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02/07/2007 | FRANCE | N°290328

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 02 juillet 2007, 290328


Vu la requête, enregistrée le 16 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT ; la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, le refus implicite opposé par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement à sa demande du 13 octobre 2005 tendant à ce que le ministre retire l'arrêté du 5 août 2005 portant extension de l'avenant du 2 février 2005 portant modification du champ d'application

de la convention collective des industries et commerces de la récupé...

Vu la requête, enregistrée le 16 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT ; la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, le refus implicite opposé par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement à sa demande du 13 octobre 2005 tendant à ce que le ministre retire l'arrêté du 5 août 2005 portant extension de l'avenant du 2 février 2005 portant modification du champ d'application de la convention collective des industries et commerces de la récupération et, d'autre part, l'arrêté du 5 août 2005 portant extension d'un avenant portant modification du champ d'application de la convention collective des industries et commerces de la récupération de Nord - Pas-de-Calais et de Picardie, devenue convention collective des industries et commerces de la récupération ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur,

- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 132-5 du code du travail : « Les conventions et accords collectifs de travail déterminent leur champ d'application territorial et professionnel. Le champ d'application professionnel est défini en termes d'activités économiques (...) » ; qu'en vertu de l'article L. 133-8 du même code, les dispositions d'une convention de branche ou d'un accord professionnel ou interprofessionnel peuvent, à la demande d'une des organisations d'employeurs ou de salariés représentatives dans le champ d'application considéré, ou à l'initiative du ministre, être rendues obligatoires pour tous les salariés et employeurs compris dans le champ d'application de cette convention ou de cet accord, par arrêté du ministre chargé du travail, après avis motivé de la commission nationale de la négociation collective ; qu'aux termes de l'article L. 133-9 de ce code : « Le ministre chargé du travail peut (...) rendre obligatoires par arrêté les avenants ou annexes à une convention ou à un accord étendu./ L'extension des avenants ou annexes à une convention ou à un accord étendu porte effet dans le champ d'application de la convention ou de l'accord de référence, sauf dispositions expresses déterminant un champ d'application différent » ;

Considérant que, sur le fondement de ces dispositions, l'arrêté attaqué du 5 août 2005 a étendu l'avenant du 2 février 2005 portant modification du champ d'application de la convention collective des industries et commerces de la récupération de Nord - Pas-de-Calais et de Picardie, devenue convention collective des industries et commerces de la récupération du 6 décembre 1971, étendue par arrêté du 4 janvier 1974, en vue de mettre fin au chevauchement de cette convention avec la convention collective nationale des activités du déchet du 11 mai 2000, étendue par arrêté du 5 juillet 2001 ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la Fédération de la récupération pour la gestion industrielle de l'environnement et du recyclage (FEDEREC) :

Considérant que le courrier par lequel la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT a demandé au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement de retirer l'arrêté litigieux a été reçu par ce dernier le 19 octobre 2005, dans le délai du recours contentieux ouvert par la publication de cet arrêté, le 19 août 2005, et qui expirait le 20 octobre 2005 ; qu'une décision implicite de rejet du ministre est donc née le 19 décembre suivant, déclenchant le délai de recours contentieux à son encontre, qui expirait le 20 février 2006 ; que, par suite, la Fédération de la récupération pour la gestion industrielle de l'environnement et du recyclage (FEDEREC) n'est pas fondée à soutenir que la requête dirigée contre cette décision implicite, enregistrée le 16 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, serait tardive ;

Sur la légalité de l'arrêté du 5 août 2005 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison du premier alinéa de l'article L. 132-5 et de l'article L. 133-16 du code du travail que, lorsqu'il procède à l'extension d'une convention, d'un accord collectif ou d'un avenant à une telle convention ou accord, le ministre compétent doit rechercher si le champ d'application professionnel défini en termes d'activités économiques pour lequel l'extension est envisagée n'est pas compris dans le champ professionnel d'une autre convention ou accord collectif étendu par arrêté, compte tenu, le cas échéant, de l'objet respectif des stipulations étendues ou à étendre ; que, lorsqu'il apparaît que les champs d'applications professionnels définis par les textes en cause se recoupent, il lui appartient, préalablement à l'extension projetée, soit d'exclure du champ de l'extension envisagée les activités économiques déjà couvertes par la convention ou l'accord collectif précédemment étendu, soit d'abroger l'arrêté d'extension de cette convention ou de cet accord collectif, en tant qu'il s'applique à ces activités ;

Considérant, d'une part, que l'article 1-1 de la convention collective nationale des activités du déchet du 11 mai 2000 règle sur le territoire métropolitain et la Réunion les rapports et conditions de travail entre employeurs et salariés dans les entreprises exerçant une ou plusieurs activités du déchet et de la propreté urbaine, définies notamment comme les activités de collecte, d'enlèvement, d'acheminement, de tri et de regroupement des déchets ménagers et industriels, ainsi que toutes opérations pratiquées sur ces déchets en vue de leur traitement, de leur élimination ou de leur valorisation, à l'exclusion des activités de récupération référencées aux classes 37.1 Z et 37.2 Z de la nomenclature d'activités et de produits dite « NAF » définie par l'Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques ; que, d'autre part, l'avenant étendu par l'arrêté attaqué énonce que la convention collective nationale des industries et du commerce de la récupération du 6 décembre 1971 s'applique aux entreprises exerçant à titre principal des activités de traitement de déchets non ménagers, matières et matériaux en vue, d'une part, de leur recyclage et, d'autre part, de la commercialisation ou du négoce des déchets ménagers et industriels ; qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations que les activités de tri et de valorisation des déchets sont incluses dans le champ d'application des deux conventions ; que, contrairement à ce que soutient en défense la FEDEREC, la convention collective du 11 mai 2000 ne prévoit nullement que les entreprises exerçant à titre principal une activité de valorisation ou l'exerçant sur d'autres déchets que ceux issus de sa propre activité de collecte seraient exclues de son champ d'application ; qu'en outre, si la convention collective du 11 mai 2000 précise que les activités de récupération référencées aux classes 37.1 Z et 37.2 Z de la nomenclature « NAF », qui constituent un mode de valorisation des déchets, sont exclues de son champ d'application, la convention collective du 6 décembre 1971 n'indique pas, contrairement à sa rédaction antérieure à l'intervention de l'avenant étendu par l'arrêté litigieux, que l'activité de valorisation et de recyclage qu'exercent les entreprises relevant de cette convention serait circonscrite aux activités référencées à ces mêmes classes ; qu'en procédant à l'extension de l'avenant litigieux sans procéder aux corrections nécessaires pour mettre fin au recoupement entre les champs d'application des deux conventions collectives, le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a méconnu les dispositions des articles L. 132-5 et L. 133-16 du code du travail ; que l'arrêté du 5 août 2005 doit, dès lors, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au profit de la Fédération de la récupération pour la gestion industrielle de l'environnement et du recyclage (FEDEREC) ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêté du 5 août 2005 portant extension d'un avenant portant modification du champ d'application de la convention collective des industries et commerces de la récupération de Nord - Pas-de-Calais et de Picardie, devenue convention collective des industries et commerces de la récupération est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la FEDEREC tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION NATIONALE DES SYNDICATS DE TRANSPORTS CGT, à la Fédération de la récupération pour la gestion industrielle de l'environnement et du recyclage (FEDEREC) et au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 02 jui. 2007, n° 290328
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Alexandre Lallet
Rapporteur public ?: M. Derepas

Origine de la décision
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Date de la décision : 02/07/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 290328
Numéro NOR : CETATEXT000018006831 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-07-02;290328 ?
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