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29/12/2006 | FRANCE | N°284467

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 29 décembre 2006, 284467


Vu la requête, enregistrée le 26 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Halima A, épouse B, demeurant ...; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visas d'entrée en France a rejeté son recours visant au réexamen de la décision du 10 novembre 2004 du consul général de France à Annaba (Algérie) refusant un visa d'entrée et de long séjour sur le territoire français à son neveu mineur, M. Mohamed Lamine A ; r>
2°) d'enjoindre à l'administration de délivrer à M. A le visa demandé, sous ...

Vu la requête, enregistrée le 26 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Halima A, épouse B, demeurant ...; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visas d'entrée en France a rejeté son recours visant au réexamen de la décision du 10 novembre 2004 du consul général de France à Annaba (Algérie) refusant un visa d'entrée et de long séjour sur le territoire français à son neveu mineur, M. Mohamed Lamine A ;

2°) d'enjoindre à l'administration de délivrer à M. A le visa demandé, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée le 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant, signée le 26 janvier 1990, notamment ses articles 3 et 10 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Martine Jodeau-Grymberg, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête de Mme A doit être regardée comme dirigée contre la décision du 10 novembre 2005 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du 10 novembre 2004 du consul général de France à Annaba (Algérie) refusant un visa de long séjour en France à son neveu mineur, M. Mohamed Lamine A, de nationalité algérienne, qui lui a été confié par un acte de kafala (recueil légal) du 22 février 2003 du tribunal de Skikda (Algérie), rendu exécutoire en France par un jugement du 24 septembre 2004 du tribunal de grande instance de Paris ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des affaires étrangères ;

Considérant que la décision du 10 novembre 2005 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France comporte les considérations de fait et de droit sur lesquelles elle est fondée ; que, dès lors, le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté ;

Considérant que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles, régit, d'une manière complète, les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité, et les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'établir en France ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent à cet égard des règles fixées par l'accord ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien, un certificat de résidence de 10 ans est délivré de plein droit « à l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de 21 ans ou s'il est à la charge de ses parents » ;

Considérant qu'un acte de kafala ne crée aucun lien de filiation et n'emporte, par suite, aucun droit particulier à l'accès de l'enfant sur le territoire français ; que Mme A n'est, par conséquent, pas fondée à soutenir que le jugement du 29 septembre 2004, par lequel le tribunal de grande instance de Paris a rendu exécutoire en France le jugement de kafala rendu le 22 février 2003 par le tribunal de Skikda, ouvrait droit à son neveu au visa demandé ;

Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, né le 10 juillet 1988 à Skikda (Algérie), réside depuis sa naissance en Algérie avec ses parents, sa soeur, née en 1993, et son frère, né en 1996 ; que si Mme A fait valoir qu'elle est en mesure de lui apporter l'affection et l'éducation dont il a besoin, elle n'allègue pas ne pas être en mesure de lui rendre visite régulièrement en Algérie ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 de la même convention : « Les Etats parties s'engagent à assurer à l'enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées » ; que, toutefois, la requérante ne peut utilement se prévaloir, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, des stipulations précitées, qui sont dépourvues d'effet direct ;

Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 10 de la même convention : « Conformément à l'obligation incombant aux Etats parties en vertu du paragraphe 1 de l'article 9, toute demande faite par un enfant ou ses parents en vue d'entrer dans un Etat partie ou de le quitter aux fins de réunification familiale est considérée par les Etats parties dans un esprit positif, avec humanité et diligence. Les Etats parties veillent, en outre, à ce que la présentation d'une telle demande n'entraîne pas de conséquences fâcheuses pour les auteurs de la demande et les membres de leur famille » ; que ces stipulations, relatives à la réunification familiale, si elles sont d'effet direct, ne sauraient, toutefois, être utilement invoquées en l'espèce, dès lors que les parents et les frères et soeurs de M. A résident en Algérie ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions de Mme A tendant à l'annulation de la décision contestée, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme A ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme A la somme qu'elle demande au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Halima A et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 284467
Date de la décision : 29/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 déc. 2006, n° 284467
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Martine Jodeau-Grymberg
Rapporteur public ?: Mme de Silva

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2006:284467.20061229
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