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23/08/2006 | FRANCE | N°289727

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 23 août 2006, 289727


Vu 1°), sous le n° 289727, la requête, enregistrée le 1er février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Michèle B, demeurant ...; Mme B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 janvier 2006 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a, à la demande de Mme A, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 6 novembre 2005 pour l'élection d'un conseiller municipal dans la commune de Villeneuve-lès-Béziers (Hérault) ;

2°) de rejeter les conclusions aux fins d'annulation présentées par

Mme A devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge...

Vu 1°), sous le n° 289727, la requête, enregistrée le 1er février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Michèle B, demeurant ...; Mme B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 janvier 2006 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a, à la demande de Mme A, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 6 novembre 2005 pour l'élection d'un conseiller municipal dans la commune de Villeneuve-lès-Béziers (Hérault) ;

2°) de rejeter les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme A devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 289752, la requête, enregistrée le 1er février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE DE VILLENEUVE-LES-BEZIERS, représentée par son maire ; la COMMUNE DE VILLENEUVE-LES-BEZIERS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 janvier 2006 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a, à la demande de Mme A, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 6 novembre 2005 pour l'élection d'un conseiller municipal dans la commune de Villeneuve-lès-Béziers (Hérault) ;

2°) de rejeter les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme A devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu 3°), sous le n° 290060, la requête, enregistrée le 9 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'HERAULT ; le PREFET DE L'HERAULT demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 10 janvier 2006 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a, à la demande de Mme A, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 6 novembre 2005 pour l'élection d'un conseiller municipal dans la commune de Villeneuve-lès-Béziers (Hérault) ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la note en délibéré présentée le 10 juillet 2006 par Mme A ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code électoral ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Dandelot, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de Mme B, de la COMMUNE DE VILLENEUVE-LES-BEZIERS et du PREFET DE L'HERAULT sont dirigées contre un même jugement du tribunal administratif de Montpellier et présentent à juger les mêmes questions relatives aux opérations électorales qui se sont déroulées le 6 novembre 2005 à Villeneuve-lès-Béziers ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur les conclusions des requérants dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a annulé les opérations électorales du 6 novembre 2005 :

Considérant qu'en vertu de l'article L. 2122-14 du code général des collectivités territoriales, pour procéder au remplacement du maire, lorsque celui-ci a cessé ses fonctions pour toute cause, le conseil municipal doit être au complet ; que, dans l'hypothèse où le conseil municipal doit être complété à cette fin, dans les communes dont la population est supérieure ou égale à 3 500 habitants, visées à l'article L. 260 du code électoral, dont les conseils municipaux sont élus au scrutin de liste, il est procédé au remplacement selon les règles édictées à l'article L. 270 du même code, par appel du candidat venant immédiatement sur la liste après le dernier élu, et lorsque ces dispositions ne peuvent plus être appliquées, il est procédé au renouvellement intégral du conseil municipal ; qu'en revanche, dans les communes de moins de 3 500 habitants, visées à l'article L. 252 du même code, dont les conseils municipaux sont élus au scrutin majoritaire, l'article L. 2122-14 du code général des collectivités territoriales prévoit qu'il est procédé à des élections complémentaires dans la quinzaine de la vacance ;

Considérant que si l'article R. 2151-3 du code général des collectivités territoriales dispose que le chiffre de population auquel il convient de se référer en matière électorale est le dernier chiffre de population municipale authentifié avant l'élection, et si l'article R. 2121-3 déroge à cette règle en cas d'élection complémentaire dans une commune de moins de 3 500 habitants, il résulte de l'ensemble des dispositions rappelées ci-dessus que le législateur a entendu, quelle que soit la taille de la commune, maintenir, en cas de nécessité de compléter le conseil municipal, la continuité du régime électoral depuis le dernier renouvellement intégral de ce conseil ; qu'il suit de là que, dans le cas où il y a lieu de compléter le conseil municipal en vue de l'élection du maire, dans une commune dont le conseil municipal avait été élu selon l'article L. 252 du code électoral, il y a lieu à une élection complémentaire selon le même mode de scrutin que lors du dernier renouvellement intégral du conseil municipal, même si la population de la commune a dépassé le seuil de 3 500 habitants depuis le dernier renouvellement intégral ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le conseil municipal de Villeneuve-les-Béziers a fait l'objet d'un renouvellement intégral lors des élections municipales de 2001, selon le mode de scrutin prévu à l'article L. 252 du code électoral, le chiffre de la population résultant du dernier recensement étant alors de 3 495 habitants ; qu'à la suite du décès du maire survenu le 15 septembre 2005, il était nécessaire, pour élire un nouveau maire, de compléter le conseil municipal ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, bien que la population communale résultant du recensement complémentaire de 2004 soit devenue supérieure à 3 500 habitants, il y avait lieu de procéder, non au renouvellement intégral du conseil municipal, mais à une élection complémentaire d'un conseiller pour combler la vacance existante ; que Mme B, la COMMUNE DE VILLENEUVE-LES-BEZIERS et le PREFET DE L'HERAULT sont donc fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé les opérations électorales au motif qu'il convenait de procéder à un renouvellement intégral du conseil municipal ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des griefs soulevés par Mme A dans sa protestation introduite devant le juge administratif ;

Considérant que la circonstance que Mme B se soit prévalue, lors de la campagne, de son époux décédé et des réalisations auxquelles il avait contribué en tant que maire, ne saurait être regardée comme une manoeuvre de nature à tromper les électeurs ;

