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12/10/2006 | FRANCE | N°287489

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 12 octobre 2006, 287489


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 novembre 2005 et 17 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC, dont le siège social est avenue de la Patrouille de France, B.P. 627 Le Havre (76059 Cedex), venant aux droits de la société Remy Equipement ; la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 28 juillet 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 6 mai 2004 du tribu

nal administratif d'Orléans qui a annulé la décision du 1er février 2...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 novembre 2005 et 17 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC, dont le siège social est avenue de la Patrouille de France, B.P. 627 Le Havre (76059 Cedex), venant aux droits de la société Remy Equipement ; la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 28 juillet 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 6 mai 2004 du tribunal administratif d'Orléans qui a annulé la décision du 1er février 2002 de l'inspecteur du travail de la section de la vallée de l'Eure autorisant le licenciement pour motif économique de M. Celso A ;

2°) de mettre à la charge de M. A la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassagnabère, Auditeur,

- les observations de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC,

- les conclusions de M. Yves Struillou, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que, pour rejeter la requête de la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC, venant aux droits de la société Remy Equipement, dirigée contre le jugement du tribunal administratif d'Orléans ayant annulé l'autorisation de licencier pour motif économique M. A, salarié protégé employé de l'établissement de Dreux de la société Remy Equipement, la cour administrative d'appel de Nantes a retenu l'incompétence territoriale de l'inspecteur du travail de la vallée de l'Eure pour statuer sur la demande de l'employeur, en se fondant sur la circonstance qu'à la date de cette demande, l'établissement de Dreux ne faisait plus l'objet d'une gestion autonome ;

Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les établissements de Dreux et d'Octeville de la société Remy Equipement avaient été reconnus comme des établissements distincts, par un accord passé le 24 juillet 2001 entre le chef d'entreprise et les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise instituant un comité central d'entreprise ; qu'à la date à laquelle la société a saisi l'inspecteur du travail, l'établissement de Dreux n'avait pas perdu sa qualité d'établissement distinct institué dans les formes prévues par le quatrième alinéa de l'article L. 435-4 du code du travail ; qu'ainsi, cet établissement, quelles que fussent ses modalités de gestion, ressortissait à la compétence de l'inspecteur du travail dont relève le site de Dreux, c'est-à-dire l'inspecteur du travail de la section de la vallée de l'Eure ; que, par suite, en jugeant que ce dernier n'était pas territorialement compétent pour statuer sur la demande de la société Remy Equipement, la cour administrative d'appel de Nantes a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC est donc fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 436-1 du code du travail relatives aux conditions de licenciement des membres titulaires ou suppléants du comité d'entreprise, les salariés légalement investis des fonctions de membre du comité d'entreprise bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ;

Considérant que le motif économique invoqué par la société Remy Equipement, pour justifier le licenciement de M. A, était le refus de ce dernier d'accepter la proposition de transfert sur le site d'Octeville, faite à tout le personnel du site de Dreux, dans le cadre d'un plan social accompagnant au second semestre 2001 la fermeture du site de Dreux ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier que ce plan social ne comprenait aucune proposition de reclassement individualisée, ainsi d'ailleurs qu'il en a été jugé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 3 mars 2005, devenu irrévocable à la suite du rejet du pourvoi en cassation dont il a fait l'objet ; qu'à supposer même, comme le soutient la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC, qu'un plan social n'eût pas été légalement nécessaire, cette circonstance n'aurait pas dispensé l'employeur de rechercher les possibilités de reclassement de M. A au sein du groupe, qui disposait de nombreuses autres implantations en France et à l'étranger ; qu'il est constant que l'employeur s'en est abstenu, et que l'inspecteur du travail a fondé exclusivement sa décision sur le refus de M. A d'accepter la proposition de transfert à Octeville, laquelle, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ne constituait pas une proposition réelle de reclassement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 1er février 2002 autorisant le licenciement de M. A ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC au titre des frais exposés par elle en cassation et en appel et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC la somme de 2 000 euros demandée au même titre par M. A en appel ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 28 juillet 2005 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC devant la cour administrative d'appel de Nantes et le surplus de ses conclusions devant le Conseil d'Etat sont rejetés.

Article 3 : La SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC versera à M. A une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SIDEL FILLING ASEPTIC, à M. Celso A et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 287489
Date de la décision : 12/10/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - INSTITUTIONS DU TRAVAIL - ADMINISTRATION DU TRAVAIL - INSPECTION DU TRAVAIL - COMPÉTENCE TERRITORIALE DES INSPECTEURS DU TRAVAIL - CAS DES ÉTABLISSEMENTS DISTINCTS RECONNUS COMME TELS PAR UN ACCORD D'ENTREPRISE - INSPECTEUR TERRITORIALEMENT COMPÉTENT AU TITRE DU SITE D'IMPLANTATION DE L'ÉTABLISSEMENT - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE - MODALITÉS DE GESTION TENDANT À DÉMONTRER QUE L'ÉTABLISSEMENT N'EST PAS DISTINCT.

66-01-01-02 Un établissement s'était vu reconnaître le caractère d'établissement distinct par un accord passé entre le chef d'entreprise et les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise, instituant un comité central d'entreprise. Dès lors qu'il n'avait pas perdu sa qualité d'établissement distinct institué dans les formes prévues par le quatrième alinéa de l'article L. 435-4 du code du travail, cet établissement, quelles que fussent ses modalités de gestion, ressortissait à la compétence de l'inspecteur du travail territorialement compétent au titre de son site d'implantation.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIÉS PROTÉGÉS - MODALITÉS DE DÉLIVRANCE OU DE REFUS DE L'AUTORISATION - AUTORITÉ COMPÉTENTE - COMPÉTENCE TERRITORIALE DE L'INSPECTEUR DU TRAVAIL DANS LE RESSORT DUQUEL EST SITUÉ UN ÉTABLISSEMENT DISTINCT RECONNU COMME TEL PAR UN ACCORD D'ENTREPRISE - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE - MODALITÉS DE GESTION TENDANT À DÉMONTRER QUE L'ÉTABLISSEMENT N'EST PAS DISTINCT.

66-07-01-03-01 Un établissement s'était vu reconnaître le caractère d'établissement distinct par un accord passé entre le chef d'entreprise et les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise, instituant un comité central d'entreprise. Dès lors qu'il n'avait pas perdu sa qualité d'établissement distinct institué dans les formes prévues par le quatrième alinéa de l'article L. 435-4 du code du travail, cet établissement, quelles que fussent ses modalités de gestion, ressortissait à la compétence de l'inspecteur du travail territorialement compétent au titre de son site d'implantation.


Publications
Proposition de citation : CE, 12 oct. 2006, n° 287489
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: M. Hervé Cassagnabère
Rapporteur public ?: M. Struillou
Avocat(s) : SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:287489.20061012
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