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27/06/2007 | FRANCE | N°297531

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 27 juin 2007, 297531


Vu, 1°, sous le n° 297531, la requête, enregistrée le 19 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS, dont le siège est 67, rue de Seine à Alfortville (94140) ; l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2006-880 du 17 juillet 2006 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par les articles L. 214-1 à L. 214-8 du code de l'environnement pour la

protection de l'eau et des milieux aquatiques ou, à titre subsidiaire,...

Vu, 1°, sous le n° 297531, la requête, enregistrée le 19 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS, dont le siège est 67, rue de Seine à Alfortville (94140) ; l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2006-880 du 17 juillet 2006 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par les articles L. 214-1 à L. 214-8 du code de l'environnement pour la protection de l'eau et des milieux aquatiques ou, à titre subsidiaire, les articles 33 et 34 de ce décret ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 2°, sous le n° 297532, la requête, enregistrée le 19 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS, dont le siège est 67, rue de Seine à Alfortville (94140) ; l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2006-881 du 17 juillet 2006 modifiant le décret n° 93-743 du 29 mars 1993 relatif à la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration en application de l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau et le décret n° 94-354 du 29 avril 1994 relatif aux zones de répartition des eaux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, 3°, sous le n° 297687, la requête, enregistrée le 25 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS, dont le siège est 67, rue de Seine à Alfortville (94140) ; l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2006-942 du 27 juillet 2006 modifiant la nomenclature des installations classées ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu, sous le n° 297532, la note en délibéré, enregistrée le 4 juin 2007, présentée par le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables ;

Vu, sous le n° 297687, la note en délibéré, enregistrée le 5 juin 2007, présentée par le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables ;

Vu la Constitution, et notamment son Préambule et son article 38 ;

Vu la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 ;

Vu la directive 2006/11/CE du 15 février 2006 ;

Vu le protocole du 7 novembre 1996 à la convention de Londres du 29 décembre 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 2004-13434 du 9 décembre 2004 ;

Vu la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006, et notamment son article 12 ;

Vu l'ordonnance n° 2005-805 du 18 juillet 2005 ;

Vu le décret n° 53-578 du 20 mai 1953 ;

Vu le décret n° 93-743 du 29 mars 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand Dacosta, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les trois requêtes de l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de statuer par une seule décision ;

Considérant qu'aux termes de l'article 50 de la loi de simplification du droit du 9 décembre 2004 : Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, en matière de police de l'eau et de police de la pêche et du milieu aquatique, les dispositions nécessaires pour : (...) 4° Simplifier les procédures de demande d'autorisation applicables, en vertu des articles L. 214-1 à L. 214-6 (du code de l'environnement), aux opérations connexes ou relevant d'une même activité ; 5° Simplifier, harmoniser et adapter les procédures d'autorisation au titre de la police de l'eau, de la police de la pêche et en matière d'immersion, ainsi que le régime contentieux qui leur est applicable ;

Considérant que sur le fondement de ces dispositions, l'ordonnance du 18 juillet 2005 portant simplification, harmonisation et adaptation des polices de l'eau et des milieux aquatiques, de la pêche et de l'immersion des déchets a procédé à diverses modifications de la partie législative du code de l'environnement afin, notamment, d'instituer un droit d'opposition de l'autorité administrative pour les installations, ouvrages, travaux et activités qui, au titre de la police de l'eau, ne sont soumis qu'à un régime déclaratif, et de simplifier le régime applicable aux piscicultures en supprimant le régime d'autorisation spécifique qui leur était applicable au titre de la police de la pêche ;

Considérant qu'en application de cette ordonnance, ont été pris d'abord le décret n° 2006-880 du 17 juillet 2006 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par les articles L. 214-1 à L. 214-8 du code de l'environnement pour la protection de l'eau et des milieux aquatiques, ensuite le décret n° 2006-881 du 17 juillet 2006, modifiant tant le décret n° 93-743 du 29 mars 1993 relatif à la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration en application de l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau que le décret n° 94-354 du 29 avril 1994 relatif aux zones de répartition des eaux, et enfin le décret n° 2006-942 du 27 juillet 2006 modifiant la nomenclature des installations classées ; que l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS demande l'annulation pour excès de pouvoir de ces trois décrets ;

