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06/12/2006 | FRANCE | N°258659

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 06 décembre 2006, 258659


Vu l'ordonnance en date du 15 juillet 2003, enregistrée le 18 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par Mme Brigitte A ;

Vu la demande, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Versailles le 20 mai 2003, présentée par Mme Brigitte A, demeurant ... ; Mme A demande :

1°) à ce que soit annulée la décision du 30 avril 2003 lui refusant le

bénéfice de l'allocation pour tierce personne à la suite de sa mise à l...

Vu l'ordonnance en date du 15 juillet 2003, enregistrée le 18 juillet 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée à ce tribunal par Mme Brigitte A ;

Vu la demande, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Versailles le 20 mai 2003, présentée par Mme Brigitte A, demeurant ... ; Mme A demande :

1°) à ce que soit annulée la décision du 30 avril 2003 lui refusant le bénéfice de l'allocation pour tierce personne à la suite de sa mise à la retraite pour invalidité ;

2°) à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, au ministre de la justice et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de lui accorder le bénéfice de ladite allocation assortie des intérêts au taux légal ;

3°) à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le remboursement des frais de timbre en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyrille Pouplin, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Laurent Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article L. 30 du code des pensions civiles et militaires de retraite : (...) si le fonctionnaire est dans l'obligation d'avoir recours d'une manière constante à l'assistance d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie, il a droit à une majoration spéciale dont le montant est égal au traitement brut afférent à l'indice brut afférent à l'indice 100 prévu par l'article 1er du décret n° 48-1108 du 10 juillet 1948 (...). ; que cette disposition ne peut être interprétée comme exigeant que l'aide d'un tiers soit nécessaire à l'accomplissement de la totalité des actes nécessaires à la vie ; qu'elle impose toutefois que l'aide d'une tierce personne soit indispensable ou bien pour l'accomplissement d'actes nombreux se répartissant tout au long de la journée, ou bien pour faire face soit à des manifestations imprévisibles des infirmités ou de l'affection dont le pensionné est atteint, soit à des soins dont l'accomplissement ne peut être subordonné à un horaire préétabli, et dont l'absence mettrait sérieusement en danger l'intégrité physique ou la vie de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A, qui a été placée en position de retraite pour invalidité à compter du 1er février 2003, a sollicité le bénéfice de la majoration pour tierce personne ; que cette demande a été rejetée par une décision du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui a été portée à sa connaissance par une lettre du chef du bureau des pensions du ministère de la justice, en date du 30 avril 2003 ; que Mme A demande l'annulation de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si l'affection dont souffre Mme A ne met pas celle-ci dans l'obligation de recourir à une aide extérieure pour l'accomplissement de tous les actes nécessaires à la vie, elle impose, cependant, l'aide d'une tierce personne en raisons de ses manifestations imprévisibles ; que Mme A remplit donc les conditions exigées par l'alinéa 2 de l'article L. 30 précitées pour bénéficier de la majoration pour tierce personne qu'il prévoit ; que c'est, par suite, à tort que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a, par la décision attaquée, rejeté sa demande ; qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que cette décision doit être annulée ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que le contentieux des pensions civiles et militaires de retraite est un contentieux de pleine juridiction ; qu'il appartient, dès lors, au juge saisi de se prononcer lui-même sur les droits des intéressés, sauf à renvoyer à l'administration compétente, et sous son autorité, le règlement de tel aspect du litige dans des conditions précises qu'il lui appartient de fixer ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme A a droit à la majoration spéciale prévue à l'article L. 30 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; qu'il convient, dès lors, de prescrire au garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de faire bénéficier, dans un délai de quatre mois à compter de la notification de la présente décision, Mme A de ladite majoration, assortie des intérêts au taux légal, à compter du 1er février 2003, sans qu'il y ait lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à Mme A la somme de 15 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en date du 30 avril 2003 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint, dans un délai de quatre mois à compter de la présente décision, au garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie d'attribuer à compter du 1er février 2003 à Mme A la majoration spéciale de l'article L. 30 du code des pensions civiles et militaires de retraite, assortie des intérêts au taux légal à compter de cette même date.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 15 euros à Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Brigitte A, au garde des sceaux, ministre de la justice et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

48-02-02-04-04 PENSIONS. PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES DE RETRAITE. PENSIONS CIVILES. PENSIONS OU ALLOCATIONS POUR INVALIDITÉ. DROIT AU BÉNÉFICE DE L'ARTICLE L. 30 DU CODE. - CONDITIONS D'OCTROI DE LA MAJORATION POUR TIERCE PERSONNE [RJ1].

48-02-02-04-04 Les dispositions de l'alinéa 2 de l'article L. 30 du code des pensions civiles et militaires de retraite, instituant la majoration pour tierce personne, ne peuvent être interprétées comme exigeant que l'aide d'un tiers soit nécessaire à l'accomplissement de la totalité des actes nécessaires à la vie. Elles imposent toutefois que l'aide d'une tierce personne soit indispensable ou bien pour l'accomplissement d'actes nombreux se répartissant tout au long de la journée, ou bien pour faire face soit à des manifestations imprévisibles des infirmités ou de l'affection dont le pensionné est atteint, soit à des soins dont l'accomplissement ne peut être subordonné à un horaire préétabli, et dont l'absence mettrait sérieusement en danger l'intégrité physique ou la vie de l'intéressé.


Références :

[RJ1]

Sur l'interprétation de l'article L. 18 du code des pensions militaires d'invalidité, Rappr. CSCP 26 juin 1974, Ministre des anciens combattants et victimes de guerre c/ Sieur Lambing, p. 660.


Publications
Proposition de citation: CE, 06 déc. 2006, n° 258659
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hagelsteen
Rapporteur ?: M. Cyrille Pouplin
Rapporteur public ?: M. Vallée

Origine de la décision
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Date de la décision : 06/12/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 258659
Numéro NOR : CETATEXT000008243745 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-12-06;258659 ?
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