La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2007 | FRANCE | N°281195

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 16 mai 2007, 281195


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 3 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle Céline A, demeurant ... ; Mlle A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 4 avril 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, d'une part, à la réformation du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 23 mai 2002 en tant qu'il a condamné la commune de Sommières (Gard) à ne lui verser qu'une indemnité de 4.573,47 euros en réparation du préjud

ice qu'elle a subi à la suite de l'accident dont elle a été victime le 26...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 3 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle Céline A, demeurant ... ; Mlle A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 4 avril 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, d'une part, à la réformation du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 23 mai 2002 en tant qu'il a condamné la commune de Sommières (Gard) à ne lui verser qu'une indemnité de 4.573,47 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi à la suite de l'accident dont elle a été victime le 26 juin 1996, et d'autre part, à ce que la commune de Sommières soit condamnée à lui verser la somme de 60.130,28 euros ;

2°) statuant au fond, de condamner la commune de Sommières à lui verser la somme de 60.130,28 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 1988 et capitalisation desdits intérêts ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Sommières la somme de 5.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,

- les observations de Me Balat, avocat de Mlle A et de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la commune de Sommières,

- les conclusions de M. Didier Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : « Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement... en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué... » ;

Considérant qu'après avoir estimé que le tribunal administratif de Montpellier avait pu, sans entacher son jugement d'irrégularité, faire application des dispositions des articles R. 711-2 et R. 613-2 du code de justice administrative, pour écarter le mémoire produit tardivement par Mlle A dans lequel celle-ci avait majoré ses prétentions indemnitaires, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté ces mêmes conclusions indemnitaires comme présentées pour la première fois en appel ; qu'il est constant que la cour a relevé d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité de telles conclusions sans avoir informé les parties avant la séance de jugement que son arrêt pouvait être fondé sur ce moyen et sans les avoir invitées à présenter leurs observations sur ce moyen ; que, par suite, Mlle A est fondée à soutenir que l'arrêt attaqué, qui a été rendu en méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-7 précité, est entaché d'irrégularité et doit être annulé ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut « régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie » ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : « Toute partie est avertie, par une notification faite conformément aux articles R. 611-3 ou R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. / Dans les deux cas, l'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience. Toutefois, en cas d'urgence, ce délai peut être réduit à deux jours par une décision expresse du président de la formation de jugement qui est mentionnée sur l'avis d'audience... » ; qu'aux termes de l'article R. 611-3 dudit code « ...les notifications... des avis d'audience... sont obligatoirement effectuées au moyen de lettres recommandées avec demande d'avis de réception... » ; que l'audience du tribunal administratif de Montpellier ayant été fixée au 6 mai 2002, l'avis devait être notifié aux parties 7 jours avant la séance, soit au plus tard le 28 avril 2002 ; que la notification qui a été adressée à Mlle A lui est parvenue le 29 avril 2002 ; que par suite, le jugement attaqué doit être annulé comme intervenu sur une procédure irrégulière ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mlle A devant le tribunal administratif de Montpellier tendant à la réparation de son préjudice ;

Considérant que Mlle A, qui était élève au moment de l'accident, n'a subi aucune perte de revenus pendant son incapacité temporaire totale ; que les frais médicaux et d'hospitalisation consécutifs à son accident se sont élevés à la somme non contestée de 3.942,24 euros ; que l'intéressée, qui demeure atteinte de séquelles légères à la main droite et d'une hypoacousie entraînant une invalidité permanente partielle de 13% subit de ce fait des troubles dans ses conditions d'existence qui peuvent être évalués à 20.000 euros, dont la moitié au titre de l'atteinte à l'intégrité physique ; qu'il sera fait une juste appréciation de son préjudice esthétique et de ses souffrances physiques en les évaluant à 5.000 euros ; qu'en revanche Mlle A ne justifie, ni d'un préjudice d'agrément, ni d'une perte de chance professionnelle lui ouvrant droit à réparation ; que le préjudice total subi par Mlle A s'élève en conséquence à 28.942,24 euros dont 13.942,24 euros au titre de l'atteinte à l'intégrité physique ;

Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard :

Considérant que la caisse a droit au remboursement de la somme de 3.942,24 euros et de la somme de 760 euros qu'elle demande en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, sous réserve des sommes qui lui ont été versées en application du jugement annulé ;

Sur les droits de Mlle A :

Considérant que Mlle A a droit à une indemnité de 25.000 euros sous réserve des sommes qui lui ont déjà été versées en application du jugement annulé ; que cette somme portera intérêts à compter du 9 mars 1998 ; que la capitalisation a été demandée le 6 juin 2005 ; qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les frais d'expertise ;

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Sommières les frais de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif de Montpellier taxés et liquidés à la somme de 533,57 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mlle A, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la commune de Sommières au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la commune de Sommières une somme de 6.000 euros au titre des frais exposés par Mlle A devant le Conseil d'Etat et les juges du fond et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 4 avril 2005 et le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 23 mai 2002 sont annulés.

Article 2 : La commune de Sommières est condamnée à verser à Mlle A la somme de 25.000 euros assortie des intérêts légaux à compter du 9 mars 1998, sous réserve des sommes qui ont été versées en application du jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 23 mai 2002. Les intérêts échus le 6 juin 2005 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : La commune de Sommières est condamnée à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Gard la somme de 4.702,24 euros, sous réserve des sommes qui lui ont été versées en application du jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 23 mai 2002.

Article 4 : Les frais de l'expertise d'un montant de 533,57 euros sont mis à la charge de la commune de Sommières.

Article 5 : La commune de Sommières versera la somme de 6.000 euros à Mlle A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions de la commune de Sommières tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle A est rejeté.

Article 8 : La présente décision sera notifiée à Mlle Céline A, à la commune de Sommières, à la caisse primaire d'assurance maladie du Gard et au ministre de la santé et des solidarités.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 281195
Date de la décision : 16/05/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 mai. 2007, n° 281195
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Chauvaux
Avocat(s) : BALAT ; SCP BARADUC, DUHAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:281195.20070516
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award