Sur la requête n° 297531, dirigée contre le décret n°2006-880 du 17 juillet 2006 :

Considérant que si l'association requérante déclare contester l'ensemble de ce décret, les moyens qu'elle invoque ne concernent que certaines dispositions figurant aux articles 33 et 34 du décret, qui abrogent différents articles de la partie réglementaire du code de l'environnement ; que ces dispositions ont pour seul objet de tirer les conséquences de l'abrogation, par l'article 7 de l'ordonnance du 18 juillet 2005, du régime d'autorisation des piscicultures au titre de la police de la pêche antérieurement prévu par l'article L. 431-6 du code de l'environnement et de celle, par son article 22, des régimes d'autorisation de travaux dans le lit d'un cours d'eau et de vidange antérieurement prévus par les articles L. 432-3 et L. 432-9 ;

Considérant que, dès lors que sa ratification est opérée par le législateur, une ordonnance acquiert valeur législative à compter de sa signature ; que l'ordonnance du 18 juillet 2005 a été ratifiée par l'article 12 de la loi du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions réglementaires contestées seraient privées de base légale, au motif que l'ordonnance aurait excédé le champ de l'habilitation ouverte par l'article 50 de la loi du 9 décembre 2004, ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, l'abrogation des divers régimes d'autorisation en cause résulte de l'ordonnance du 18 juillet 2005 elle-même ; qu'il n'appartient pas au juge administratif de statuer sur la conformité d'une disposition législative à la Constitution ; que la ratification de l'ordonnance du 28 juillet 2005 fait dès lors obstacle à ce que soit examiné le moyen tiré de ce que cette abrogation méconnaîtrait l'article 7 de la Charte de l'environnement ;

Considérant que l'association requérante soutient, en outre, que l'ordonnance du 18 juillet 2005 serait incompatible, d'une part, avec la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets sur l'environnement et, d'autre part, avec l'article 6 de la directive 2006/11/CE du 15 février 2006 concernant la pollution causée par certaines substances dangereuses déversées dans le milieu aquatique de la Communauté ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 2 de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 : Les Etats membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l'octroi de l'autorisation, les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une procédure de demande d'autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences. Ces projets sont définis à l'article 4 ; que l'article 4 de la directive soumet à une évaluation les projets énumérés à son annexe I ; que, s'agissant des projets énumérés à son annexe II, il renvoie aux Etats membres le soin de déterminer, sur la base soit d'un examen au cas par cas, soit de seuils ou de critères qu'ils définissent, si le projet doit être soumis à une évaluation, en tenant compte des critères de sélection pertinents fixés à son annexe III ; que l'annexe II de la directive mentionne, à son point 1. f), la pisciculture intensive ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 6 de la directive 2006/11/CE du 15 février 2006, qui s'est substituée à la directive 76/464/CEE du Conseil du 4 mai 1976 dont elle reprend sur ce point les termes de l'article 7 : 1. Afin de réduire la pollution des eaux visées à l'article 1er par les substances relevant de la liste II, les États membres arrêtent des programmes pour l'exécution desquels ils appliquent notamment les moyens visés aux paragraphes 2 et 3./ 2. Tout rejet effectué dans les eaux visées à l'article 1er et susceptible de contenir une des substances relevant de la liste II est soumis à une autorisation préalable, délivrée par l'autorité compétente de l'Etat membre concerné et fixant les normes d'émission. Celles-ci sont calculées en fonction des normes de qualité environnementale établies conformément au paragraphe 3./ 3. Les programmes visés au paragraphe 1 comprennent des normes de qualité environnementale pour les eaux, établies dans le respect des directives du Conseil lorsqu'elles existent. (...) ; que parmi les substances mentionnées dans la liste II figurent, au point 8, l'ammoniaque et les nitrites, dont l'association requérante soutient, sans être contredite, qu'ils sont présents dans les rejets de pisciculture ;

