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04/08/2006 | FRANCE | N°272074

France | France, Conseil d'État, 3eme et 8eme sous-sections reunies, 04 août 2006, 272074


Vu, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 10 septembre 2004, l'ordonnance en date du 3 septembre 2004 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le dossier de la requête dont cette cour a été saisie par Mme Jeannine A ;

Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2004 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, et le mémoire complémentaire, enregistré le 29 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés p

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Vu, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 10 septembre 2004, l'ordonnance en date du 3 septembre 2004 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le dossier de la requête dont cette cour a été saisie par Mme Jeannine A ;

Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2004 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, et le mémoire complémentaire, enregistré le 29 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Jeannine A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 3 juin 2004 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 29 mars 2000 du garde des sceaux, ministre de la justice, notifiée par le directeur régional de l'administration pénitentiaire par courrier en date du 6 avril 2000, refusant de reconnaître imputable au service la maladie dont est décédé son mari, M. Stanislas Massimi et de réviser en conséquence le montant de sa pension de réversion ;

2°) statuant au fond, d'annuler la décision de refus du ministre de la justice du 29 mars 2000 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

Vu le décret n° 97-3 du 7 janvier 1997 portant déconcentration de la gestion de certains personnels relevant du ministère de la justice ;

Vu l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, du 15 janvier 1997 relatif à la déconcentration de la gestion de certains personnels relevant des services de l'administration pénitentiaire ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Pierre Balcou, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la liquidation de la pension de réversion notifiée le 12 mars 1996 à Mme A à la suite du décès, le 29 septembre 1995, de son époux, fonctionnaire de l'administration pénitentiaire, n'a pas tenu compte de la demande qu'elle avait formulée le 13 février 1996, tendant à ce que la maladie à l'origine du décès soit reconnue imputable au service ; qu'à l'invitation du directeur régional de l'administration pénitentiaire, Mme A a présenté une nouvelle demande, le 15 janvier 1997 ; qu'après un avis défavorable de la commission de réforme des Bouches-du-Rhône en date du 11 décembre 1998, le directeur régional de l'administration pénitentiaire lui a signifié, par courrier du 6 avril 2000, une décision de refus en date du 29 mars 2000 ; que Mme A se pourvoit en cassation contre le jugement du 3 juin 2004 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus ;

Considérant que, pour rejeter la demande de Mme A, le tribunal administratif a estimé que par les courriers en date des 12 janvier et 14 juin 1999, l'intéressée a entendu contester sa pension de réversion aux fins d'y ajouter une rente viagère d'invalidité (…) ; que ces demandes fondées sur une erreur de droit ont été présentées après l'expiration du délai d'un an prévu par les dispositions précitées de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite et sont, par suite, tardives ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la demande de Mme A tendant à ce que la maladie cause du décès de son mari soit reconnue imputable au service et par suite que lui soit octroyée la réversion d'une rente viagère d'invalidité, a été présentée le 15 janvier 1997 et que les courriers en date des 12 janvier et 14 juin 1999 mentionnés par le jugement attaqué émanaient non de l'intéressée mais de l'administration pénitentiaire ; qu'ainsi le tribunal administratif de Marseille s'est fondé sur des faits matériellement inexacts pour rejeter la demande de Mme A ; que le jugement du 3 juin 2004 doit par suite être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est fondé à soutenir ni que Mme A n'aurait pas sollicité de l'administration la révision de la pension qui lui avait été concédée, ni que la demande présentée devant la juridiction administrative était tardive en application de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Considérant qu'en vertu de l'article 12 du décret susvisé du 14 mars 1986, la commission de réforme comprend deux représentants du personnel élus par la commission administrative paritaire locale ; qu'il est constant qu'un seul de ces représentants a siégé à la séance du 11 décembre 1998, au cours de laquelle la commission de réforme des Bouches-du-Rhône a estimé que la maladie dont est décédé M. Massimi n'était pas imputable au service ; que l'allégation de Mme A selon laquelle cette circonstance tiendrait à ce qu'un seul représentant du personnel avait été désigné, et par suite convoqué, n'est pas contestée par l'administration ; que dans ces conditions, la consultation de la commission de réforme doit être regardée comme entachée d'une irrégularité substantielle ; que par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme A est fondée à demander l'annulation de la décision de refus attaquée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public …prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; que l'exécution de la présente décision, compte tenu de ses motifs, implique seulement que la commission départementale de réforme, régulièrement composée et convoquée, soit ressaisie de la demande de Mme A et qu'au vu de cet avis, l'autorité compétente y réponde par une nouvelle décision ; qu'il y a lieu, par suite, d'ordonner au directeur régional de l'administration pénitentiaire de Marseille de saisir à nouveau la commission de réforme des Bouches-du-Rhône dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la présente décision et de statuer dans un délai de deux mois à compter de son avis ; qu'en revanche, la présente décision ne statuant pas sur l'imputabilité au service de la maladie à l'origine du décès de M. Massimi, doivent être écartées les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de reconnaître cette imputabilité ;

Considérant qu'il y a lieu, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Mme A d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 3 juin 2004 est annulé.

Article 2 : La décision notifiée par le directeur régional de l'administration pénitentiaire le 6 avril 2000 est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au directeur régional de l'administration pénitentiaire de Marseille de saisir la commission départementale de réforme dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la présente décision et de statuer sur la demande dans un délai de deux mois à compter de son avis.

Article 4 : l'Etat versera à Mme A une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme Jeannine A, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 3eme et 8eme sous-sections reunies
Numéro d'arrêt : 272074
Date de la décision : 04/08/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 04 aoû. 2006, n° 272074
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Balcou
Rapporteur public ?: M. Séners
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:272074.20060804
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