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28/02/2007 | FRANCE | N°274461

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 28 février 2007, 274461


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 novembre 2004 et 15 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. PIQUANT BUROTIC, dont le siège est rue Arago, ZAC de Ther, à Beauvais (60000) ; la S.A. PIQUANT BUROTIC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 septembre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête aux fins de restitution de l'impôt sur les sociétés, du montant de 215 149 F, qu'elle a acquitté au titre de l'année 1993 ;

2°) statuant au fond, de prononcer la réduction de l'impôt sur les sociét...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 novembre 2004 et 15 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. PIQUANT BUROTIC, dont le siège est rue Arago, ZAC de Ther, à Beauvais (60000) ; la S.A. PIQUANT BUROTIC demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 septembre 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête aux fins de restitution de l'impôt sur les sociétés, du montant de 215 149 F, qu'elle a acquitté au titre de l'année 1993 ;

2°) statuant au fond, de prononcer la réduction de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de son exercice clos le 31 août 1993, à hauteur de la somme de 215 149 F ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil, et, notamment, son article 1844-5 ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Daniel Fabre, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Le Griel, avocat de la S.A. PIQUANT BUROTIC,

- les conclusions de M. Laurent Vallée, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel de Douai que la S.A. PIQUANT BUROTIC, qui avait exercé l'option prévue à l'article 223 A du code général des impôts et la rendant seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et plusieurs sociétés dont elle détenait au moins 95 % du capital, a, le 23 février 1993, décidé la dissolution sans liquidation, entraînant confusion de son patrimoine avec le sien propre en vertu des dispositions de l'article 1844-5 du code civil, de l'une de ces sociétés, la S.A.R.L. Vidéo-Pic Production, dont elle était l'unique associée ; qu'au titre des exercices clos par le groupe le 31 août 1993, la S.A. PIQUANT BUROTIC a, le 30 novembre 1993, déclaré un résultat d'ensemble bénéficiaire, à raison duquel elle a acquitté 215 149 F de droits d'impôt sur les sociétés ; que, par une réclamation du 3 juillet 1995, elle a sollicité la restitution de cette somme, en faisant état d'un résultat d'ensemble rectifié et déficitaire, en conséquence de l'imputation sur son propre résultat d'un mali de confusion de 1 260 098 F, montant de la situation nette comptable négative de la S.A.R.L. Vidéo-Pic Production à la date de sa dissolution ; que, par l'arrêt contre lequel la S.A. PIQUANT BUROTIC se pourvoit, la cour administrative d'appel a jugé que l'administration avait à bon droit rejeté cette réclamation, en accueillant le moyen tiré, devant elle, à titre principal, par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en défense aux conclusions de la requête de la société, de ce que celle-ci avait, en procédant à la dissolution sans liquidation de la S.A.R.L. Vidéo-Pic Production, alors qu'une liquidation judiciaire de cette dernière lui eût conservé le bénéfice de la limitation légale de sa responsabilité au montant de ses apports sans préjudicier à ses intérêts propres, accompli un acte de gestion anormal ;

Considérant qu'en prenant, ainsi qu'en l'espèce l'a fait la S.A. PIQUANT BUROTIC, la décision de dissoudre une société dont toutes les parts sont entre ses mains, fût-ce à charge de devoir répondre de la totalité des dettes contractées par celle-ci envers des tiers en raison de la transmission universelle de patrimoine entraînée par cette dissolution en vertu des dispositions de l'article 1844-5 du code civil, plutôt que de la laisser poursuivre une activité génératrice de pertes jusqu'à la cessation de ses paiements et le dépôt de son bilan, suivi d'une procédure de liquidation judiciaire, une société-mère effectue un choix qui ne peut, en règle générale, être réputé dicté par la recherche d'un autre intérêt que le sien, ni, par suite, constitutif d'un acte de gestion anormal sauf preuve contraire ; qu'il suit de là qu'en statuant comme il a été dit ci-dessus, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une inexacte qualification juridique des faits qui lui étaient soumis ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, la S.A. PIQUANT BUROTIC est fondée à demander que ledit arrêt soit annulé ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Considérant que, lorsqu'une société, dont la situation nette est négative, est dissoute et que son patrimoine est confondu avec celui d'une autre société, celle-ci peut, en principe, déduire de son résultat imposable une charge correspondant au mali qui est résulté de l'intégration dans son bilan des éléments actifs et passifs de celui de la société dissoute ; que la charge ainsi déductible ne saurait, toutefois, être d'un montant supérieur à celui des pertes, concourant à déterminer la situation nette négative de la société dissoute et desquelles est résulté son actif net négatif, qui, fiscalement, pouvaient faire l'objet, de la part de cette dernière, à la date de sa dissolution, d'une imputation sur d'éventuels bénéfices futurs ; que n'entrent pas au nombre de ces pertes les déficits dont le report à nouveau grève la situation nette comptable de la société dissoute, mais qui, soit ne pouvaient plus être imputés sur des bénéfices en raison de l'expiration du délai prévu au I de l'article 209 du code général des impôts en l'espèce applicable, soit ont déjà fait l'objet d'une imputation sur le résultat d'ensemble imposable d'un groupe ayant opté pour le régime d'imposition défini par les articles 223 A à 223 U du même code ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le report à nouveau débiteur, de 1 402 806 F, concourant à déterminer la situation nette comptable, négative de 1 260 098 F, de la S.A.R.L. Vidéo-Pic Production à la date de sa dissolution, le 23 février 1993, correspondait au montant cumulé des pertes subies par elle depuis sa création, le 14 mai 1986, et, notamment, au titre de ses exercices clos du 31 août 1989 au 31 août 1992, dont les déficits ont réduit le résultat d'ensemble du groupe imposable à l'impôt sur les sociétés au nom de la S.A. PIQUANT BUROTIC ; que celle-ci a, dans sa déclaration de résultat d'ensemble initiale du 30 novembre 1993, intégré à ce résultat un bénéfice réalisé par la S.A.R.L. Vidéo-Pic Production au cours de son exercice écoulé du 1er septembre 1992 au 23 février 1993, et sur lequel elle n'allègue pas qu'un déficit antérieur à celui de l'exercice clos le 31 août 1989 avait lieu d'être reporté ; que, dès lors, l'opération de confusion de patrimoines entraînée par la dissolution de la S.A.R.L. Vidéo-Pic Production n'a pu, contrairement à ce que soutient la S.A. PIQUANT BUROTIC, l'autoriser à constater aucune charge fiscalement déductible, se rapportant au mali résulté comptablement de cette confusion ;

Considérant qu'il suit de là que la S.A. PIQUANT BUROTIC n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement dont elle fait appel, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande à fin de restitution de l'impôt sur les sociétés qu'elle a acquitté au titre de l'année 1993 ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la S.A. PIQUANT BUROTIC demande en remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;



D E C I D E :
--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 21 septembre 2004 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la S.A. PIQUANT BUROTIC devant la cour administrative d'appel de Douai et le surplus des conclusions de sa requête devant le Conseil d'Etat sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la S.A. PIQUANT BUROTIC et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 28 fév. 2007, n° 274461
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: M. Daniel Fabre
Rapporteur public ?: M. Vallée
Avocat(s) : SCP LE GRIEL

Origine de la décision
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Date de la décision : 28/02/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 274461
Numéro NOR : CETATEXT000018005360 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-02-28;274461 ?
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