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05/06/2007 | FRANCE | N°303525

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 05 juin 2007, 303525


Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES, dont le siège social est 10, rue Hagueneau, à Strasbourg (67000), représentée par Mlle Marion A ; l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 mars 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'arrêté du 28 novembre 2006 du préfet de la Drôme classant

dans la catégorie des « nuisibles » différents animaux dans le départem...

Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES, dont le siège social est 10, rue Hagueneau, à Strasbourg (67000), représentée par Mlle Marion A ; l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 mars 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'arrêté du 28 novembre 2006 du préfet de la Drôme classant dans la catégorie des « nuisibles » différents animaux dans le département de la Drôme pour l'année 2007, en tant que cette ordonnance a rejeté ses conclusions dirigées contre la prorogation de la période de destruction à tir du geai des chênes au-delà du 31 mars ;

2°) statuant en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée et d'ordonner la suspension de l'arrêté du 28 novembre 2006 du préfet de la Drôme en tant qu'il autorise la prorogation de la période de destruction à tir du geai des chênes au-delà du 31 mars ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand Dacosta, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Ricard, avocat de l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES, et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la Fédération nationale des chasseurs de la Drôme,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;


Sur l'intervention de la Fédération départementale des chasseurs de la Drôme :

Considérant que la Fédération départementale des chasseurs de la Drôme a intérêt au maintien des dispositions contestées ; qu'ainsi son intervention est recevable ;

Sur les conclusions de la requête de l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES tendant à l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble :

Considérant que par un arrêté du 28 novembre 2006, le préfet de la Drôme a classé dans la catégorie des « nuisibles » différents animaux, dans le département, pour l'année 2007 ; que l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Grenoble de suspendre l'exécution de diverses dispositions de cet arrêté ; que si le juge des référés, par une ordonnance en date du 2 mars 2007, a partiellement fait droit à cette demande, il a, en revanche, rejeté les conclusions tendant à la suspension des dispositions prorogeant la période de destruction à tir du geai des chênes au-delà du 31 mars 2007, jusqu'au 10 juin, dans deux communes du département ; que l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES se pourvoit contre l'ordonnance du 2 mars 2007 en tant qu'elle a rejeté ces conclusions ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant que l'article R. 427-6 du code de l'environnement donne compétence au ministre chargé de la chasse pour fixer la liste des animaux susceptibles d'être classés nuisibles en application de l'article L. 427-8 du même code ; que l'arrêté ministériel du 30 septembre 1988, pris pour l'application de ces dispositions, mentionne le geai des chênes parmi les espèces susceptibles d'être classées parmi les espèces nuisibles ; que l'article R. 427-7 du code de l'environnement confie au préfet le soin de fixer, dans chaque département, en fonction de la situation locale, la liste des espèces d'animaux nuisibles, au regard de l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques, de la prévention des dommages aux activités agricoles, forestières et aquacoles et de la protection de la flore et de la faune ; que, toutefois, aux termes de l'article R. 427-21 du même code : « La période de destruction à tir des animaux nuisibles doit être comprise entre la date de clôture générale de la chasse et le 31 mars au plus tard » ; que si l'article R. 427-22 prévoit que le préfet peut, par arrêté motivé, déroger à ces dernières dispositions pour certaines espèces dont il fixe la liste, il ressort des termes mêmes de cette liste que le geai des chênes n'y figure pas ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en estimant que le moyen tiré de ce que le préfet de la Drôme, en prorogeant la période de destruction à tir du geai des chênes du 31 mars au 10 juin 2007 dans deux communes du département, avait méconnu les dispositions de l'article R. 427-21 du code de l'environnement, n'était pas, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a entaché son ordonnance d'erreur de droit ; que l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES est fondée à demander, pour ce motif, l'annulation de l'ordonnance en tant qu'elle rejette ses conclusions tendant à la suspension de ces dispositions ;

Considérant qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant que la prorogation de la période de destruction du geai des chênes a un champ d'application temporel et géographique réduit ; que cette destruction est, en outre, soumise à des conditions très restrictives, et, notamment, à une autorisation individuelle du préfet pour les particuliers ; que les effectifs de geais des chênes nicheurs dans le département s'élèvent à plus de dix mille couples ; qu'ainsi, la mesure contestée ne porte pas une atteinte grave et immédiate aux intérêts défendus par l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES ; que, par suite, la condition d'urgence prévue par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES n'est pas fondée à demander la suspension des dispositions contestées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; que doivent être également rejetées les conclusions présentées au même titre par la Fédération départementale des chasseurs de la Drôme, qui n'a pas la qualité de partie à l'instance ;


D E C I D E :
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Article 1er : L'intervention de la Fédération départementale des chasseurs de la Drôme est admise.

