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15/11/2006 | FRANCE | N°280424

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 15 novembre 2006, 280424


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 mai et 14 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Marie-Claude A, demeurant ...; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret du 3 mars 2005 par lequel le Président de la République a prononcé sa radiation des cadres de la magistrature ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 d

u 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

Vu l...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 mai et 14 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Marie-Claude A, demeurant ...; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret du 3 mars 2005 par lequel le Président de la République a prononcé sa radiation des cadres de la magistrature ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Henrard, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Gaschignard, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme A, nommée substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Béthune par décret du 3 janvier 2003 du Président de la République, n'a pas rejoint son poste et a été radiée des cadres de la magistrature par un décret du 3 mars 2005 dont elle demande l'annulation ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, applicable aux mises en demeure prises dans le cadre d'une procédure d'abandon de poste, « toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'installée par écrit, le 15 juillet 2003, dans son poste de substitut de procureur de la République près le tribunal de grande instance de Béthune, la requérante a été, le 13 août 2003, mise en demeure de rejoindre son affectation au plus tard le 22 septembre 2003 et avertie que, faute pour elle de déférer à cette injonction, elle s'exposerait à l'engagement d'une procédure d'abandon de poste ; que ce courrier précisait également que le magistrat qui abandonne son poste rompt le lien qui l'unit à l'administration, ce qui emporte la suppression des garanties disciplinaires et autorise l'autorité compétente à le radier des cadres sans l'accomplissement des formalités qui s'imposent en matière disciplinaire ; que, toutefois, ni la signature, illisible, ni aucune autre mention figurant sur cette mise en demeure, ne permettaient d'en identifier l'auteur et la qualité de celui-ci, en méconnaissance des exigences, rappelées plus haut, du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ; qu'ainsi, Mme A est fondée à soutenir que la mesure de radiation contestée a été prise sur une procédure irrégulière et à en demander l'annulation pour excès de pouvoir ; qu'il y a également lieu, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge l'Etat le paiement à Mme A de la somme de 3 000 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ; que les dispositions de cet article font, en revanche, obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas, dans la présente affaire, la partie perdante, la somme que le garde des sceaux, ministre de la justice demande au titre des frais exposés par l'Etat ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le décret du 3 mars 2005 du Président de la République est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à Mme A la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions du garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Marie-Claude A, au Premier ministre et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 280424
Date de la décision : 15/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCÉDURE - QUESTIONS GÉNÉRALES - OBLIGATION DE SIGNATURE ET DE MENTION DES PRÉNOM - NOM ET QUALITÉ DE L'AUTEUR DE LA DÉCISION (ART - 4 DE LA LOI DU 12 AVRIL 2000) - CHAMP D'APPLICATION - INCLUSION - MISE EN DEMEURE PRÉALABLE À UNE RADIATION DES CADRES POUR ABANDON DE POSTE.

01-03-01 La mise en demeure préalable à une décision de radiation des cadres d'un agent public pour abandon de poste doit respecter les prescriptions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CESSATION DE FONCTIONS - ABANDON DE POSTE - RADIATION DES CADRES - GARANTIES - INCLUSION - FORMES DE LA MISE EN DEMEURE - OBLIGATION DE SIGNATURE ET DE MENTION DES PRÉNOM - NOM ET QUALITÉ DE L'AUTEUR DE LA DÉCISION (ART - 4 DE LA LOI DU 12 AVRIL 2000).

36-10-04 La mise en demeure préalable à une décision de radiation des cadres d'un agent public pour abandon de poste doit respecter les prescriptions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration.

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - MAGISTRATS ET AUXILIAIRES DE LA JUSTICE - MAGISTRATS DE L'ORDRE JUDICIAIRE - CESSATION DE FONCTIONS - ABANDON DE POSTE - RADIATION DES CADRES - GARANTIES - INCLUSION - FORMES DE LA MISE EN DEMEURE - OBLIGATION DE SIGNATURE ET DE MENTION DES PRÉNOM - NOM ET QUALITÉ DE L'AUTEUR DE LA DÉCISION (ART - 4 DE LA LOI DU 12 AVRIL 2000).

37-04-02-03 La mise en demeure préalable à une décision de radiation des cadres d'un magistrat pour abandon de poste doit respecter les prescriptions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 nov. 2006, n° 280424
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Stéphane Hoynck
Rapporteur public ?: M. Guyomar
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:280424.20061115
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