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30/05/2007 | FRANCE | N°283888

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 30 mai 2007, 283888


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 août 2005 et 8 décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude A, demeurant ... et la SOCIETE A SA, dont le siège est ..., représentée par son président en exercice ; M. A et la SOCIETE A SA demandent au Conseil d'Etat :

1° d'annuler la décision en date du 21 avril 2005 par laquelle la deuxième section de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a prononcé un blâme à l'encontre de la SOCIETE A SA et une sanction pécuniaire de 50 000

euros à l'encontre de M. A ;

2° de mettre à la charge de l'Etat le versem...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 août 2005 et 8 décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Claude A, demeurant ... et la SOCIETE A SA, dont le siège est ..., représentée par son président en exercice ; M. A et la SOCIETE A SA demandent au Conseil d'Etat :

1° d'annuler la décision en date du 21 avril 2005 par laquelle la deuxième section de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a prononcé un blâme à l'encontre de la SOCIETE A SA et une sanction pécuniaire de 50 000 euros à l'encontre de M. A ;

2° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code monétaire et financier ;

Vu le règlement général du conseil des marchés financiers ;

Vu la décision n° 99-07 du 15 septembre 1999 du conseil des marchés financiers ;

Vu la décision n° 2000-04 du 30 août 2000 du conseil des marchés financiers ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand Dacosta, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. A et de la SOCIÉTÉ A SA,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que le rapporteur de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers ait rédigé un second rapport en réplique aux observations en défense présentées par M. et la SOCIETE SA et ait communiqué un tel document aux membres de la commission ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'auraient été méconnus les droits de la défense manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de la décision attaquée que M. a été sanctionné en tant que président de la SOCIETE SA ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée, en s'abstenant de préciser le rôle propre de M. A dans la commission des infractions reprochées à la SOCIETE SA, aurait été insuffisamment motivée et aurait méconnu le principe de la personnalité des peines doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 4-1-35-1 du règlement général du conseil des marchés financiers et de la décision n° 2000-04 du conseil des marchés financiers en date du 30 août 2000, alors applicables, que lorsqu'un donneur d'ordre à règlement ou livraison différés n'a pas, dans le délai requis, constitué ou complété la couverture exigée, le prestataire habilité procède à la liquidation partielle ou totale de ses engagements ou positions ; que si le prestataire et le donneur d'ordre peuvent convenir des modalités de cette liquidation, les textes applicables excluent le maintien d'une position insuffisamment couverte ; qu'en sanctionnant la SOCIETE SA et M. pour avoir accepté le maintien de comptes présentant un solde débiteur, la commission des sanctions n'a donc pas entaché sa décision, qui est suffisamment motivée sur ce point, d'erreur de droit ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que certains des clients de la SOCIETE SA ont pu continuer à intervenir sur le marché alors que leur couverture était insuffisante ; qu'ainsi, la commission des sanctions ne s'est pas fondée sur des faits inexacts pour estimer que la société avait méconnu l'article 10 de la décision n° 99-07 du 15 septembre 1999 du conseil des marchés financiers relative aux transmissions d'ordres de bourse par internet, qui prévoit l'obligation pour le prestataire de mettre en place un système permettant le blocage des ordres en cas d'insuffisance de couverture ;

Considérant, en cinquième lieu, que si l'article L. 622-17 du code monétaire et financier, dans sa rédaction alors en vigueur, limitait, en l'absence de profits personnels, à un montant de 60 000 euros la sanction pécuniaire susceptible d'être infligée à une personne physique, la sanction de 50 000 euros prononcée en l'espèce à l'encontre de M. A par la commission des sanctions, qui a suffisamment motivé sa décision sur ce point, ne saurait être regardée comme disproportionnée, eu égard à la gravité des manquements commis par la SOCIETE SA et son président, qui étaient de nature à porter atteinte tant au fonctionnement du marché qu'à la situation des donneurs d'ordre ;

Considérant, enfin, que les requérants soutiennent que la commission des sanctions aurait méconnu le principe « non bis in idem », tel qu'il est consacré par les dispositions combinées des articles L. 621-15 et L. 613-21 du code monétaire et financier , en les sanctionnant pour des faits identiques à ceux ayant déjà donné lieu à une sanction prononcée par la commission bancaire le 17 février 2004 ;

Considérant que le moyen est, s'agissant de M. , inopérant, dès lors que la commission bancaire n'a, par cette décision, prononcé une sanction qu'à l'encontre de la SOCIETE SA ;

Considérant que la commission bancaire a sanctionné la SOCIETE SA pour avoir, en méconnaissance des articles 4 et 5 du règlement n° 98-05 du comité de la réglementation bancaire et financière relatif aux opérations de crédit des entreprises d'investissement, accepté le maintien, au-delà des délais prévus par ces dispositions, de soldes espèces négatifs sur les comptes de certains de ses clients intervenant sur le marché à règlement différé et reportant d'un mois boursier sur l'autre leurs positions, sans limitation dans le temps, ni accord exprès entre le prestataire d'investissement et sa clientèle, ni tentative de recouvrement ; que la commission des sanctions a, pour sa part, sanctionné la SOCIETE SA au motif que de telles pratiques méconnaissaient l'article 4 -1-35-1 du règlement général du conseil des marchés financiers ;

Considérant que si les articles L. 613-21 et L. 621-15 du code monétaire et financier, relatifs respectivement aux pouvoirs de sanction de la commission bancaire et de la commission des sanctions de l'autorité des marchés financiers, réservent chacun les compétences de l'autre autorité, ils ne font aucunement obstacle à ce que les mêmes faits, dès lors qu'ils constituent des infractions distinctes au droit bancaire, d'une part, et au droit des marchés financiers, d'autre part, soient sanctionnés par l'une et l'autre de ces autorités au titre de leurs compétences propres ; qu'ainsi le moyen tiré de la violation du principe « non bis in idem » ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et la SOCIETE SA ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision attaquée ; que leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par l'Autorité des marchés financiers ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. et de la SOCIETE SA est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Autorité des marchés financiers tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Claude A, à la SOCIETE A SA, à l'Autorité des marchés financiers, à M. Alain Ghandour et au ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 30 mai. 2007, n° 283888
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Bertrand Dacosta
Rapporteur public ?: M. Guyomar
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY

Origine de la décision
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Date de la décision : 30/05/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 283888
Numéro NOR : CETATEXT000020374505 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-05-30;283888 ?
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