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13/12/2006 | FRANCE | N°289806

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 13 décembre 2006, 289806


Vu 1°), sous le n° 289806, le recours, enregistré le 2 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 29 novembre 2005, en tant que par celui-ci, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté son recours tendant, d'une part, à la réformation du jugement du 25 septembre 2003 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a accordé à la société Rocamat Pierre Naturelle, venant aux droits de la société

Rocamat SNI, une réduction des compléments de taxe professionn...

Vu 1°), sous le n° 289806, le recours, enregistré le 2 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 29 novembre 2005, en tant que par celui-ci, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté son recours tendant, d'une part, à la réformation du jugement du 25 septembre 2003 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a accordé à la société Rocamat Pierre Naturelle, venant aux droits de la société Rocamat SNI, une réduction des compléments de taxe professionnelle auxquels elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 dans les rôles de la commune de Saint-Maximin et, d'autre part, à la remise intégrale à la charge de la Société Rocamat Pierre Naturelle de l'imposition litigieuse ;

Vu 2°), sous le n° 289894, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 février et 29 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE, dont le siège est 58 quai de la Marne à l'Ile Saint-Denis (93450) ; la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 novembre 2005, en tant que par celui-ci, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant, d'une part, à la réformation du jugement du 25 septembre 2003 par lequel le tribunal administratif d'Amiens lui a accordé une réduction des compléments de taxe professionnelle auxquels elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 dans les rôles de la commune de Saint-Maximin et, d'autre part, à la décharge des impositions restant en litige ;

2°) réglant l'affaire au fond, de lui accorder la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code civil, notamment son article 1844-5 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Julie Burguburu, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la SNC Rocamat Pierre Naturelle,

- les conclusions de M. Stéphane Verclytte, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et la requête de la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE sont dirigés contre le même arrêt ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel de Douai que les cotisations supplémentaires de taxe professionnelle litigieuses, auxquelles la SNC Rocamat SNI, aux droits de laquelle vient la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE, avait été assujettie au titre de chacune des années 1996 et 1997 dans les rôles de la commune de Saint-Maximin (Oise), procédaient de rehaussements apportés par l'administration aux valeurs locatives pour lesquelles la SNC Rocamat SNI avait porté sur ses déclarations les équipements et biens mobiliers mis en oeuvre dans les établissements industriels exploités par elle dans cette commune et qu'elle avait recueillis du fait de la transmission universelle de patrimoine résultée de l'opération, selon les dispositions de l'article 1844-5 du code civil, d'une dissolution sans liquidation, le 22 décembre 1995, de sociétés dont elle était devenue l'unique détentrice de parts ; que ces rehaussements ont été fondés par l'administration sur l'application des dispositions, soit du 4ème alinéa du 3° de l'article 1469, soit de l'article 1518 B du code général des impôts ;

En ce qui concerne l'application des dispositions du 4ème alinéa du 3° de l'article 1469 du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes du 4ème alinéa du 3° de l'article 1469 du code général des impôts, applicable en l'espèce : Lorsqu'un contribuable dispose, en vertu d'un contrat de crédit-bail ou de location conclu après le 1er janvier 1991, d'équipements et biens mobiliers dont il était précédemment propriétaire, la valeur locative de ces équipements et biens mobiliers ne peut, pour les impositions établies au titre de 1993 et des années suivantes, être inférieure à celle retenue au titre de l'année de leur cession ;

