui ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ; qu'il n'appartient qu'au juge judiciaire de se prononcer sur la propriété d'un bien, alors même que celle-ci résulterait d'un acte administratif ; que dès lors, c'est en méconnaissance de la compétence de la juridiction administrative que le tribunal administratif de Marseille a, par l'article 3 du jugement attaqué, statué sur la propriété de l'aqueduc construit sous le chemin communal n° 11, alors, d'ailleurs, que l'acte que la question préjudicielle qui lui était posée, lui demandait d'interpréter, était dépourvu de toute disposition relative à la propriété de cet aqueduc ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler l'article 3 de ce jugement et de rejeter les conclusions de la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA tendant à établir la propriété de l'aqueduc comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

En tant que la requête est dirigée contre l'article 4 du jugement attaqué :

Considérant que, par un arrêté du 9 juillet 1922, le préfet des Bouches-du-Rhône a donné à la société Brasserie le Phénix, aux droits de laquelle se présente la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA, une autorisation de voirie pour la réalisation d'un ouvrage souterrain d'adduction d'eau à l'aplomb et dans l'axe d'un chemin transféré en 1972 du département à la ville de Marseille ; que cet ouvrage, destiné à conduire l'eau des grottes Monnard, dont la pétitionnaire était propriétaire, jusqu'à son usine, a été également utilisé à partir de 1963 par la société les Grands Moulins Maurel ; que la ville de Marseille ayant voulu mettre à la charge des deux sociétés des travaux d'entretien et de réparation nécessités par l'état de la galerie, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a renvoyé les parties devant le juge administratif afin d'interpréter l'arrêté notamment quant à la nature précise et à l'existence actuelle des obligations mises par cet arrêté à la charge de la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA ; que la société fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille, saisi par la ville de Marseille, a répondu à ces questions ;

Considérant que la circonstance que la ville de Marseille ne demandait pas que l'obligation de payer un droit fût reconnu comme résultant de l'arrêté du 9 juillet 1922 du préfet des Bouches-du-Rhône, est sans incidence sur l'obligation faite au juge statuant sur renvoi préjudiciel de la juridiction judiciaire de répondre, sous la réserve mentionnée ci-dessus, intégralement aux questions posées par celle-ci, au nombre desquelles figurait l'énumération des obligations mises à la charge de la société requérante par l'arrêté préfectoral sus-mentionné ; qu'ainsi la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif, en rappelant qu'elle était tenue au paiement d'un droit de voirie, aurait entaché son jugement d'ultra petita ;

Considérant d'autre part que les seules circonstances que la société ait cessé d'utiliser la canalisation, objet de l'autorisation depuis 1978, et que la ville ait cessé de percevoir le droit de voirie, ne sont pas de nature à faire regarder l'arrêté sus-mentionné de 1922 comme ayant été implicitement abrogé, dès lors qu'une telle abrogation implicite ne pourrait résulter que d'une circonstance de droit à laquelle l'allégation de la volonté des parties ne saurait être assimilée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA n'est pas fondée à demander l'annulation de l'article 4 du jugement attaqué ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article susvisé font obstacle à ce que soient mise à la charge de la ville de Marseille la somme réclamée par la société les Grands Moulins Maurel au titre de cet article ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA la somme de 1 500 euros demandée par la ville de Marseille au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la société les Grands Moulins Maurel est rejetée.

Article 2 : L'article 3 du jugement du 12 mars 2002 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 3 : Le surplus de la requête de la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA est rejeté.

Article 4 : La SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA versera à la ville de Marseille la somme de 1 500 euros qu'elle demande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE BRASSERIE HEINEKEN SA, à la ville de Marseille, à la société les Grands Moulins Maurel et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

Une copie en sera adressée pour information au préfet des Bouches-du-Rhône.


Synthèse
Formation : 8eme et 3eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 290951
Date de la décision : 26/07/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Appréciation de la légalité

Publications
Proposition de citation : CE, 26 jui. 2006, n° 290951
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: Mme Eliane Chemla
Rapporteur public ?: M. Collin
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:290951.20060726
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