Vu le recours DU MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, enregistré le 19 décembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 28 octobre 2003 en tant que, par les articles 1er et 2 dudit arrêt, la cour administrative d'appel de Douai, faisant partiellement droit à l'appel formé par Monsieur A...B...à l'encontre du jugement du 30 juin 1999 du tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988, 1989, 1990 et 1991, a reformé ledit jugement et déchargé l'intéressé de la pénalité pour abus de droit prévue à l'article 1729 du code général des impôts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yves Salesse, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Le Griel, avocat de M.B...,
- les conclusions de Mme Marie-Hélène Mitjavile, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...est associé-gérant de la SCI Alexis et PDG de la SA Finest ; que par bail du 18 janvier 1986, la première a loué à la seconde des bureaux dans un immeuble dont elle est propriétaire ; que selon l'administration fiscale, cette opération avait pour unique objectif de permettre à M. B...de déduire de ses revenus fonciers une part des déficits résultant des travaux effectués sur l'immeuble rénové pendant la courte période du bail litigieux ; que par notification de redressements du 20 novembre 1990 adressée à la société Alexis, l'administration a annulé le déficit foncier déclaré par elle ; que son imputation sur le revenu global de M. B..., au prorata de ses droits sociaux, au titre des années 1988 à 1991 a été en conséquence remise en cause ; que les impositions supplémentaires en résultant pour lui ont été assorties de l'intérêt de retard et de la majoration prévus à l'article l729 du code général des impôts en cas d'abus de droit ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40% si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80% s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L 64 du livre des procédures fiscales. (...)/ 3. En cas d'abus de droit, l'intérêt de retard et la majoration sont à la charge de toutes les parties à l'acte ou à la convention qui sont solidairement tenues à leur paiement " ; qu'aux termes de l'article L 64 du livre des procédures fiscales : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : / a) qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement ou à une taxe de publicité foncière moins élevés ; / b) ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; /c) ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention ; (...) " ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'abus de droit a pour origine un acte ou une convention et que l'intérêt de retard et la majoration prévus par l'article 1729 du code général des impôts sont à la charge du contribuable s'il s'est rendu coupable d'abus de droit en étant partie à cet acte ou convention ; qu'en jugeant que l'administration ne pouvait mettre la majoration pour abus de droit prévue par ledit article à la charge de M. B...qui n'était pas partie au bail litigieux, la cour administrative d'appel de Douai n'a pas commis d'erreur de droit ; qu'ainsi le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande M. B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 3000 euros à M. B...au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à M. A...B....