La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/01/2007 | FRANCE | N°281492

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 29 janvier 2007, 281492


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 juin et 21 novembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mlle Houda A et Mlle Leïla A, demeurant à ... ; Mlles A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant implicitement leur recours contre la décision du consul général de France à Tunis leur refusant un visa d'entrée et de court séjour en France ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères de leur d

livrer un visa d'entrée et de court séjour en France dans un délai de quinze jour...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 juin et 21 novembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mlle Houda A et Mlle Leïla A, demeurant à ... ; Mlles A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant implicitement leur recours contre la décision du consul général de France à Tunis leur refusant un visa d'entrée et de court séjour en France ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères de leur délivrer un visa d'entrée et de court séjour en France dans un délai de quinze jours à compter de la décision du Conseil d'Etat sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 signé le 19 juin 1990 ;

Vu l'ordonnance n° 45- 2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Nathalie Escaut, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête présentée par Mlles A doit être regardée comme tendant à l'annulation à la fois de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ayant implicitement rejeté leur recours contre la décision du consul général de France à Tunis leur refusant un visa d'entrée et de court séjour en France et de la décision de cette même commission en date du 1er septembre 2005 rejetant explicitement leur recours ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'en vertu de l'article 5 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, codifié à l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile, la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France confirmant le rejet de la demande de visa présentée par l'enfant à charge de ressortissants français doit être motivée ; qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'attestation de M. A, corroborée par les mandats postaux produits, que Mlles A, ressortissantes tunisiennes majeures, sont à la charge de leur père qui a été naturalisé français par un décret en date du 21 juin 2004 ; qu'elles entrent donc dans la catégorie d'étrangers pour lesquels la décision de refus de visa doit être motivée ; que d'une part, à la suite du recours qu'elles ont formé le 28 septembre 2004 contre le rejet de leur demande de visa d'entrée et de court séjour en France par le consul général de France à Tunis, Mlles A se sont vues opposer une décision implicite de rejet par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; qu'elles en ont demandé les motifs par un courrier reçu le 18 mars 2005 par la commission; que ces motifs ne leur ont pas été communiqués ; que d'autre part, la décision en date du 1er septembre 2005 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a explicitement rejeté leur recours contre le refus de visa d'entrée et de court séjour qui leur avait été opposé est aussi dépourvue de motivation ; que, par suite, tant la décision implicite que la décision du 1er septembre méconnaissent les dispositions de l'article L. 211-2 du code de l‘entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlles A sont fondées à demander l'annulation des décisions de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ayant implicitement et explicitement rejeté leur recours ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé » ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ;

Considérant que si la présente décision, qui annule la décision implicite et la décision explicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France opposées à Mlles A, n'implique pas nécessairement que les autorités compétentes leur délivrent un visa, elle a en revanche pour effet de saisir à nouveau ces autorités de la demande des intéressées ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au ministre des affaires étrangères de procéder à ce nouvel examen dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'il n'y a cependant pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par les requérantes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mlles A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision implicite par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de Mlles A et sa décision explicite en date du 1er septembre 2005 sont annulées.

Article 2 : Il est enjoint au ministre des affaires étrangères de procéder à un nouvel examen de la demande de Mlles A dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à Mlles A la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlles A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mlle Leïla A, à Mlle Houda A et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 281492
Date de la décision : 29/01/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jan. 2007, n° 281492
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: Mme Nathalie Escaut
Rapporteur public ?: M. Casas

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:281492.20070129
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award