La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/02/2007 | FRANCE | N°289743

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 26 février 2007, 289743


Vu 1°), sous le n° 289743, la requête, enregistrée le 1er février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la REUNION DES ORGANISMES CONVENTIONNES ASSUREURS, dont le siège est 14, rue de Londres à Paris (75009) ; la REUNION DES ORGANISMES CONVENTIONNES ASSUREURS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'ordonnance n° 2005-1529 du 8 décembre 2005 instituant un interlocuteur unique pour les indépendants ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du

code de justice administrative ;

Vu, 2°) sous le n° 290032, la requête, enr...

Vu 1°), sous le n° 289743, la requête, enregistrée le 1er février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la REUNION DES ORGANISMES CONVENTIONNES ASSUREURS, dont le siège est 14, rue de Londres à Paris (75009) ; la REUNION DES ORGANISMES CONVENTIONNES ASSUREURS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'ordonnance n° 2005-1529 du 8 décembre 2005 instituant un interlocuteur unique pour les indépendants ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°) sous le n° 290032, la requête, enregistrée le 9 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE dont le siège est 255, rue de Vaugirard à Paris (75015); la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 6 de l'ordonnance n° 2005-1529 du 8 décembre 2005 instituant un interlocuteur unique pour les indépendants ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 13, 19 et 22 ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004, notamment son article 71 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la REUNION DES ORGANISMES CONVENTIONNES ASSUREURS et de Me de Nervo, avocat de la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE,

- les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre la même ordonnance ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Considérant qu'aux termes de l'article 71 de la loi du 9 décembre 2004 : « Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, en matière de sécurité sociale, toutes mesures pour : (...) / 12° Simplifier l'organisation des régimes de sécurité sociale des travailleurs indépendants en prenant les mesures nécessaires : / b) A ce que le régime social des travailleurs indépendants exerce les missions d'un interlocuteur social unique, notamment en organisant le recouvrement des cotisations et contributions sociales dont les travailleurs non salariés des professions non agricoles sont redevables à titre personnel, à l'exception des cotisations vieillesse des professions libérales et à ce que le régime social des indépendants délègue certaines fonctions liées à ces missions. La législation applicable au recouvrement de ces cotisations et contributions pourra à cette fin être modifiée en tant que de besoin » ; que sur le fondement de ces dispositions est intervenue l'ordonnance n° 2005-1529 du 8 décembre 2005 instituant un interlocuteur unique pour les indépendants ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 13 et 19 de la Constitution les ordonnances sont signées par le Président de la République et contresignées par le Premier ministre et, le cas échéant, par « les ministres responsables » ; que les ministres responsables sont ceux auxquels incombent, à titre principal, la préparation et l'application des ordonnances dont il s'agit ; que ni la circonstance, à la supposer établie, que l'ordonnance attaquée aurait des incidences sur le budget de l'Etat, ni celle que, selon son article 6, le ministre chargé du budget doit être signataire d'un arrêté interministériel d'application de l'ordonnance, ne sont de nature à faire regarder ce ministre comme « responsable » au sens de ces dispositions, qualité qui doit être distinguée de celle de « ministre chargé de l'exécution des actes du premier ministre », prévue par l'article 22 de la Constitution ; que le moyen tiré du défaut de contreseing de ce ministre doit donc être écarté ;

Sur la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 133-6-1 introduit dans le code de la sécurité sociale par l'ordonnance attaquée : « Le régime social des indépendants affilie les personnes exerçant les professions artisanales, industrielles et commerciales redevables des cotisations et contributions sociales mentionnées à l'article L. 133-6. Il affilie également les membres des professions libérales au titre de la branche maladie et maternité du régime » ; qu'il résulte de ces dispositions et de l'ensemble des autres dispositions de l'ordonnance attaquée que son champ d'application est défini avec une précision suffisante et inclut, conformément à l'article 71 de la loi du 9 décembre 2004, l'assurance maladie et maternité des professions libérales ; que, par suite, la REUNION DES ORGANISMES CONVENTIONNES ASSUREURS n'est pas fondée à soutenir que le Gouvernement serait, à cet égard, resté en deçà de sa compétence ni que l'ordonnance attaquée méconnaîtrait l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 611-20 introduit dans le même code par la même ordonnance : « La Caisse nationale confie le soin d'assurer pour le compte des caisses de base l'encaissement des cotisations d'assurance maladie des membres des professions libérales à des organismes régis, soit par le code de la mutualité, soit par le code des assurances, ou à des groupements de sociétés d'assurance. / La Caisse nationale peut confier le soin d'assurer pour le compte des caisses de base le service des prestations maladie, maternité prévues par le présent livre aux pensionnés ou aux allocataires dont les cotisations sont précomptées dans les conditions déterminées à l'article L. 612-9, à des organismes régis, ou bien par le code de la mutualité, ou bien par le présent code, ou bien par le code des assurances, ou à des groupements de sociétés d'assurance » ;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il résulte des termes mêmes du 12° de l'article 71 de la loi du 9 décembre 2004 cité plus haut que le Gouvernement, agissant par voie d'ordonnance, n'était pas tenu de prévoir que le régime social des indépendants devrait obligatoirement déléguer l'ensemble des fonctions liées à ses missions, mais pouvait ne prévoir que la délégation de certaines de ces fonctions ; que l'ordonnance attaquée a donc pu, sans méconnaître cette loi, prévoir l'obligation de déléguer aux organismes conventionnés la seule fonction de recouvrement et la simple faculté de leur déléguer le service des prestations à certaines catégories d'assurés sociaux ; que la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE n'est pas davantage fondée à soutenir que cette loi ferait obstacle à ce que l'ordonnance attaquée prévoie la possibilité, pour les organismes régis par le code de la sécurité sociale, de se voir déléguer le service de ces prestations ; qu'enfin, cette loi ne faisait pas non plus obligation au Gouvernement de préciser les prérogatives que les organismes conventionnés peuvent détenir pour l'exercice de la mission de recouvrement ;

