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25/04/2007 | FRANCE | N°288415

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 25 avril 2007, 288415


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 décembre 2005 et 24 avril 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Issam A, demeurant chez ...; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 24 octobre 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 17 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 27 août 2002 ordonnant son expulsi

on du territoire national ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler c...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 décembre 2005 et 24 avril 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Issam A, demeurant chez ...; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 24 octobre 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 17 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 27 août 2002 ordonnant son expulsion du territoire national ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler ce jugement et cette décision ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 8 ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Chadelat, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que, pour confirmer le jugement du 17 novembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. A, de nationalité marocaine, tendant à l'annulation de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 27 août 2002 ordonnant son expulsion du territoire national, la cour administrative d'appel de Marseille a, par l'arrêt attaqué du 24 octobre 2005, estimé que l'intéressé n'avait pas, notamment, justifié de son entrée sur le territoire national avant 1985, date de sa scolarisation en France ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et notamment des carnets de vaccination produits par M. A mentionnant sa première vaccination en France le 19 décembre 1978 ainsi que les vaccinations ultérieures effectuées régulièrement chaque année, que l'intéressé était bien présent sur le territoire français avant cette date ; qu'ainsi, la cour administrative d'appel de Marseille a dénaturé les faits de l'espèce ; que, dès lors, M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 24 octobre 2005 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut « régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie » ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant que, par décret du 20 juin 2002, régulièrement publié au Journal officiel de la République française, le ministre de l'intérieur a donné à M. Jean de Croone, administrateur civil, délégation pour signer en son nom les actes, arrêtés et décision relevant de la compétence de la sous-direction des étrangers ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente ;

Considérant que les dispositions de la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers et à la nationalité, sont postérieures à l'arrêté attaqué ; que, par suite, M. A ne peut pas utilement s'en prévaloir ;

Considérant qu'aux termes de l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, relative à l'entrée et au séjour en France des étrangers, applicable à la date de l'arrêté attaqué : « L'expulsion peut être prononcée... b) lorqu'elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, par dérogation à l'article 25 » ; que l'arrêté d'expulsion dont M. A a fait l'objet, le 27 août 2002, ayant été pris sur le fondement de l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 25 de la même ordonnance est inopérant à l'encontre de cet arrêté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité marocaine, s'est rendu coupable entre 1996 et 1999 d'infractions à la législation sur les stupéfiants, d'extorsions de fonds, de séquestration de personne et de port d'armes prohibé, faits pour lesquels il a été condamné par la chambre correctionnelle de la cour d'appel de Besançon le 21 février 2001 à une peine de cinq ans d'emprisonnement ainsi qu'à une interdiction du territoire français ; qu'en estimant, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, du comportement du requérant et des faits pour lesquels il avait été condamné que l'expulsion de M. A constituait une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique, le ministre de l'intérieur n'a pas commis d'erreur de droit ni fait une inexacte application des dispositions précitées du b) de l'article 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant que la mesure d'expulsion de M. A, qui est célibataire et sans enfants, alors même qu'il n'aurait plus d'attaches dans son pays d'origine et qu'il aurait vécu en France quasiment depuis sa naissance, n'a pas, eu égard à l'ensemble de son comportement, et notamment à la gravité et au caractère récent, à la date de l'arrêté attaqué, des faits qui lui sont reprochés, porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l'intéressé et n'a pas ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précèce que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 24 octobre 2005 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : La requête de M. A devant la cour administrative d'appel de Marseille est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Issam A et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 25 avr. 2007, n° 288415
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Catherine Chadelat
Rapporteur public ?: Mme de Silva
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 25/04/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 288415
Numéro NOR : CETATEXT000018006027 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-04-25;288415 ?
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