Considérant, toutefois, que l'ordonnance du 28 juillet 2005, si elle a procédé à l'abrogation du régime particulier d'autorisation des piscicultures au titre de la police de la pêche, n'a, par elle-même, aucunement modifié le régime applicable aux piscicultures au titre de la police de l'eau ou de la police des installations classées pour la protection de l'environnement ; que le moyen tiré de son incompatibilité avec les directives des 27 juin 1985 et 15 février 2006 ne saurait, par suite, être utilement invoqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS n'est pas fondée à demander l'annulation du décret n° 2006-880 du 17 juillet 2006 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les requêtes n° 297532 et 297687, dirigées respectivement contre le décret n°2006-881 du 17 juillet 2006 et contre le décret du 27 juillet 2006 :

Considérant que le décret n° 2006-881 du 17 juillet 2006 procède, notamment, à une refonte de la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration au titre de la police de l'eau ; que, dans ce cadre, les piscicultures ne sont plus soumises, en application de la rubrique 3.2.7.0, qu'à déclaration ; que le décret n° 2006-942 du 27 juillet 2006 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement augmente le seuil à partir duquel les piscicultures d'eau douce sont soumises à autorisation au titre de cette législation, ce seuil étant porté d'une capacité de production de 10 tonnes par an à une capacité de production de 20 tonnes par an ;

Sur la légalité externe des décrets attaqués :

Considérant que l'association requérante soutient que ces deux décrets auraient été adoptés à l'issue d'une procédure irrégulière, en raison de l'absence de consultation du Conseil supérieur de la pêche ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que ces décrets ont été soumis à cet organisme, qui s'est prononcé les 7 mars et 20 avril 2006 ; qu'ainsi le moyen, en tout état de cause, manque en fait ;

Sur la légalité interne des décrets attaqués :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 214-1 du code de l'environnement : Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations ne figurant pas à la nomenclature des installations classées, les ouvrages, travaux et activités réalisées à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restituées ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux, la destruction de frayères, de zones de croissance ou d'alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants ; qu'aux termes de l'article L. 214-2 du même code : Les installations, ouvrages, travaux et activités visés à l'article L. 214-1 sont définis dans une nomenclature, établie par décret en Conseil d'Etat après avis du Comité national de l'eau, et soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu'ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques, compte tenu notamment de l'existence des zones et périmètres institués pour la protection de l'eau et des milieux aquatiques./ Ce décret définit en outre les critères de l'usage domestique, et notamment le volume d'eau en deçà duquel le prélèvement est assimilé à un tel usage, ainsi que les autres formes d'usage dont l'impact sur le milieu aquatique est trop faible pour justifier qu'elles soient soumises à autorisation ou à déclaration ;

Considérant que l'association requérante soutient que la suppression de l'ancienne rubrique 6.5, Création d'un terrain de golf , par le décret n° 2006-881 du 17 juillet 2006, méconnaîtrait ces dispositions, dès lors que de telles installations affecteraient substantiellement la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques et ne sauraient être assimilées à un usage domestique de l'eau ;

