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18/06/2007 | FRANCE | N°301568

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 18 juin 2007, 301568


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 et 28 février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Claude B, demeurant ... ; M. et Mme B demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 29 janvier 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 septembre 2006 du maire de la commune de Bandol (Var) accordant à M. Pierre A un permis de construire ;

2°) statuant en référé, d'ordonner

la suspension de l'exécution de l'arrêté litigieux ;

3°) de mettre à la charge d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 et 28 février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Claude B, demeurant ... ; M. et Mme B demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 29 janvier 2007 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 septembre 2006 du maire de la commune de Bandol (Var) accordant à M. Pierre A un permis de construire ;

2°) statuant en référé, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté litigieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bandol et de M. A le versement d'une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine de Salins, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. et Mme B et de la SCP Gatineau, avocat de la commune de Bandol,

- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : « L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence » ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 522-1 du même code : « Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale » ; qu'enfin, en vertu des dispositions de l'article R. 522-8 du même code : « L'instruction est close à l'issue de l'audience, à moins que le juge des référés ne décide de différer la clôture de l'instruction à une date postérieure dont il avise les parties par tous moyens. Dans ce dernier cas, les productions complémentaires déposées après l'audience et avant la clôture de l'instruction peuvent être adressées directement aux autres parties, sous réserve, pour la partie qui y procède, d'apporter au juge la preuve de ses diligences (...) » ;

Considérant que si ces dispositions permettent que les modalités de communication aux parties des pièces et mémoires produits dans l'instance soient adaptées aux exigences de l'urgence et qu'en particulier, lorsque le juge des référés décide de différer la clôture de l'instruction à une date postérieure à celle de l'audience, les parties communiquent directement aux autres parties leurs productions complémentaires, le juge des référés ne saurait, sans porter atteinte au caractère contradictoire de l'instruction, fonder sa décision sur un élément avancé par l'une des parties et qui n'aurait pu faire l'objet d'aucune discussion par l'autre ;

Considérant qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier qu'à l'issue de l'audience du 8 janvier 2007 consacrée à l'examen de la demande présentée par M. et Mme B tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 septembre 2006 du maire de Bandol accordant un permis de construire, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a différé la clôture de l'instruction jusqu'au 15 janvier pour permettre aux parties de présenter, le cas échéant, des observations complémentaires et a précisé que ces observations devraient être adressées directement par leurs soins aux autres parties, sous réserve de justifier de ces transmissions devant le tribunal ; que, pour ne pas regarder comme de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité du permis de construire litigieux le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UA 3 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Bandol relatif aux accès et à la voirie desservant la construction autorisée, le juge des référés s'est fondé non seulement sur le procès-verbal d'un agent de la police municipale mais aussi sur les six photographies qui l'accompagnaient, ces documents ayant été produits par la commune de Bandol en pièces jointes à un mémoire adressé au tribunal après l'audience mais avant la clôture de l'instruction ; que, toutefois, alors que M. et Mme B contestaient expressément que l'intégralité des pièces jointes leur ait été adressée directement par la commune et qu'ils mettaient en particulier en cause l'absence de transmission des photographies, le juge des référés s'est borné à mentionner, dans les visas de son ordonnance, que la commune de Bandol avait justifié devant le tribunal de l'envoi direct à M. et Mme B « de la note en délibéré » et, dans les motifs, que l'exemplaire « faxé au tribunal » comportait les clichés photographiques ; que la réalité de la communication des photographies à M. et Mme B n'étant pas davantage établie par les pièces du dossier soumis au juge des référés, ces derniers sont fondés à soutenir que l'ordonnance attaquée est intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 5 et L. 522-1 du code de justice administrative et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par M. et Mme B ;

Considérant, d'une part, que, eu égard au caractère difficilement réversible de travaux autorisés par un permis de construire, la condition d'urgence doit, en principe, être regardée comme remplie lorsque les travaux vont commencer ou ont déjà commencé sans être pour autant achevés ; qu'il peut, toutefois, en aller autrement au cas où le pétitionnaire ou l'autorité qui a délivré le permis justifie de circonstances particulières ; qu'en l'espèce, il n'est fait état d'aucune circonstance de nature à faire obstacle à la constatation que la condition d'urgence est remplie ;

Considérant, d'autre part, que le moyen tiré de ce que la location de places de stationnement dans un garage privé ne permettrait pas de satisfaire aux obligations relatives à la réalisation d'aires de stationnement prévues par les articles UA 12 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Bandol et L. 421-3 du code de l'urbanisme est de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité du permis de construire litigieux ; qu'en revanche, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens invoqués par M. et Mme B et tirés de la fraude quant à la qualité du demandeur du permis de construire, du caractère incomplet du dossier de demande de permis de construire au regard des prescriptions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, des incertitudes sur le nombre d'aires de stationnement à réaliser et de la méconnaissance des dispositions de l'article UA 3 du règlement du plan d'occupation des sols relatives à l'accès et à la voirie, ne paraissent pas de nature à faire naître un tel doute ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de faire droit à la demande de M. et Mme B et de suspendre l'exécution de l'arrêté du 25 septembre 2006 du maire de Bandol ;

Considérant, enfin, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme B, qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la commune de Bandol demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bandol et de M. A le versement par chacun à M. et Mme B d'une somme de 1 000 euros à ce titre ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du 29 janvier 2007 du juge des référés du tribunal administratif de Nice est annulée.

Article 2 : L'exécution de l'arrêté du 25 septembre 2006 du maire de Bandol est suspendue.

Article 3 : La commune de Bandol et M. A verseront chacun à M. et Mme B une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Bandol au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Claude B, à M. Pierre A et à la commune de Bandol.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 301568
Date de la décision : 18/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 18 jui. 2007, n° 301568
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme Catherine de Salins
Rapporteur public ?: M. Derepas
Avocat(s) : SCP BACHELLIER, POTIER DE LA VARDE ; SCP GATINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:301568.20070618
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