Article 2 : L'ordonnance du 2 mars 2007 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble est annulée en tant qu'elle rejette la demande de l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES tendant à la suspension des dispositions de l'arrêté du 28 novembre 2006 du préfet de la Drôme prorogeant la période de destruction à tir du geai des chênes au-delà du 31 mars.

Article 3 : La demande de suspension des dispositions de l'arrêté du 28 novembre 2006 du préfet de la Drôme prorogeant la période de destruction à tir du geai des chênes au-delà du 31 mars présentée devant le tribunal administratif de Grenoble par l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES, ainsi que les conclusions présentées tant devant ce tribunal que devant le Conseil d'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de la Fédération départementale des chasseurs de la Drôme tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES, au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, au préfet de la Drôme et à la Fédération départementale des chasseurs de la Drôme.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

AGRICULTURE - CHASSE ET PÊCHE - CHASSE - RÉGLEMENTATION - ARRÊTÉ CLASSANT DIFFÉRENTS ANIMAUX DANS LA CATÉGORIE DES NUISIBLES DANS UN DÉPARTEMENT POUR L'ANNÉE - DISPOSITIONS PROROGEANT LA PÉRIODE DE DESTRUCTION À TIR DU GEAI DES CHÊNES - RÉFÉRÉ-SUSPENSION - URGENCE (ART - L - 521-1 DU CJA) - CRITÈRES - CHAMP D'APPLICATION TEMPOREL ET GÉOGRAPHIQUE DE LA MESURE - CONDITIONS MISES À LA DESTRUCTION ET EFFECTIF DES ANIMAUX DANS LE DÉPARTEMENT - ABSENCE D'ATTEINTE GRAVE ET IMMÉDIATE AUX INTÉRÊTS DÉFENDUS PAR LA SOCIÉTÉ REQUÉRANTE [RJ1].

03-08-005 Pour apprécier l'urgence à suspendre un arrêté prorogeant la période de destruction d'un animal nuisible, le juge des référés tient compte du champ d'application temporel et géographique de la mesure, des conditions mises à cette destruction et des effectifs de l'animal dans le département. En l'espèce, la mesure dont la suspension est demandée ne porte pas une atteinte grave et immédiate aux intérêts défendus par l'association requérante dès lors que la prorogation de la période de destruction du geai des chênes a un champ d'application temporel et géographique réduit, que cette destruction est, en outre, soumise à des conditions très restrictives, et, notamment, à une autorisation individuelle du préfet pour les particuliers et enfin, que les effectifs de geais des chênes nicheurs dans le département s'élèvent à plus de dix mille couples. Par suite, la condition d'urgence prévue par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie.

PROCÉDURE - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ SUSPENSION (ART - L - 521-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - CONDITIONS D'OCTROI DE LA SUSPENSION DEMANDÉE - URGENCE - ABSENCE - ARRÊTÉ CLASSANT DIFFÉRENTS ANIMAUX DANS LA CATÉGORIE DES NUISIBLES DANS UN DÉPARTEMENT POUR L'ANNÉE - DISPOSITIONS PROROGEANT LA PÉRIODE DE DESTRUCTION À TIR DU GEAI DES CHÊNES - CRITÈRES - CHAMP D'APPLICATION TEMPOREL ET GÉOGRAPHIQUE DE LA MESURE - CONDITIONS MISES À LA DESTRUCTION ET EFFECTIF DES ANIMAUX DANS LE DÉPARTEMENT - ABSENCE D'ATTEINTE GRAVE ET IMMÉDIATE AUX INTÉRÊTS DÉFENDUS PAR LA SOCIÉTÉ REQUÉRANTE [RJ1].

54-035-02-03-02 Pour apprécier l'urgence à suspendre un arrêté prorogeant la période de destruction d'un animal nuisible, le juge des référés tient compte du champ d'application temporel et géographique de la mesure, des conditions mises à cette destruction et des effectifs de l'animal dans le département. En l'espèce, la mesure dont la suspension est demandée ne porte pas une atteinte grave et immédiate aux intérêts défendus par l'association requérante dès lors que la prorogation de la période de destruction du geai des chênes a un champ d'application temporel et géographique réduit, que cette destruction est, en outre, soumise à des conditions très restrictives, et, notamment, à une autorisation individuelle du préfet pour les particuliers et enfin, que les effectifs de geais des chênes nicheurs dans le département s'élèvent à plus de dix mille couples. Par suite, la condition d'urgence prévue par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 05 jui. 2007, n° 303525
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur ?: M. Bertrand Dacosta
Rapporteur public ?: M. Guyomar
Avocat(s) : RICARD ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Date de la décision : 05/06/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 303525
Numéro NOR : CETATEXT000018006644 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-06-05;303525 ?
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