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24/11/2006 | FRANCE | N°291613

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 24 novembre 2006, 291613


Vu le recours, enregistré le 23 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 7 mars 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a suspendu l'exécution de l'arrêté du préfet du Var du 16 décembre 2005 refusant d'accorder à la Société immobilière du Tanneron l'autorisation de défricher des parcelles sur le territoire de la commune de Tanneron (Var) ;

2°) statuant

au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter la demande de suspensio...

Vu le recours, enregistré le 23 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 7 mars 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a suspendu l'exécution de l'arrêté du préfet du Var du 16 décembre 2005 refusant d'accorder à la Société immobilière du Tanneron l'autorisation de défricher des parcelles sur le territoire de la commune de Tanneron (Var) ;

2°) statuant au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter la demande de suspension présentée par la Société immobilière du Tanneron devant le tribunal administratif de Nice ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code forestier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Damien Botteghi, Auditeur,

- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de la SCI du Tanneron,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces soumises au juge des référés que la Société immobilière du Tanneron, désignée en 1988 par une convention d'aménagement et d'équipement pour réaliser une zone d'aménagement concerté à usage principal d'habitation dans une zone boisée et non urbanisée située sur la commune de Tanneron (Var), a déposé le 26 avril 2005, en application de l'article L. 311-1 du code forestier, une demande d'autorisation de défricher certaines parcelles de la zone ; qu'après avoir averti la société pétitionnaire par courrier du 21 juin 2005 qu'une reconnaissance des lieux serait nécessaire, le préfet du Var a pris le 16 décembre 2005 un arrêté de refus d'autorisation de défricher ; qu'à la demande de la requérante, le juge des référés a suspendu cette décision, par une ordonnance du 7 mars 2006 contre laquelle le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE se pourvoit en cassation ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;

Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; qu'il lui appartient également, l'urgence s'appréciant objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce, de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l'argumentation des parties, l'ont conduit à estimer que la suspension demandée revêtait un caractère d'urgence ;

Considérant que, pour estimer que la Société immobilière du Tanneron devait être regardée comme justifiant de l'existence d'une situation d'urgence, le juge des référés s'est fondé sur les conséquences de l'arrêté sur la situation financière et sur les engagements juridiques de celle-ci sans répondre à l'argumentation du préfet du Var fondée sur l'intérêt public qui s'attachait, selon ce dernier, à l'exécution de cet arrêté portant sur des parcelles isolées au coeur du massif du Tanneron et placées en totalité dans une zone d'aléa maximal de feu de forêt et à l'absence de défrichement avant que n'ait été arrêté un plan de prévention des incendies de forêt et évalué les risques pouvant résulter de la réalisation de l'opération d'urbanisation projetée ; que le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, par suite, entaché son ordonnance d'une insuffisance de motivation ; que celle-ci doit dès lors être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de statuer sur la demande de suspension présentée par la Société immobilière du Tanneron devant le tribunal administratif de Nice ;

Considérant que si le refus de la demande d'autorisation de défrichement pris par le préfet du Var comporte pour la Société immobilière du Tanneron des conséquences, notamment financières, dommageables, du fait du retard qu'il implique pour la réalisation du projet de zone d'aménagement concerté et des incidences juridiques qu'il peut avoir sur des engagements souscrits par cette société, l'octroi, avant l'intervention du jugement à rendre sur la légalité de la décision du préfet, de l'autorisation sollicitée de défricher les parcelles afin de pouvoir commencer des opérations de construction porterait atteinte à l'intérêt public qui s'attache à la protection des biens et des personnes contre les risques naturels, notamment les incendies, sur la zone où la société souhaite réaliser son projet ; que, dans ces conditions, l'urgence, qui doit, ainsi qu'il a été dit, s'apprécier globalement, ne justifie pas la suspension de l'arrêté du préfet du Var du 16 décembre 2005 ; que la Société immobilière du Tanneron n'est partant pas fondée à en demander la suspension ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la Société immobilière du Tanneron au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 7 mars 2006 du juge des référés du tribunal administratif de Nice est annulée.

Article 2 : La demande de suspension de l'arrêté du 16 décembre 2005 du préfet du Var présentée devant le tribunal administratif de Nice est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la Société immobilière du Tanneron devant le Conseil d'Etat est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Société immobilière du Tanneron et au MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 291613
Date de la décision : 24/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 24 nov. 2006, n° 291613
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Damien Botteghi
Rapporteur public ?: M. Olson
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:291613.20061124
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