Considérant qu'il résulte du procès-verbal des bureaux de vote n° 1 et n° 3 que les opérations électorales ont été ouvertes à 8 heures ; qu'il n'est pas établi que la mise à l'heure de la pendule ait constitué une manoeuvre ; qu'à supposer même que l'ouverture des bureaux n'ait pas donné lieu à une constatation officielle, cette circonstance ne serait pas de nature à altérer la sincérité du scrutin ; qu'il en est de même des griefs tirés de ce que les assesseurs n'auraient pas été consultés pour désigner le secrétaire du bureau et de ce que la répartition des tâches entre les assesseurs n'aurait pas été annoncée ; que la circonstance, à la supposer établie, que des employés de mairie aient tenu la liste d'émargement à certains moments de la journée, dans le bureau de vote n° 1, n'a pas, en l'espèce, constitué une irrégularité de nature à altérer les résultats du scrutin ; que le grief tiré de ce que certains textes relatifs aux procédures électorales n'auraient pas été mis à disposition du bureau de vote manque en fait ; que, si les assesseurs du bureau de vote n° 3 n'ont pas été présents pendant tout le déroulement des opérations électorales, il résulte de l'instruction qu'en l'absence de toute fraude ou manoeuvre, cette irrégularité n'a pas altéré les résultats du scrutin ; que, si le président du bureau de vote n° 3 a mis lui-même dans l'urne l'enveloppe d'un électeur, pour éviter qu'il commette une erreur, cette irrégularité portant sur un seul bulletin ne saurait avoir altéré les résultats du scrutin, qui a vu Mme B élue avec plus de 69 % des suffrages exprimés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé les opérations électorales du 6 novembre 2005 à Villeneuve-lès-Béziers ;

Sur les conclusions incidentes présentées devant le Conseil d'Etat par Mme A dirigées contre le jugement du tribunal administratif en tant qu'il a rejeté ses conclusions contre l'arrêté du sous-préfet de Béziers du 29 septembre 2005 convoquant les électeurs et contre la convocation du conseil municipal au 14 novembre 2005 :

Considérant d'une part que, si l'acte convoquant les électeurs à un scrutin est susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, un tel recours est dépourvu d'objet postérieurement à la date du scrutin , que c'est donc à bon droit, en tout état de cause, que le tribunal administratif a rejeté comme dépourvues d'objet les conclusions de Mme A contre l'arrêté du 29 septembre 2005 du sous-préfet de Béziers convoquant les électeurs, présentées devant le tribunal administratif de Montpellier le 11 novembre 2005 ;

Considérant d'autre part que si l'irrégularité des conditions dans lesquelles a été convoqué le conseil municipal peut être invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre la délibération du conseil municipal, la convocation ne constitue pas une décision susceptible d'être déférée au juge administratif ; que Mme A n'est, dès lors et en tout état de cause, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a déclaré irrecevables ses conclusions dirigées contre la lettre par laquelle le maire par intérim de Villeneuve-les-Béziers a convoqué le conseil municipal en vue d'une réunion fixée au 14 novembre 2005 pour procéder à l'élection du nouveau maire ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à ces conclusions ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 10 janvier 2006 est annulé.

Article 2 : La protestation présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Montpellier et ses conclusions incidentes devant le Conseil d'Etat sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme B et la COMMUNE DE VILLENEUVE-LES-BEZIERS au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Michèle B, à la COMMUNE DE VILLENEUVE-LES-BEZIERS, au PREFET DE L'HERAULT, à Mme Danièle A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 289727
Date de la décision : 23/08/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

28-04 ÉLECTIONS ET RÉFÉRENDUM. ÉLECTIONS MUNICIPALES. - COMMUNE DONT LA POPULATION A FRANCHI LE SEUIL DES 3 500 HABITANTS EN COURS DE MANDATURE - COMBLEMENT D'UNE VACANCE AU CONSEIL MUNICIPAL - PRINCIPE - CONTINUITÉ DU RÉGIME ÉLECTORAL DEPUIS LE DERNIER RENOUVELLEMENT INTÉGRAL DU CONSEIL.

28-04 Si l'article R. 2151-3 du code général des collectivités territoriales dispose que le chiffre de population auquel il convient de se référer en matière électorale est le dernier chiffre de population municipale authentifié avant l'élection, et si l'article R. 2121-3 déroge à cette règle en cas d'élection complémentaire dans une commune de moins de 3 500 habitants, il résulte des articles L. 252, L. 260 et L. 270 du code électoral ainsi que de l'article L. 2122-14 du code général des collectivités territoriales que le législateur a entendu, quelle que soit la taille de la commune, maintenir, en cas de nécessité de compléter le conseil municipal, la continuité du régime électoral depuis le dernier renouvellement intégral de ce conseil. Il suit de là que, dans le cas où il y a lieu de compléter le conseil municipal en vue de l'élection du maire, dans une commune dont le conseil municipal avait été élu selon l'article L. 252 du code électoral, c'est-à-dire au scrutin majoritaire, il y a lieu à une élection complémentaire selon le même mode de scrutin que lors du dernier renouvellement intégral du conseil municipal, même si la population de la commune a dépassé le seuil de 3 500 habitants depuis le dernier renouvellement intégral.


Publications
Proposition de citation : CE, 23 aoû. 2006, n° 289727
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Marc Dandelot
Rapporteur public ?: M. Keller

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:289727.20060823
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