Considérant, en troisième et dernier lieu, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de la REUNION DES ORGANISMES CONVENTIONNES ASSUREURS et de la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la REUNION DES ORGANISMES CONVENTIONNES ASSUREURS, à la FEDERATION NATIONALE DE LA MUTUALITE FRANCAISE, au Premier ministre et au ministre de la santé et des solidarités.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 289743
Date de la décision : 26/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE AUTORITÉS DISPOSANT DU POUVOIR RÉGLEMENTAIRE - AUTORITÉS DISPOSANT DU POUVOIR RÉGLEMENTAIRE - MINISTRES - CONTRESEING EN MATIÈRE D'ORDONNANCES - MINISTRES RESPONSABLES (ART - 13 ET 19 DE LA CONSTITUTION) - A) NOTION - INCLUSION - MINISTRES AUXQUELS INCOMBENT - À TITRE PRINCIPAL - LA PRÉPARATION ET L'APPLICATION DES ORDONNANCES DONT IL S'AGIT - B) APPLICATION AU MINISTRE CHARGÉ DU BUDGET - CIRCONSTANCES NE SUFFISANT PAS À FAIRE REGARDER CE MINISTRE COMME RESPONSABLE - ORDONNANCE SUSCEPTIBLE D'AVOIR UNE INCIDENCE SUR LE BUDGET DE L'ETAT - ORDONNANCE IMPLIQUANT LA SIGNATURE PAR CE MINISTRE D'UN ARRÊTÉ INTERMINISTÉRIEL.

01-02-02-01-03 a) En vertu des dispositions combinées des articles 13 et 19 de la Constitution, les ordonnances sont signées par le Président de la République et contresignées par le Premier ministre et, le cas échéant, par « les ministres responsables ». Les ministres responsables sont ceux auxquels incombent, à titre principal, la préparation et l'application des ordonnances dont il s'agit.... ...b) Ni la circonstance, à la supposer établie, que l'ordonnance attaquée aurait des incidences sur le budget de l'Etat, ni celle que le ministre chargé du budget doit être signataire d'un arrêté interministériel d'application de l'ordonnance ne sont de nature à faire regarder ce ministre comme « responsable » au sens de ces dispositions, qualité qui doit être distinguée de celle de « ministre chargé de l'exécution des actes du premier ministre », prévue par l'article 22 de la Constitution.

POUVOIRS PUBLICS ET AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES - GOUVERNEMENT - ATTRIBUTIONS DES MINISTRES - CONTRESEING EN MATIÈRE D'ORDONNANCES - MINISTRES RESPONSABLES (ART - 13 ET 19 DE LA CONSTITUTION) - A) NOTION - INCLUSION - MINISTRES AUXQUELS INCOMBENT - À TITRE PRINCIPAL - LA PRÉPARATION ET L'APPLICATION DES ORDONNANCES DONT IL S'AGIT - B) APPLICATION AU MINISTRE CHARGÉ DU BUDGET - CIRCONSTANCES NE SUFFISANT PAS À FAIRE REGARDER CE MINISTRE COMME RESPONSABLE - ORDONNANCE SUSCEPTIBLE D'AVOIR UNE INCIDENCE SUR LE BUDGET DE L'ETAT - ORDONNANCE IMPLIQUANT LA SIGNATURE PAR CE MINISTRE D'UN ARRÊTÉ INTERMINISTÉRIEL.

52-02-01 a) En vertu des dispositions combinées des articles 13 et 19 de la Constitution, les ordonnances sont signées par le Président de la République et contresignées par le Premier ministre et, le cas échéant, par « les ministres responsables ». Les ministres responsables sont ceux auxquels incombent, à titre principal, la préparation et l'application des ordonnances dont il s'agit.... ...b) Ni la circonstance, à la supposer établie, que l'ordonnance attaquée aurait des incidences sur le budget de l'Etat, ni celle que le ministre chargé du budget doit être signataire d'un arrêté interministériel d'application de l'ordonnance ne sont de nature à faire regarder ce ministre comme « responsable » au sens de ces dispositions, qualité qui doit être distinguée de celle de « ministre chargé de l'exécution des actes du premier ministre », prévue par l'article 22 de la Constitution.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 fév. 2007, n° 289743
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur ?: M. Alexandre Lallet
Rapporteur public ?: M. Devys
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY ; DE NERVO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:289743.20070226
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award