Considérant, toutefois, que les articles L. 214-1 et L. 214-2 du code de l'environnement n'impliquent pas que toutes les installations entrant dans leur champ d'application figurent, en tant que telles, dans la nomenclature, dès lors qu'elles peuvent être saisies au titre d'autres rubriques ; que tel est le cas de la création des terrains de golf, qui peut être soumise à autorisation ou à déclaration au titre des rubriques 1.1.2.0 (prélèvement dans les eaux souterraines), 1.2.1.0 (prélèvements dans les eaux superficielles) et 3.2.3.0 (création de plans d'eau) ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 214-2 du code de l'environnement dispose que la nomenclature doit tenir compte, notamment, de l'existence des zones et périmètres institués pour la protection de l'eau et des milieux aquatiques ; que cette disposition, dont l'objet est de permettre au pouvoir réglementaire, lorsqu'il définit la nomenclature, de prendre en considération, le cas échéant, l'existence de mesures édictées sur le fondement d'autres réglementations, ne saurait être regardée comme imposant systématiquement un régime plus strict au sein de ces zones et périmètres, dès lors qu'ils peuvent faire l'objet, dans le cadre de la réglementation qui les a institués, de mesures de protection spécifiques ; que, par suite, l'association requérante n'est pas fondée à soutenir, en se fondant sur ce seul motif, que méconnaîtraient l'article L. 214-2 du code de l'environnement l'article 1er du décret n° 2006-881, qui abroge le mécanisme de soumission automatique à autorisation des installations, ouvrages, travaux et activités situés à l'intérieur du périmètre de protection rapprochée des points de prélèvement d'eau destinés à l'alimentation humaine, ainsi que les rubriques 3.2.3.0 et 3.2.4.0 de la nomenclature annexée à ce décret, en tant qu'elles abrogent le seuil d'autorisation pour les vidanges de plan d'eau dans un cours d'eau de 1ère catégorie et pour la création de plans d'eau s'écoulant dans un cours d'eau de 1ère catégorie ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 214-3 du code de l'environnement : Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles ;

Considérant que l'association requérante soutient que méconnaîtraient ces dispositions, d'une part, la suppression de la rubrique soumettant à autorisation la création des terrains de golf et, d'autre part, la soumission des piscicultures, par la rubrique 3.2.7.0, à un simple régime déclaratif ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la création de terrains de golf ou de piscicultures entrerait nécessairement, en tant que telle, dans le champ d'application du I de l'article L. 214-3, compte tenu notamment des progrès techniques accomplis au cours de la dernière décennie pour limiter les risques de pollution engendrés par ces activités ;

