La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/11/2006 | FRANCE | N°282374

France | France, Conseil d'État, 4eme sous-section jugeant seule, 24 novembre 2006, 282374


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet et 12 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL NOVITEC, dont le siège social est situé 2, boulevard du 11 novembre à Villeurbanne (69616), représentée par son dirigeant en exercice ; la SARL NOVITEC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 12 mai 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé la dé

cision du 23 octobre 2002 de l'inspecteur du travail l'autorisant à licen...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet et 12 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL NOVITEC, dont le siège social est situé 2, boulevard du 11 novembre à Villeurbanne (69616), représentée par son dirigeant en exercice ; la SARL NOVITEC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 12 mai 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 23 octobre 2002 de l'inspecteur du travail l'autorisant à licencier M. Lionel A ainsi que la décision du ministre chargé du travail confirmant cette autorisation ;

2°) de mettre à la charge de M. A la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre-Antoine Molina, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SARL NOVITEC et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des articles L. 425-1 et L. 436-1 du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

Considérant que, pour rejeter la requête de la SARL NOVITEC tendant à l'annulation du jugement du 4 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision du 23 octobre 2002 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de M. A, salarié protégé, la cour administrative d'appel de Douai a estimé que la faute reprochée au salarié n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A qui exerçait les fonctions de formateur au sein de la SARL NOVITEC, spécialisée dans la formation professionnelle, a, au cours d'un séminaire, tenu, à l'égard d'une jeune stagiaire, des propos à connotation sexuelle, grossiers et dégradants ; que ce comportement fautif, aggravé par les responsabilités qu'assumait M. A, était en outre susceptible de porter préjudice à la bonne réputation de l'entreprise ; que, dans ces conditions, en jugeant que la faute commise par M. A n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce, qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens s'est fondé, pour annuler la décision autorisant le licenciement de M. A, sur le motif tiré de ce que les faits reprochés au salarié ne constituaient pas une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par M. A devant le tribunal administratif d'Amiens ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 436 ;4 du code du travail : L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été entendu par l'inspecteur du travail qui lui a fait connaître les déclarations le mettant en cause ; que, si M. A invoque l'absence de confrontation avec les témoins, cette circonstance n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que l'inspecteur du travail aurait méconnu les dispositions précitées doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL NOVITEC est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a annulé la décision de l'inspecteur du travail de Compiègne du 23 octobre 2002 ainsi que la décision du ministre du travail du 24 avril 2003 autorisant le licenciement de M. A ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A la somme de 3 000 euros demandée par la SARL NOVITEC au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL NOVITEC, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. A au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 12 mai 2005 de la cour administrative d'appel de Douai et le jugement du 4 décembre 2003 du tribunal administratif d'Amiens sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif d'Amiens et ses conclusions devant le Conseil d'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : M. A versera à la SARL NOVITEC la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SARL NOVITEC, à M. Lionel A et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.


Synthèse
Formation : 4eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 282374
Date de la décision : 24/11/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 24 nov. 2006, n° 282374
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Silicani
Rapporteur ?: M. Pierre-Antoine Molina
Rapporteur public ?: M. Keller
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:282374.20061124
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award