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02/10/2006 | FRANCE | N°281286

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 02 octobre 2006, 281286


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 2 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION ACOONEX, dont le siège est 25, rue Saulnier à Paris (75009) ; l'ASSOCIATION ACOONEX demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 30 mars 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 3 mai 2001 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin et 2 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION ACOONEX, dont le siège est 25, rue Saulnier à Paris (75009) ; l'ASSOCIATION ACOONEX demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 30 mars 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 3 mai 2001 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre respectivement des années 1986, 1987 et 1988 et de la période du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1988, d'autre part, à ce que soit prononcée la décharge de ces impositions ;

2°) statuant au fond, de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Daumas, Auditeur,

- les observations de Me Blanc, avocat de l'ASSOCIATION ACOONEX,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'ASSOCIATION ACOONEX, dont l'objet est l'assistance juridique aux personnes faisant l'objet d'une expropriation, a été soumise à une vérification de comptabilité à la suite de laquelle des suppléments d'impôt sur les sociétés et des compléments de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à sa charge au motif qu'elle exerçait une activité lucrative ; que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires, par un jugement du 3 mai 2001 ; que la cour administrative d'appel de Paris a confirmé ce jugement par un arrêt du 30 mars 2005 contre lequel l'ASSOCIATION ACOONEX se pourvoit en cassation ;

Considérant, en premier lieu, que si l'association requérante soutient que la demande de transmission de ses déclarations fiscales de résultats et de chiffres d'affaires constituait une poursuite de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet au-delà du délai de trois mois prévu par l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, les mises en demeure de produire ces déclarations sont intervenues au cours de la procédure de taxation d'office pour défaut ou retard dans le dépôt des déclarations, prévue à l'article L. 66 du livre des procédures fiscales qui est indépendante de la procédure de vérification de comptabilité ; qu'ainsi, ces mises en demeure, qui n'ont d'autre objet que d'inviter le contribuable à régulariser sa situation, ne sauraient avoir pour effet de prolonger une vérification de comptabilité ; que par suite, c'est sans erreur de droit que la cour a jugé qu'elles ne pouvaient être regardées comme révélant une poursuite de la vérification de comptabilité ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts : Sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet (...) toutes (...) personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif ; qu'aux termes de l'article 261 du même code : Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : / (...) b Les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des oeuvres sans but lucratif qui présentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l'autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales, en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient / (...) d Le caractère désintéressé de la gestion résulte de la réunion des conditions ci-après : / - l'organisme doit être géré et administré à titre bénévole par des personnes n'ayant elles-mêmes, ou par personne interposée, aucun intérêt direct ou indirect dans les résultats de l'exploitation ; / - l'organisme ne doit procéder à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfice, sous quelque forme que ce soit ; / - les membres de l'organisme et leurs ayants droit ne doivent pas pouvoir être déclarés attributaires d'une part quelconque de l'actif, sous réserve du droit de reprise des apports... ; que pour l'application de ces dispositions, les associations ne sont exclues du champ de l'impôt sur les sociétés et exonérées de taxe sur la valeur ajoutée que si, d'une part, leur gestion présente un caractère désintéressé, et, d'autre part, les services qu'elles rendent ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ; que, toutefois, même dans le cas où l'association intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, elle reste exclue du champ de l'impôt sur les sociétés et continue de bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et à tout le moins des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'elle offre ;

Considérant que le versement de rémunérations aux dirigeants d'une association ne fait pas obstacle en soi au caractère désintéressé de sa gestion ; que toutefois, les rémunérations versées doivent être proportionnées aux ressources de l'association et constituer la contrepartie des sujétions effectivement imposées à ses dirigeants dans l'exercice de leur mandat ;

Considérant que pour écarter le caractère non-lucratif de l'activité de l'association, la cour s'est fondée sur la seule circonstance que sa gestion ne présentait pas un caractère désintéressé, en relevant que des prélèvements sans contrepartie avaient été effectués sur ses recettes durant les années 1986 à 1988 par la présidente de l'association et son époux ; que, si la requérante fait valoir, d'une part, le faible montant des prélèvements en cause, soit 35 771 F (5 453,25 euros) en 1986, 45 830 F (6 986,74 euros) en 1987 et 138 300 F (21 083,70 euros) en 1988, celui-ci doit être apprécié au regard des recettes de l'association, qui se sont établies pour ces trois années, respectivement, à 136 416 F (20 796,49 euros), 314 782 F (47 988,21 euros) et 287 700 F (43 859,58 euros) ; que si elle soutient, d'autre part, que les sommes prélevées au titre des années 1986 et 1987 correspondaient à de simples défraiements, elle n'établit ni même n'allègue que ceux-ci constituaient la contrepartie d'un travail effectif ou le remboursement de frais engagés ; qu'enfin, s'agissant des sommes prélevées au titre de l'année 1988, la requérante ne peut en tout état de cause utilement se prévaloir, dès lors que ce moyen est nouveau en cassation, de ce que l'administration aurait formellement pris position, au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, sur la nature de charge, pour l'association, des loyers versés auxquels elles correspondraient ; qu'ainsi, eu égard aux ressources de l'association et à l'absence de contrepartie des prélèvements effectués, la cour a pu, sans insuffisance de motivation ni erreur de qualification juridique, déduire de ces faits souverainement appréciés et au demeurant non contestés, que l'association avait consenti à ses dirigeants des avantages matériels directs et indirects dont le montant faisait obstacle à la reconnaissance du caractère désintéressé de sa gestion ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ASSOCIATION ACOONEX n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION ACOONEX est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION ACOONEX et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 281286
Date de la décision : 02/10/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 02 oct. 2006, n° 281286
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: M. Vincent Daumas
Rapporteur public ?: M. Collin
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:281286.20061002
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