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06/04/2007 | FRANCE | N°280665

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 06 avril 2007, 280665


Vu l'ordonnance en date du 12 mai 2005 du président de la cour administrative d'appel de Nancy, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 18 mai 2005, transmettant au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête de la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 8 avril 2005, présentée pour la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL, dont le siège est rue du Rattentout à Dieue-sur-Meuse (55320) ; la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL demande :

1°)

d'annuler le jugement du 8 février 2005 par lequel le tribunal admini...

Vu l'ordonnance en date du 12 mai 2005 du président de la cour administrative d'appel de Nancy, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 18 mai 2005, transmettant au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête de la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 8 avril 2005, présentée pour la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL, dont le siège est rue du Rattentout à Dieue-sur-Meuse (55320) ; la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL demande :

1°) d'annuler le jugement du 8 février 2005 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à une réduction d'un montant de 95 279 euros de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2002 à raison des bâtiments industriels exploités sur le territoire de la commune de Dieue-sur-Meuse et à la condamnation de l'Etat à lui verser les intérêts moratoires ;

2°) statuant au fond, de lui accorder la réduction de l'imposition litigieuse demandée en première instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Sauron, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties, au titre de l'année 2002, dans les rôles de la commune de Dieue-sur-Meuse (Meuse), à raison notamment de bâtiments dont elle était devenue propriétaire par acte du 21 décembre 2001 ; que l'administration a rejeté sa réclamation tendant à un dégrèvement partiel de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties correspondante, décision confirmée par le tribunal administratif de Nancy par jugement du 8 février 2005 ; que la société se pourvoit en cassation contre ce jugement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 1388 et 1499 du code général des impôts, les bases d'imposition correspondant aux immobilisations industrielles assujetties à la taxe foncière sur les propriétés bâties sont constituées, sous déduction de 50 % de son montant, de leur valeur locative cadastrale, évaluée conformément à la méthode comptable décrite à l'article 1499 ; que toutefois, aux termes de l'article 1518 B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : A compter du 1er janvier 1980, la valeur locative des immobilisations corporelles acquises à la suite d'apports, de scissions, de fusions de sociétés ou de cessions d'établissements réalisés à partir du 1er janvier 1976 ne peut être inférieure aux deux tiers de la valeur locative retenue l'année précédant l'apport, la scission, la fusion ou la cession. / (...) Pour les opérations mentionnées au premier alinéa réalisées à compter du 1er janvier 1992, la valeur locative des immobilisations corporelles ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes de son montant avant l'opération... ;

Considérant que, pour retenir l'existence d'une cession d'établissement industriel au sens de l'article 1518 B du code général des impôts précité, le tribunal administratif de Nancy a relevé, d'une part, que la société Hochland France avait cédé à la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL, par acte du 21 décembre 2001, un ensemble de locaux nus, que cette dernière occupait jusque là en tant que locataire et où elle exerçait son activité de fabrication de fromage, et, d'autre part, que la même société Hochland France avait cédé à la même société FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL, le 30 juillet 1999, des équipements de nature à permettre l'exploitation industrielle de ces mêmes bâtiments ; qu'en se fondant, pour déterminer si la cession des murs nus du 21 décembre 2001 était une cession d'établissement industriel au sens des dispositions précitées de l'article 1518 B, sur la circonstance qu'une cession antérieure de 29 mois à celle-ci était intervenue entre les mêmes parties pour des matériels utilisables pour l'exploitation de ces locaux, alors que cette cession était ainsi entièrement distincte de celle soumise à son examen, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que la requérante est, dès lors, fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'il résulte de l'instruction que la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL a acquis, par deux transactions distinctes, effectuées l'une le 30 juillet 1999, l'autre le 21 décembre 2001, d'une part, des équipements industriels, de l'autre, les bâtiments industriels qui les abritaient, auprès de la même société à qui jusqu'alors elle les louait ; que cette seconde transaction, dont il est constant qu'elle n'a porté que sur un ensemble de locaux nus, ne peut en elle-même, pour cette raison, être regardée comme une cession d'établissement au sens des dispositions de l'article 1518 B du code général des impôts précité ; qu'eu égard à l'intervalle de près de deux ans et demi qui les sépare, ni la circonstance que la société requérante ait acquis antérieurement, par la première des deux transactions, le minimum d'équipements nécessaires à l'exploitation des locaux industriels dont la cession était l'objet de la seconde, non plus que la circonstance qu'elle exerçait son activité industrielle avec ces équipements dans ces locaux avant leur acquisition, n'ont d'incidence sur la qualification de cette dernière au regard de ces dispositions ; qu'il suit de là que les locaux en cause doivent être évalués sans faire application de l'article 1518 B du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 1499 du code général des impôts, ainsi que de celles de l'article 310 J bis de l'annexe II à ce code, pris pour son application, que la valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de ces immobilisations, majoré, en ce qui concerne les terrains et les sols, de 3 % pour chaque année écoulée depuis l'entrée de ces biens dans le patrimoine du propriétaire, et minoré, en ce qui concerne les immobilisations autres que les terrains et les sols, de 25 ou de 33,33 % selon que celles-ci ont été acquises ou créées avant ou depuis le 1er janvier 1976, un taux d'intérêt fixé à 8 % pour les terrains et les sols et à 12 % pour les constructions et installations passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que les installations dont l'évaluation est en litige sont constituées exclusivement de bâtiments industriels, qui figurent à l'actif de la société requérante pour un montant de 9 121 957,67 euros et dont l'acquisition a été effectuée à une date postérieure au 1er janvier 1976 ; qu'il suit de là que la valeur locative de ces installations doit être évaluée en appliquant à ce prix de revient, après abattement de 33,33 %, un taux d'intérêt de 12 % ; qu'après abattement de 50 % pour frais et charges mentionné à l'article 1388 du code général des impôts et application d'un taux d'imposition global de 34,97 % résultant des taux votés en 2002 par les collectivités bénéficiaires du produit de l'impôt, la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties due par la société requérante au titre de l'année 2002 à raison des seules installations dont la valeur locative est objet du litige s'élève à 127 604,32 euros ; que, la cotisation mise à sa charge par l'administration à raison de ces mêmes installations s'étant élevée à 215 819 euros, la société est fondée à en demander la décharge à hauteur de 88 214,68 euros ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement d'intérêts moratoires :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal (...) à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires (...). Les intérêts courent du jour du paiement... ; qu'il résulte de ces dispositions que le paiement par l'Etat d'intérêts moratoires sur les sommes déjà perçues des contribuables est de droit ; que le requérant ne saurait alléguer l'existence sur ce point d'aucun litige né et actuel ; qu'il suit de là que les conclusions de sa demande tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement des intérêts moratoires sur les sommes dégrevées sont sans objet, par suite irrecevables, et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme que la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL demande au titre des frais exposés par elle devant le Conseil d'Etat et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, les conclusions présentées par la société sur le fondement de ces mêmes dispositions devant le tribunal administratif, qui n'ont pas été chiffrées, sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 8 février 2005 est annulé.

Article 2 : Il est accordé à la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL décharge de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre de l'année 2002 à raison de ses installations sises à Dieue-sur-Meuse, à hauteur de la somme de 88 214,68 euros.

Article 3 : L'Etat versera à la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL devant le tribunal administratif de Nancy est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la FROMAGERIE HENRI HUTIN SARL et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 280665
Date de la décision : 06/04/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 06 avr. 2007, n° 280665
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Le Roy
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Sauron
Rapporteur public ?: M. Olléon
Avocat(s) : SCP DELVOLVE, DELVOLVE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:280665.20070406
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