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21/12/2006 | FRANCE | N°290744

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 21 décembre 2006, 290744


Vu l'ordonnance du 27 février 2006, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 321-1 du code de justice administrative, la requête présentée à cette cour pour Mme Marie-Pierre A demeurant ... ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles le 13 février 2006, présentée pour Mme A ; Mme A demande l'annulation du jugement en date du 31 janvier 2006 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande présentée en exécution de l

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Vu l'ordonnance du 27 février 2006, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 321-1 du code de justice administrative, la requête présentée à cette cour pour Mme Marie-Pierre A demeurant ... ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles le 13 février 2006, présentée pour Mme A ; Mme A demande l'annulation du jugement en date du 31 janvier 2006 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande présentée en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles en date du 10 mars 2005 et tendant à ce qu'il déclare que l'avis de mise en recouvrement émis à l'encontre de la société à responsabilité limitée BBH Conseil, dont elle était la gérante, le 8 juillet 1999 par le receveur principal de Saint-Germain-en-Laye Sud pour un montant de 176 068 euros est irrégulier ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Michel, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par arrêt en date du 10 mars 2005, la cour d'appel de Versailles, saisie par Mme A qui relevait appel du jugement du 28 avril 2004 par lequel le tribunal de grande instance de Versailles, sur le fondement de l'article L. 267 du livre des procédures fiscales, l'a déclarée solidairement responsable avec la société BBH Conseil dont elle était la gérante, du paiement de droits de taxe sur la valeur ajoutée et de la taxe sur les véhicules des sociétés, a invité Mme A à saisir le juge administratif afin que celui-ci apprécie la régularité de l'avis de mise en recouvrement émis le 8 juillet 1999 à l'encontre de la société BBH Conseil portant sur ces deux impositions ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles, saisi par Mme A a estimé que ledit avis de mise en recouvrement était régulier au regard des dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales et que la requérante ne pouvait se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 de la documentation administrative de base 12 C 1221 à jour au 1er décembre 2004 dès lors que cette doctrine ajoutait aux dispositions légales et réglementaires ; que Mme A relève appel de ce jugement devant le Conseil d'Etat conformément aux dispositions de l'article R. 321-1 du code de justice administrative ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant que si, par application du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, la juridiction administrative est tenue de se prononcer sur les questions préjudicielles qui lui sont renvoyées par l'autorité judiciaire, il est fait exception à cette règle au cas où la juridiction administrative est elle-même incompétente soit totalement, soit seulement à titre partiel pour connaître de la question préjudicielle soumise à son examen ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales : ... En matière... de droits de timbre... le tribunal compétent est le tribunal de grande instance... ;

Considérant que la taxe sur les véhicules des sociétés prévue à l'article 1010 du code général des impôts est assimilée à un droit de timbre ; que, dans ces conditions, l'autorité judiciaire est seule compétente pour se prononcer sur la validité d'un avis de mise en recouvrement émis pour avoir paiement d'une somme due au titre de cette taxe ; qu'il suit de là que le tribunal administratif de Versailles devait se borner à apprécier la régularité de l'avis de mise en recouvrement en cause en tant qu'il portait sur la taxe sur la valeur ajoutée ; que, dès lors, en se prononçant également sur la validité dudit avis en tant qu'il portait également sur la taxe sur les véhicules des sociétés, le jugement attaqué a excédé la compétence de la juridiction administrative ; qu'il doit, dans cette mesure, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de Mme A en tant qu'elles demandent au juge d'apprécier la validité de l'avis de mise en recouvrement émis le 8 juillet 1999 pour avoir paiement de la somme due au titre de la taxe sur les véhicules des sociétés ; qu'ainsi qu'il a été dit, ces conclusions doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur le surplus des conclusions de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers : Tout intéressé est fondé à se prévaloir, à l'encontre de l'administration, des instructions, directives et circulaires publiées dans les conditions prévues par l'article 9 de la loi... du 17 juillet 1978, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux lois et règlements ; qu'aux termes des dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments de calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard, qui constituent la créance. Toutefois, les éléments de calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement. De même, ils n'ont pas à être portés lorsque le contribuable n'a pas fait la déclaration nécessaire au calcul des droits ;

Considérant que Mme A entend se prévaloir, pour arguer de l'illégalité de l'avis de mise en recouvrement critiqué, sur le fondement de ces dispositions, de la documentation administrative de base 12 C 1221 à jour au 1er décembre 2004 dont les énonciations, qui reprendraient les termes d'une instruction du 30 juin 1964, obligent l'administration à établir deux titres distincts visant respectivement les droits dont auront à connaître, d'une part, la juridiction administrative et, d'autre part, la juridiction judiciaire ; que cependant, contrairement à ce que soutient la requérante et en tout état de cause, une telle règle ajoute illégalement aux dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dès lors que ni ces dispositions, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit ne font obstacle à ce que l'administration vise sur le même avis de mise en recouvrement des impositions dont le contentieux relève de juridictions d'ordres différents ; qu'ainsi Mme A n'est pas fondée à se prévaloir de cette règle, pour contester la régularité de l'avis de mise en recouvrement en tant qu'il visait la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a estimé que, en tant qu'il visait des droits de taxe sur la valeur ajoutée, l'avis de mise en recouvrement émis le 8 juillet 1999 à l'encontre de la société BBH Conseil était régulier ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 31 janvier 2006 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de Mme A tendant à ce qu'il déclare irrégulier l'avis de mise en recouvrement émis le 8 juillet 1999 à l'encontre de la société BBH Conseil pour avoir paiement de sommes dues au titre de la taxe sur les véhicules des sociétés.

Article 2 : La demande de Mme A tendant à ce que l'avis de mise en recouvrement émis le 8 juillet 1999 à l'encontre de la société BBH Conseil pour avoir paiement de sommes dues au titre de la taxe sur les véhicules des sociétés soit déclaré irrégulier est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des conclusions d'appel est rejeté.

Article 4 : : La présente décision sera notifiée à Mme Marie-Pierre A et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 290744
Date de la décision : 21/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Appréciation de la légalité

Publications
Proposition de citation : CE, 21 déc. 2006, n° 290744
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Jérôme Michel
Rapporteur public ?: M. Collin
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:290744.20061221
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