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04/04/2007 | FRANCE | N°291543

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 04 avril 2007, 291543


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mars et 20 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Claudine A demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 janvier 2006 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de proposer sa nomination en qualité de juge de proximité ;

2°) d'enjoindre au garde des sceaux, après avoir recueilli un nouvel avis du Conseil supérieur de la magistrature, de se prononcer à nouveau sur sa ca

ndidature aux fonctions de juge de proximité, dans un délai d'un mois à comp...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mars et 20 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Claudine A demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 janvier 2006 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de proposer sa nomination en qualité de juge de proximité ;

2°) d'enjoindre au garde des sceaux, après avoir recueilli un nouvel avis du Conseil supérieur de la magistrature, de se prononcer à nouveau sur sa candidature aux fonctions de juge de proximité, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à venir, sous astreinte de 100 € par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) d'ordonner, avant dire droit, au garde des sceaux, la communication de l'avis du Conseil supérieur de la magistrature et du procès-verbal de la séance au cours de laquelle cet avis a été adopté ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 modifiée portant loi organique ;

Vu le décret n° 93-21 du 7 janvier 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Stéphane Hoynck, Auditeur,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par une décision en date 24 janvier 2006, le garde des sceaux, ministre de la justice, a fait savoir à Mme A qu'à la suite de l'avis défavorable émis par le Conseil supérieur de la magistrature à l'issue du stage probatoire accompli à la demande de ce dernier, il ne pouvait proposer sa nomination en qualité de juge de proximité ; que Mme A demande l'annulation de cette décision ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 41-19 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : « Les juges de proximité sont nommés pour une durée de sept ans non renouvelable, dans les formes prévues pour les magistrats du siège » ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 28 de la même ordonnance : « les décrets portant (...) nomination aux fonctions de magistrat (...) sont pris par le Président de la République sur proposition du garde des sceaux, ministre de la justice, après avis conforme de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature pour ce qui concerne les magistrats du siège (...) » ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article 41-19 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 : «Avant de rendre son avis, la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature peut décider de soumettre l'intéressé à une formation probatoire organisée par l'Ecole nationale de la magistrature et comportant un stage en juridiction effectué selon les modalités prévues à l'article 19 (...). / Le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature établit, sous forme d'un rapport, le bilan du stage probatoire du candidat, qu'il adresse à la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature et au garde des sceaux, ministre de la justice » ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le garde des sceaux, ministre de la justice ;

Sur la légalité externe de la décision :

Considérant en premier lieu que si Mme A soutient que seule la production d'une copie de l'avis permettrait de vérifier que celui-ci a été rendu dans des conditions de forme et de procédure régulières, elle n'apporte aucune précision quant aux vices de forme ou de procédure qu'une telle production permettrait de révéler ; que ces conclusions à fin d'injonction avant dire droit ne sauraient donc être accueillies ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne faisait obligation au garde des sceaux de joindre une copie de l'avis du Conseil supérieur de la magistrature à la lettre notifiant à Mme A sa décision prise à la suite de cet avis ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'absence de communication de l'avis du Conseil supérieur de la magistrature aurait entaché la décision du garde des sceaux d'un vice de forme ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que la décision du 24 janvier 2006 a été signée par M. Jean-Guirec , chef de service, adjoint au directeur des services judiciaires ; qu'en vertu du décret du 8 juin 2005 portant délégation de signature à la direction des services judiciaires et régulièrement publié, ce dernier disposait d'une délégation pour signer, au nom du garde des sceaux, ministre de la justice, tous arrêtés, actes et décisions ressortissant aux attributions de la direction des services judiciaires, à l'exclusion des décrets ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise par une autorité incompétente doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du l'article 35-7 du décret du 7 janvier 1993, pris pour l'application de l'ordonnance du 22 décembre 1958 « le dossier de candidature, assorti de l'avis motivé des chefs de cour, est transmis au garde des sceaux, ministre de la justice, qui procède, le cas échéant, à une instruction complémentaire du dossier » ; qu'aux termes de l'article 35-8 du même décret, « le garde des sceaux, ministre de la justice, saisit la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du siège des projets de nomination aux fonctions de juge de proximité » ; qu'il ressort des pièces du dossier que le garde des sceaux a, après avoir instruit le dossier de candidature de Mme A, saisi le Conseil supérieur de la magistrature d'un projet de nomination de la requérante aux fonctions de juge de proximité ; que le dossier soumis à l'avis du Conseil supérieur de la magistrature comprenait l'avis motivé des chefs de cour ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise sans qu'il fût tenu compte de ces avis manque en fait ; que si la requérante soutient également que l'avis aurait été entaché d'un défaut d'examen complet des circonstances de l'espèce, elle n'apporte aucune précision permettant d'apprécier le bien fondé de cette allégation ;

Sur la légalité interne de la décision :

Considérant que les dispositions de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ne créent au profit des candidats à une nomination en qualité de juge de proximité aucun droit à être nommés à cette fonction ; qu'il ressort des pièces du dossier que si Mme A dispose d'une formation et d'une expérience dans le domaine juridique, l'intéressée a, durant le stage probatoire qu'elle a effectué, fait preuve d'insuffisances au regard des qualités requises pour l'exercice des fonctions de juge de proximité, qui ont été relevées tant par son maître de stage que par le directeur de centre de stage et par le magistrat délégué à la formation de la cour d'appel de Lyon ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en estimant qu'elle n'était pas apte à exercer les fonctions de juge de proximité, le Conseil supérieur de la magistrature aurait entaché son appréciation d'une erreur manifeste ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les autres conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation de Mme A n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ces conclusions aux fins d'injonction ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions de Mme A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente affaire, la partie perdante, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Claudine A et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 291543
Date de la décision : 04/04/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 avr. 2007, n° 291543
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur ?: M. Stéphane Hoynck
Rapporteur public ?: M. Guyomar
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:291543.20070404
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