Considérant, en outre, qu'ainsi qu'il a été dit, la création de terrains de golf peut être soumise à autorisation au titre d'autres rubriques de la nomenclature ; que, de même, s'agissant des piscicultures, si elles ne sont, en tant que telles, soumises qu'à déclaration au titre de la police de l'eau, elles peuvent se trouver soumises à autorisation au titre d'autres rubriques, et notamment de la rubrique 2.2.3.0 (rejet dans les eaux de surface) ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 214-3 du code de l'environnement doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 218-43 du code de l'environnement : L'immersion de déchets ou d'autres matières, telle qu'elle est définie à l'article 1er du protocole du 7 novembre 1996 à la convention de Londres de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets, est interdite ; qu'aux termes de l'article L. 218-44 du même code : I. Par dérogation à l'article L. 218-43, peut être autorisée : 1° L'immersion des déblais de dragage (...)/ ; II. L'immersion des déblais de dragage est soumise aux dispositions des articles L. 214-1 à L. 214-4 et L. 214-10 ; que les articles L. 214-2 et suivants du code de l'environnement prévoient, selon les cas, un régime d'autorisation ou un régime de déclaration ; que le II de l'article L. 214-3 précise que ne sont soumis qu'à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui ne sont pas susceptibles de présenter les dangers énumérés au I ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'immersion des déblais de dragage peut faire l'objet, si les conditions prévues par le II de l'article L. 214-3 sont remplies, d'une simple déclaration ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la rubrique 4.1.3.0 de la nomenclature annexée au décret n° 2006-881, en tant qu'elle soumet certaines opérations de dragage et/ou de rejet y afférent à une simple déclaration, méconnaîtrait les articles L. 218-43 et L. 218-44 du code de l'environnement, ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, que l'association requérante soutient que le décret n° 2006-881 du 17 juillet 2006 et le décret n° 2006-942 du 27 juillet 2006 méconnaîtraient la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets sur l'environnement ; que si la nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration au titre de la police de l'eau comporte un certain nombre de rubriques entrant dans le champ d'application de l'annexe II de cette directive, l'annexe III de celle-ci fait figurer au nombre des critères de sélection pertinents pour déterminer les projets qui doivent être soumis à autorisation et évaluation au sens de la directive ceux tirés des caractéristiques des projets ; que le relèvement du seuil d'autorisation des stations d'épuration et des déversoirs d'orage par lesquels transitent les effluents non traités, ainsi que la suppression de la nomenclature des terrains de camping et des terrains d'habitation légères de loisir non raccordés au réseau d'assainissement collectif, qui peuvent au demeurant relever d'autres rubriques de la nomenclature, sont justifiés par les caractéristiques de ces installations et, notamment, par les progrès techniques accomplis pour limiter leurs nuisances ; qu'il en va de même en ce qui concerne la soumission à autorisation des seules piscicultures dont la capacité de production est supérieure à 20 tonnes par an, justifiée, en particulier, par la diminution des rejets liée à l'amélioration de la qualité des granulats dont est nourri le poisson d'élevage ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions en cause seraient incompatibles avec la directive du 27 juin 1985 ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, que l'association requérante soutient que les mêmes décrets méconnaissent l'article 6 de la directive 2006/11/CE du 15 février 2006 concernant la pollution causée par certaines substances dangereuses déversées dans le milieu aquatique de la Communauté ; qu'il n'est pas contesté, ainsi qu'il a été dit, que les rejets de pisciculture contiennent de l'ammoniaque et des nitrites, substances mentionnées dans la liste II de la directive 2006/11/CE du 15 février 2006 ; que les dispositions de l'article 6 de la directive soumettent les rejets susceptibles de contenir de telles substances à une autorisation préalable fixant les normes d'émission ; qu'à l'exception de celles d'entre elles dont la capacité de production annuelle est supérieure à 20 tonnes, qui sont soumises à autorisation au titre de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, les piscicultures ne sont soumises, en tant que telles, qu'à un régime déclaratif, dans les conditions fixées par l'ordonnance du 18 juillet 2005 et par le décret n° 2006-880 du 17 juillet 2006 ; que, toutefois, dans le cadre de ce régime, qui repose, eu égard au caractère réputé peu polluant desdites installations de pisciculture, sur un objectif de simplification des procédures administratives et de meilleure allocation des moyens de contrôle, le préfet dispose d'un droit d'opposition aux travaux, lesquels ne peuvent débuter tant qu'un délai de deux mois n'est pas écoulé, et peut assortir sa non-opposition de prescriptions techniques permettant de protéger les intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 du code de l'environnement, notamment en fixant des valeurs limites d'émission de produits polluants ; que, dans ces conditions, la question de savoir si l'article 6 de la directive peut être interprété comme permettant aux Etats membres, une fois arrêtés, en application de cet article, des programmes de réduction de la pollution des eaux comprenant des normes de qualité environnementale, d'instituer, pour des installations réputées peu polluantes, un régime déclaratif assorti du rappel des prescriptions générales relatives au rejet desdits produits et d'un droit, pour l'autorité administrative, de s'opposer à l'ouverture de l'exploitation ou d'imposer des valeurs limites de rejet propres à l'installation concernée, soulève une difficulté sérieuse ; que, par suite, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre le décret n° 2006-881 du 17 juillet 2006, en tant qu'il soumet les piscicultures à un régime déclaratif au titre de la police de l'eau, ainsi que sur la requête dirigée contre le décret du 27 juillet 2006, jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur cette question ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête n° 297532 de l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS dirigées contre le décret n° 2006-881 du 17 juillet 2006, en tant qu'il soumet les piscicultures à un régime déclaratif au titre de la police de l'eau, ainsi que sur la requête n° 297687, jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur la question de savoir si l'article 6 de la directive 2006/11/CE du 15 février 2006 concernant la pollution causée par certaines substances dangereuses déversées dans le milieu aquatique de la Communauté peut être interprété comme permettant aux Etats membres, une fois arrêtés, en application de cet article, des programmes de réduction de la pollution des eaux comprenant des normes de qualité environnementale, d'instituer, pour certaines installations réputées peu polluantes, un régime déclaratif assorti du rappel de ces normes et d'un droit, pour l'autorité administrative, de s'opposer à l'ouverture de l'exploitation ou d'imposer des valeurs limites de rejet propres à l'installation concernée. Cette question est renvoyée à la Cour de justice des Communautés européennes siégeant à Luxembourg.

