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23/03/2007 | FRANCE | N°297220

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 23 mars 2007, 297220


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 septembre et 20 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Erik A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 22 août 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa requête tendant à la suspension de l'exécution de la décision du préfet de l'Oise en date du 1er juin 2006 lui enjoignant de restituer son permis de conduire ;

2°) statuant comme juge des référés, de suspendre l'ex

cution de cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3.000...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 septembre et 20 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Erik A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 22 août 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa requête tendant à la suspension de l'exécution de la décision du préfet de l'Oise en date du 1er juin 2006 lui enjoignant de restituer son permis de conduire ;

2°) statuant comme juge des référés, de suspendre l'exécution de cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, dont les dispositions sont applicables aux ordonnances du juge des référés en vertu de l'article R. 522-11 du même code, : « La décision mentionne que l'audience a été publique... » ; que l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif d'Amiens, rendue, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, ne comporte pas cette mention dans ces visas ; qu'elle est, par suite, entachée d'irrégularité et doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ;

Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que l'exécution de la décision du préfet de l'Oise en date du 1er juin 2006, enjoignant à M. A de restituer son permis de conduire, porterait une atteinte grave et immédiate à son activité professionnelle de vétérinaire équin, qu'il exerce seul et qui nécessite de nombreux déplacements parfois urgents ne pouvant être effectués que par lui-même au moyen d'un véhicule automobile ; que d'autre part, M. A a commis six infractions au code de la route en sept ans et a, pendant cette période, effectué un stage de sensibilisation à la sécurité routière ; que dès lors, eu égard aux conséquences qu'aurait l'exécution de cette décision sur l'activité professionnelle du demandeur et alors que la suspension de la décision lui enjoignant de restituer son permis n'apparaît pas, dans les circonstances de l'espèce, inconciliable avec les exigences de la sécurité routière, la condition d'urgence fixée à l'article L. 521-1 du code de justice administrative, qui doit s'apprécier objectivement et globalement, est remplie ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 223-3 du code de la route : « Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9 (...) » ; qu'aux termes de l'article R. 223-3 du même code : « Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1 (...) » ; que l'accomplissement de cette formalité substantielle, qui constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre d'en contester la réalité et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis, conditionne la régularité de la procédure suivie et partant, la légalité du retrait de points ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A conteste avoir reçu, à l'occasion de la constatation de chacune des infractions qu'il avait commises, les informations prévues par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que si le ministre de l'intérieur, à qui il appartient de prouver par tout moyen qu'il a satisfait à l'obligation d'information prévue par le code de la route, a produit la copie du procès-verbal relatif aux infractions commises par M. A les 19 avril 2003 et 6 avril 2005, dans lesquels l'intéressé reconnaît avoir été informé du retrait de points encouru, cette preuve n'a pas été rapportée pour les quatre autres infractions ayant donné lieu à retrait de points ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que M. A n'aurait pas reçu les informations requises par le code de la route au moment de la constatation des infractions des 11 septembre 1998, 29 septembre 2000, 23 juin et 25 juin 2004 est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision enjoignant à l'intéressé de restituer son permis de conduire ; qu'il y a lieu, dès lors, de suspendre l'exécution de cette dernière décision ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 22 août 2006 du juge des référés du tribunal administratif d'Amiens est annulée.

Article 2 : L'exécution de la décision du préfet de l'Oise en date du 1er juin 2006 enjoignant à M. A de restituer son permis de conduire est suspendue.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Erik A et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 mar. 2007, n° 297220
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Hubac
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Olson
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 23/03/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 297220
Numéro NOR : CETATEXT000018005846 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-03-23;297220 ?
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