La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/02/2007 | FRANCE | N°285259

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 07 février 2007, 285259


Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Bertrand A, agissant en qualité de représentant légal de Mlles Mauricia A et Doddi-Jordie A et demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler, d'une part, la décision du 18 août 2004 par laquelle le ministre des affaires étrangères a confirmé la décision implicite de refus de l'Ambassadeur de France à Brazzaville de délivrer des visas d'entrée en France à Mlles Mauricia et Doddi-Jordie A, d'autre part, la décision implicite de la commissio

n de recours contre les refus de visa d'entrée en France rejetant le reco...

Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Bertrand A, agissant en qualité de représentant légal de Mlles Mauricia A et Doddi-Jordie A et demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler, d'une part, la décision du 18 août 2004 par laquelle le ministre des affaires étrangères a confirmé la décision implicite de refus de l'Ambassadeur de France à Brazzaville de délivrer des visas d'entrée en France à Mlles Mauricia et Doddi-Jordie A, d'autre part, la décision implicite de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France rejetant le recours du 7 octobre 2004, dirigé contre la décision précitée de l'ambassadeur de France à Brazzaville ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères d'accorder à Mlles A, les visas demandés dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, et de restituer aux requérants l'intégralité des pièces originales adressées à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité des conclusions de M. A :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 10 novembre 2000 : « Il est institué auprès du ministre des affaires étrangères une commission chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, dont la saisine est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier » ; que l'article 2 du même décret dispose : « Les recours devant la commission doivent être formés dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de refus. Ils sont seuls de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention des décisions prévues à l'article 5 » ; que, selon l'article 5 du décret : « La commission peut soit rejeter le recours, soit recommander au ministre des affaires étrangères d'accorder le visa demandé » ; qu'en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires contraires, le silence gardé pendant plus de deux mois par la commission sur le recours qui lui est présenté fait naître une décision implicite de rejet ;

Considérant que si ces dispositions réglementaires, qui se rapportent aux procédures administrative et contentieuse, ne font pas obstacle à l'application du principe général selon lequel toute décision administrative peut être contestée devant l'autorité hiérarchique, seule la décision, explicite ou implicite, prise, par la commission ou par le ministre des affaires étrangères sur la recommandation de celle-ci, dans le cadre de la procédure de recours administratif préalable obligatoire instituée par les dispositions réglementaires précitées, est susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir, à l'exclusion, d'une part, de la décision prise par le ministre sur le recours hiérarchique éventuellement exercé à l'encontre de la décision de l'autorité diplomatique ou consulaire, d'autre part, de cette dernière décision, à laquelle, en tout état de cause, se substitue la décision de la commission ou du ministre prise sur la recommandation de celle-ci ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que, par lettre en date du 18 août 2004, le ministre des affaires étrangères a rejeté le recours hiérarchique formé par M. A à l'encontre de la décision implicite de refus de la demande de visa de long séjour présentée, le 1er décembre 2003, aux autorités consulaires françaises à Brazzaville, au titre du regroupement familial, pour Mlles Mauricia A et Doddie Jennifer Jordie A ; que M. A s'est pourvu contre cette décision du ministre, par lettre du 7 octobre 2004 notifiée le 11 octobre 2004, auprès de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de la présente requête dirigées contre la décision ministérielle du 18 août 2004 ne sont pas recevables ;

Considérant d'autre part que, si M. A était recevable, lors de l'introduction de son recours le 19 septembre 2005, à présenter des conclusions dirigées contre la décision implicite de la commission des recours, née du silence gardé par celle-ci pendant plus de deux mois après sa demande notifiée le 11 octobre 2004, la décision de rejet explicite de la commission des recours, intervenue le 2 mars 2006, en cours d'instruction, s'est, depuis cette date, substituée à toutes les autres ; que les conclusions de M. A doivent être regardées comme dirigées contre cette dernière décision ;

Sur la motivation :

Considérant que l'intervention de la décision de rejet motivée de la commission des recours, en date du 2 mars 2006, rend inopérant le moyen tiré de l'absence de motivation de la décision initialement attaquée par M. A ;

Sur la légalité interne :

Considérant que si la venue en France de Mlle Mauricia Giovanni A et de M. Doddie Jordie A avait été autorisée au titre du regroupement familial, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que la commission de recours, après l'autorité consulaire, usât du pouvoir qui lui appartient de refuser leur entrée en France, en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur un motif d'ordre public ;

Considérant que la commission de recours s'est fondée, pour rejeter la demande de M. A, sur la circonstance que la filiation des enfants pour lesquels un visa était demandé n'était pas établie, en raison notamment des contradictions et des manipulations affectant les documents produits ; qu'il ressort en effet des pièces du dossier que certains documents, tels que le jugement du tribunal d'instance de Poto-Poto Moungali en date du 24 octobre 2002, confiant la garde des enfants au requérant, comportent des erreurs et des modifications manuscrites de nature à jeter le doute sur leur authenticité ; que l'acte de réquisition émis le 9 septembre 2004 par le procureur général de Brazzaville, adressé à l'officier d'état civil compétent de la ville de Brazzaville, afin qu'il reconstitue l'acte de naissance de l'un des deux enfants, n'est pas de nature à lui seul à établir la filiation de l'intéressée ; que, dès lors, en premier lieu, la commission de recours a pu légalement, sans commettre d'erreur d'appréciation des faits de l'espèce, estimer que les documents fournis ne permettaient pas d'établir la réalité de cette filiation ; qu'en second lieu, eu égard à son motif, la décision de la commission de recours en date du 2 mars 2006 ne porte pas, dans les circonstances de l'espèce, au droit de Mlles A au respect de leur vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de la commission de recours en date du 2 mars 2006 ; que ses conclusions à fins d'injonction, d'astreinte et de versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être écartées ; que la demande tendant à la restitution des documents originaux fournis à la commission est, en tout état de cause, sans objet, l'administration ayant annoncé son intention d'y donner suite sans délai ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Bertrand A et au ministre des affaires étrangères.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 07 fév. 2007, n° 285259
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur ?: M. Bruno Chavanat
Rapporteur public ?: M. Aguila

Origine de la décision
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 07/02/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 285259
Numéro NOR : CETATEXT000018005465 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-02-07;285259 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award