Article 2 : La requête n° 297531 et le surplus des conclusions de la requête n° 297532 de l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION NATIONALE POUR LA PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES - TOS, au Premier ministre, au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, ainsi qu'au président de la Cour de justice des Communautés européennes.


Synthèse
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 297531
Date de la décision : 27/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - APPLICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE PAR LE JUGE ADMINISTRATIF FRANÇAIS - RENVOI PRÉJUDICIEL À LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES - DÉCRETS N° 2006-881 DU 17 JUILLET 2006 (POLICE DE L'EAU) ET N° 2006-942 DU 27 JUILLET 2006 (POLICE DES INSTALLATIONS CLASSÉES) PRIS POUR L'APPLICATION DE L'ORDONNANCE N° 2005-805 DU 18 JUILLET 2005 PORTANT SIMPLIFICATION - HARMONISATION ET ADAPTATION DES POLICES DE L'EAU ET DES MILIEUX AQUATIQUES - DE LA PÊCHE ET DE L'IMMERSION DES DÉCHETS - DISPOSITIONS PRÉVOYANT POUR LES PISCICULTURES UN RÉGIME DE DÉCLARATION PRÉALABLE OUVRANT À L'ADMINISTRATION UN DÉLAI D'OPPOSITION - COMPATIBILITÉ AVEC LES OBJECTIFS DE LA DIRECTIVE 2006/11/CE DU 15 FÉVRIER 2006 EXIGEANT L'AUTORISATION PRÉALABLE DES REJETS SUSCEPTIBLES DE CONTENIR DES NITRITES ET DE L'AMMONIAQUE - DIFFICULTÉ SÉRIEUSE - RENVOI À LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES.

15-03-02 Les décrets n° 2006-881 du 17 juillet 2006 et n° 2006-942 du 27 juillet 2006 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-805 du 18 juillet 2005 portant simplification, harmonisation et adaptation des polices de l'eau et des milieux aquatiques, de la pêche et de l'immersion des déchets, d'une part, instituent un régime déclaratif pour les piscicultures, à l'exception de celles d'entre elles dont la capacité de production annuelle est supérieure à 20 tonnes, qui sont soumises à autorisation au titre de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement. Toutefois, dans le cadre de ce régime, qui repose, eu égard au caractère réputé peu polluant de ces installations de pisciculture, sur un objectif de simplification des procédures administratives et de meilleure allocation des moyens de contrôle, le préfet dispose d'un droit d'opposition aux travaux, lesquels ne peuvent débuter tant qu'un délai de deux mois n'est pas écoulé, et peut assortir sa non-opposition de prescriptions techniques permettant de protéger les intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 du code de l'environnement, notamment en fixant des valeurs limites d'émission de produits polluants. Les dispositions de l'article 6 de la directive 2006/11/CE du 15 février 2006 concernant la pollution causée par certaines substances dangereuses déversées dans le milieu aquatique de la Communauté, d'autre part, soumettent les rejets susceptibles de contenir de l'ammoniaque et des nitrites à une autorisation préalable fixant les normes d'émission. Dès lors qu'il n'est pas contesté que les rejets de pisciculture contiennent de telles substances, la question de savoir si l'article 6 de la directive peut être interprété comme permettant aux Etats membres, une fois arrêtés, en application de cet article, des programmes de réduction de la pollution des eaux comprenant des normes de qualité environnementale, d'instituer, pour des installations réputées peu polluantes, un régime déclaratif assorti du rappel des prescriptions générales relatives au rejet de ces produits et d'un droit, pour l'autorité administrative, de s'opposer à l'ouverture de l'exploitation ou d'imposer des valeurs limites de rejet propres à l'installation concernée, soulève une difficulté sérieuse. Par suite, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre le décret du 17 juillet 2006, en tant qu'il soumet les piscicultures à un régime déclaratif au titre de la police de l'eau, ainsi que sur la requête dirigée contre le décret du 27 juillet 2006, jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur cette question.