Considérant que, pour juger que l'administration avait à tort fondé sur l'application des dispositions précitées les rehaussements apportés par elle aux valeurs locatives retenues, pour les impositions établies au titre des années 1996 et 1997, en ce qui concerne certains équipements et biens mobiliers pris en location par la SNC Rocamat SNI en vertu d'un contrat conclu avec la société Slibail et prenant effet dans la journée du 22 décembre 1995, la cour administrative d'appel s'est fondée sur ce que ces biens ont, à cette même date, avant réalisation, à minuit, de la transmission de leurs patrimoines à la SNC Rocamat SNI, été cédés à la société Slibail par les sociétés dont la dissolution avait été décidée, de sorte que la preneuse n'en a jamais été, elle-même propriétaire ; que, contrairement à ce que soutient le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, la cour, en statuant ainsi, n'a pas méconnu la portée des dispositions de l'article 1844-5 du code civil, en vertu desquelles la transmission du patrimoine d'une société dissoute sans liquidation à son associé unique et la disparition de cette personne morale ne sont, au plus tôt, réalisées qu'à l'issue du délai de trente jours suivant la publication de la dissolution, et durant lequel il peut être fait opposition à celle-ci par les créanciers, le terme ainsi fixé ne permettant pas de regarder l'associé bénéficiaire de la transmission universelle de patrimoine comme propriétaire effectif des actifs de la société dès la date de la décision de dissoudre celle-ci ; qu'ainsi, le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article 1518 B du code général des impôts : (...) la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusion de société ou de cessions d'établissements réalisés (...) à compter du 1er janvier 1992 (...) ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération (...) ;

Considérant que les transmissions universelles de patrimoine entraînées, en vertu de l'article 1844-5 du code civil, par la dissolution sans liquidation d'une société dont toutes les parts ont été réunies en une seule main ne procèdent pas de cessions consenties par la société dissoute à l'associé unique qui subsiste, au sens que revêt ce terme en droit civil comme en droit des sociétés ; que les cessions d'établissements visées par l'article 1518 B du code général des impôts, dont les termes renvoient à des catégories d'opérations définies et régies par le droit des sociétés, ne sauraient, contrairement à ce que soutient le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, s'entendre comme incluant toutes autres opérations, non mentionnées par ce texte, qui, sans constituer des cessions proprement dites, ont pour conséquence la mutation patrimoniale d'un établissement industriel ou commercial ; qu'il suit de là qu'en jugeant que l'administration avait à bon droit fondé les rehaussements litigieux sur ce que la transmission de biens en l'espèce intervenue aurait caractérisé une cession d'établissement au sens des dispositions précitées de l'article 1518 B du code général des impôts, la cour administrative d'appel a méconnu la portée des dispositions de cet article, entachant de ce fait son arrêt d'une erreur de droit ; que la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE, dès lors, est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à la réformation du jugement du 25 septembre 2003 du tribunal administratif d'Amiens ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE est fondée à soutenir que le rehaussement de bases d'où procèdent les droits litigieux, compris dans les cotisations de taxe professionnelle auxquelles la SNC Rocamat SNI a été assujettie au titre de chacune des années 1996 et 1997 dans le rôle de la commune de Saint Maximin, a été à tort opéré par l'administration sur le fondement des dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts, et que c'est également à tort que, par son jugement du 25 novembre 2003, le tribunal administratif d'Amiens ne lui a pas accordé la réduction, à concurrence du montant de ces droits, des cotisations dont s'agit ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : L'arrêt du 29 novembre 2005 de la cour administrative d'appel de Douai et le jugement du 25 novembre 2003 du tribunal administratif d'Amiens sont annulés en tant qu'ils rejettent les conclusions de la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE.

Article 3 : Il est accordé à la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE la réduction des cotisations de taxe professionnelle auxquelles la SNC Rocamat SNI a été assujettie au titre de chacune des années 1996 et 1997 dans le rôle de la commune de Saint-Maximin, à concurrence des droits résultés du rehaussement, par l'administration, de la valeur locative afférente aux biens non passibles d'une taxe foncière mis en oeuvre dans les établissements exploités par cette société dans cette commune.

Article 4 : L'Etat versera à la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la SNC ROCAMAT PIERRE NATURELLE.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 13 déc. 2006, n° 289806
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Genevois
Rapporteur ?: Mme Julie Burguburu
Rapporteur public ?: M. Verclytte
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL

Origine de la décision
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Date de la décision : 13/12/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 289806
Numéro NOR : CETATEXT000008251102 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-12-13;289806 ?
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