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20/12/2006 | FRANCE | N°285591

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 20 décembre 2006, 285591


Vu 1°), sous le n° 285591, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 septembre et 23 décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Michel A, demeurant ... ; M. et Mme Michel A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret du 29 juillet 2005 portant déclaration d'utilité publique du projet d'acquisition des terrains nécessaires à la résorption d'un habitat insalubre, situé 913 route de Nice à Antibes et à la construction de logements sociaux aux fins de relogement des occupants ;

2°)

de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des disposition...

Vu 1°), sous le n° 285591, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 septembre et 23 décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Michel A, demeurant ... ; M. et Mme Michel A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret du 29 juillet 2005 portant déclaration d'utilité publique du projet d'acquisition des terrains nécessaires à la résorption d'un habitat insalubre, situé 913 route de Nice à Antibes et à la construction de logements sociaux aux fins de relogement des occupants ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°), sous le n° 298491, l'ordonnance du 27 octobre 2006, enregistrée le 31 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Nice a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 341-2 du code de justice administrative, la requête présentée par M. et Mme Michel A ;

Vu la requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nice le 22 décembre 2005, présentée par M. et Mme Michel A demeurant 877 chemin des Prés à Biot (06410) ; M. et Mme A demandent :

1°) l'annulation de l'arrêté de cessibilité du 8 août 2005 du préfet des Alpes-Maritimes déclarant cessibles des immeubles au bénéfice de l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte-d'Azur en vue de l'exécution du décret du 29 juillet 2005 déclarant d'utilité publique l'opération d'acquisition des terrains nécessaires à la résorption de l'habitat insalubre quartier la Fontonne ;

2°) que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu 3°), sous le n° 293023, le recours et le mémoire complémentaire enregistrés le 2 mai et le 2 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ; le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 13 avril 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, à la demande de M. et Mme Michel A, suspendu l'exécution de l'arrêté du 8 août 2005 du préfet des Alpes-Maritimes portant cession des immeubles leur appartenant ;

2°) statuant au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter la demande de suspension de l'arrêté du 8 août 2005 ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme A la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat de M. et Mme A, et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte-d'Azur,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Sur la compétence du Conseil d'Etat et la jonction des requêtes :

Considérant, d'une part, que M et Mme A ont déféré au Conseil d'Etat, sous le n° 285591, une requête enregistrée le 28 septembre 2005 tendant à l'annulation du décret du 29 juillet 2005 déclarant d'utilité publique les terrains situés 913, route de Nice à Antibes, nécessaires à la résorption de l'habitat insalubre et à la construction de logements sociaux ; que, d'autre part, les mêmes requérants ont demandé au tribunal administratif de Nice, par une requête enregistrée le 22 décembre 2005, l'annulation de l'arrêté de cessibilité du préfet des Alpes- Maritimes du 8 août 2005 pris pour l'exécution dudit décret, avec lequel cet arrêté forme une même opération complexe, en se prévalant de l'illégalité de ce décret ; qu'en raison du lien de connexité existant entre ces deux requêtes, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a ordonné, en application de l'article R. 341-2 du code de justice administrative, le renvoi au Conseil d'Etat de la demande soumise au tribunal administratif de Nice par M. et Mme A ; que ce renvoi a été ordonné par le président de ce tribunal par une ordonnance enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 298491 ; qu'enfin, sous le n° 293023, le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 13 avril 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a suspendu, à la demande de M. et Mme A, l'arrêté de cessibilité du 8 août 2005 ; qu'il y a lieu de joindre les requêtes et le recours pour y être statué par une même décision ;

Sur la requête n° 285591 dirigée contre le décret du 29 juillet 2005 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure :

Considérant que les informations relatives au coût de l'opération soumise à enquête publique étaient suffisantes et n'étaient pas, à la date à laquelle elles ont été établies, manifestement sous-évaluées ;

En ce qui concerne l'exception tirée de l'illégalité de l'arrêté du 25 mars 2002 du préfet des Alpes maritimes modifié par les arrêtés des 15 mai et 26 juillet 2002 déclarant insalubres avec impossibilité d'y remédier les logements créés dans les annexes des immeubles sis 913 route de Nice à Antibes sur les parcelles AL, n° 44,45 et 46 :

Considérant que le décret portant déclaration d'utilité publique du projet d'acquisition des terrains nécessaires à la résorption de l'habitat insalubre situé 913 route de Nice à Antibes et à la construction de logements sociaux, pris sur le fondement du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, aux fins de relogement des occupants, ne constitue pas un acte pris en application de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 25 mars 2002 intervenu en application des articles L. 1331-26 à L. 1331-38 du code de la santé publique ; que, par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité invoqué est inopérant ;