NATURE ET ENVIRONNEMENT - AUTRES MESURES PROTECTRICES DE L'ENVIRONNEMENT - LUTTE CONTRE LA POLLUTION DES EAUX - DÉCRETS N° 2006-881 DU 17 JUILLET 2006 (POLICE DE L'EAU) ET N° 2006-942 DU 27 JUILLET 2006 (POLICE DES INSTALLATIONS CLASSÉES) PRIS POUR L'APPLICATION DE L'ORDONNANCE N° 2005-805 DU 18 JUILLET 2005 PORTANT SIMPLIFICATION - HARMONISATION ET ADAPTATION DES POLICES DE L'EAU ET DES MILIEUX AQUATIQUES - DE LA PÊCHE ET DE L'IMMERSION DES DÉCHETS - DISPOSITIONS PRÉVOYANT UN RÉGIME DE DÉCLARATION PRÉALABLE OUVRANT À L'ADMINISTRATION UN DÉLAI D'OPPOSITION - COMPATIBILITÉ AVEC LES OBJECTIFS DE LA DIRECTIVE 2006/11/CE DU 15 FÉVRIER 2006 EXIGEANT L'AUTORISATION PRÉALABLE DES REJETS SUSCEPTIBLES DE CONTENIR DES NITRITES ET DE L'AMMONIAQUE - DIFFICULTÉ SÉRIEUSE - RENVOI À LA COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES.

44-05-02 Les décrets n° 2006-881 du 17 juillet 2006 et n° 2006-942 du 27 juillet 2006 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-805 du 18 juillet 2005 portant simplification, harmonisation et adaptation des polices de l'eau et des milieux aquatiques, de la pêche et de l'immersion des déchets, d'une part, instituent un régime déclaratif pour les piscicultures, à l'exception de celles d'entre elles dont la capacité de production annuelle est supérieure à 20 tonnes, qui sont soumises à autorisation au titre de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement. Toutefois, dans le cadre de ce régime, qui repose, eu égard au caractère réputé peu polluant de ces installations de pisciculture, sur un objectif de simplification des procédures administratives et de meilleure allocation des moyens de contrôle, le préfet dispose d'un droit d'opposition aux travaux, lesquels ne peuvent débuter tant qu'un délai de deux mois n'est pas écoulé, et peut assortir sa non-opposition de prescriptions techniques permettant de protéger les intérêts mentionnés à l'article L. 211-1 du code de l'environnement, notamment en fixant des valeurs limites d'émission de produits polluants. Les dispositions de l'article 6 de la directive 2006/11/CE du 15 février 2006 concernant la pollution causée par certaines substances dangereuses déversées dans le milieu aquatique de la Communauté, d'autre part, soumettent les rejets susceptibles de contenir de l'ammoniaque et des nitrites à une autorisation préalable fixant les normes d'émission. Dès lors qu'il n'est pas contesté que les rejets de pisciculture contiennent de telles substances, la question de savoir si l'article 6 de la directive peut être interprété comme permettant aux Etats membres, une fois arrêtés, en application de cet article, des programmes de réduction de la pollution des eaux comprenant des normes de qualité environnementale, d'instituer, pour des installations réputées peu polluantes, un régime déclaratif assorti du rappel des prescriptions générales relatives au rejet de ces produits et d'un droit, pour l'autorité administrative, de s'opposer à l'ouverture de l'exploitation ou d'imposer des valeurs limites de rejet propres à l'installation concernée, soulève une difficulté sérieuse. Par suite, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre le décret du 17 juillet 2006, en tant qu'il soumet les piscicultures à un régime déclaratif au titre de la police de l'eau, ainsi que sur la requête dirigée contre le décret du 27 juillet 2006, jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur cette question.


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2007, n° 297531
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur ?: M. Bertrand Dacosta
Rapporteur public ?: M. Guyomar

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:297531.20070627
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