En ce qui concerne l'exception tirée de l'illégalité de la déclaration du conseil municipal d'Antibes du 9 juillet 2004 sollicitant le maintien d'une activité commerciale sur le site, s'engageant à proposer à M. et Mme B un autre terrain et décidant de la poursuite de la procédure engagée :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : « ...Si les conclusions du commissaire enquêteur.. sont défavorables à l'adoption du projet, le conseil municipal est appelé à émettre son avis par une délibération motivée dont le procès-verbal est joint au dossier transmis au sous-préfet... » ; qu'il ressort des termes de la délibération du conseil municipal d'Antibes du 9 juillet 2004, éclairée par le rapport de présentation qui l'accompagne, que celle-ci satisfait aux exigences de motivation prescrites par l'article R. 11-3 ; que, si les requérants soutiennent que cette délibération reposerait sur des faits matériellement inexacts, ils n'apportent pas au soutien de cette allégation des éléments suffisants pour en apprécier le bien-fondé ; que l'exception d'illégalité invoquée doit, par suite, être rejetée ;

En ce qui concerne l'utilité publique de l'opération :

Considérant qu'une opération ne peut être déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs par rapport à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que le projet a pour objet l'acquisition des terrains nécessaires, d'une part, à la résorption d'habitats insalubres installés sur des parcelles situées 913 route de Nice à Antibes, dans lesquels avaient été logés pendant de nombreuses années des travailleurs immigrés et, d'autre part, à la construction de logements sociaux destinés à assurer leur relogement sur place ; que ce projet, qui contribue à augmenter le nombre de logements sociaux dans une commune où ils sont peu nombreux et à assurer le relogement dans des conditions normales des personnes qui vivaient sur ce site dans des conditions insalubres, révêt un caractère d'utilité publique ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune ait disposé de terrains lui appartenant susceptibles d'accueillir la réalisation d'un tel projet ; que le coût de l'opération n'est pas tel que les loyers qui seront demandés à leurs occupants excéderont les capacités contributives de ces derniers ; qu'eu égard tant à l'objet de l'opération qu'aux conditions de sa réalisation financière, ni les atteintes portées à la propriété privée ni le coût de l'opération ne peuvent être regardés comme excessifs par rapport à l'intérêt qu'elle présente ; que la circonstance que les propriétaires aient, à la suite de la destruction des logements insalubres installés sur leurs parcelles et du relogement de leurs occupants par les soins de l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, effectué des travaux sur des parties d'immeubles qu'ils ont louées, n'est pas de nature à retirer à l'opération son caractère d'utilité publique, lequel doit s'apprécier à la date du décret attaqué ; qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret attaqué ;

Sur la requête n° 298491 dirigée contre l'arrêté du 8 août 2005 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a déclaré cessibles au profit de l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte-d'Azur les immeubles dont l'acquisition est nécessaire pour parvenir à l'exécution du décret du 29 juillet 2005 :

Considérant que M et Mme A invoquent à l'encontre de cet arrêté, par la voie de l'exception, l'illégalité du décret du 29 juillet 2005 par les mêmes moyens que ceux soulevés dans leur requête n° 285591 ; que celle-ci étant rejetée par la présente décision, il y lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions de la requête enregistrée sous le n° 298491 ;

Sur le recours du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE enregistré sous le n° 293023 dirigé contre l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nice du 13 avril 2006 suspendant l'arrêté de cessibilité du 8 août 2005 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « ...Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation ou en réformation dans les meilleurs délais. La suspension prend fin au plus tard lorsqu'il est statué sur la requête en annulation ou en réformation » ; qu'à la suite du rejet, par la présente décision, de la requête en annulation de l'arrêté déclarant cessibles, au bénéfice de l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, les immeubles dont l'acquisition est nécessaire pour parvenir à l'exécution du décret du 29 juillet 2005, l'ordonnance attaquée suspendant cet arrêté a cessé de produire ses effets ; qu'ainsi, le recours du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE tendant à l'annulation de cette ordonnance est devenu sans objet ; qu'il en va, par suite, de même de l'intervention formée par l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte-d'Azur au soutien de ce recours ;

Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit fait application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. et Mme A la somme de 1 500 euros à verser à l'Etat, celle de 1 500 euros à verser à la commune d'Antibes et celle de 1 000 euros à verser à l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que demandent M. et Mme A ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes n° 285591 et 298491 de M. et Mme A sont rejetées.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le recours du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, enregistré sur le n° 293023, et sur l'intervention formée par l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte d'Azur au soutien du recours.

Article 3 : M. et Mme A verseront 1 500 euros à l'Etat, 1 500 euros à la commune d'Antibes et 1 000 euros à l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Michel A, à la commune d'Antibes, à l'établissement public foncier d'aménagement de Provence-Alpes-Côte-d'Azur et au MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 285591
Date de la décision : 20/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 déc. 2006, n° 285591
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : SCP PEIGNOT, GARREAU ; SCP DEFRENOIS, LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:285591.20061220
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