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09/07/2007 | FRANCE | N°297001

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 09 juillet 2007, 297001


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 août et 15 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS, dont le siège est 2, rue Alsace Lorraine, B.P. 222 à Le Port cedex (97825), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 11 août 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, sur la requête de la S.A. Clinique Durieux, a suspendu l'ex

écution de la décision du 27 juin 2006 de la commission exécutive de l'agence...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 août et 15 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS, dont le siège est 2, rue Alsace Lorraine, B.P. 222 à Le Port cedex (97825), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 11 août 2006 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, sur la requête de la S.A. Clinique Durieux, a suspendu l'exécution de la décision du 27 juin 2006 de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de la Réunion-Mayotte, autorisant la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS à créer un établissement de santé exerçant l'activité de soins et de réadaptation fonctionnelle polyvalente à l'Etang Salé ;

2°) statuant au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter la demande présentée par la S.A. Clinique Durieux devant le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion ;

3°) de mettre à la charge de la S.A. Clinique Durieux le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la S.A. Clinique Durieux,

- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que, pour prononcer la suspension de l'exécution de la décision du 27 juin 2006 de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de la Réunion-Mayotte, autorisant la création d'un établissement de santé exerçant l'activité de soins et de réadaptation fonctionnelle polyvalente à l'Etang Salé par la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS, le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a notamment jugé qu'il y avait urgence dès lors qu'en l'état de la réglementation applicable, il n'était pas contesté que cette autorisation entraînait une impossibilité pour un autre établissement de santé de déposer une nouvelle demande d'autorisation pendant un délai de cinq ans ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS avait contesté cette urgence au motif qu'une autorisation de même nature peut être dans le même temps accordée à un autre établissement de santé pour satisfaire des besoins exceptionnels et que le schéma régional d'organisation sanitaire peut être révisé à tout moment, le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion a dénaturé les pièces du dossier ; que, par suite, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision... » ; que l'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 6122-2 du code de la santé publique : « L'autorisation est accordée lorsque le projet : / 1° Répond aux besoins de santé de la population identifiés par le schéma d'organisation sanitaire mentionné à l'article L. 6121-1 ; / 2° Est compatible avec les objectifs fixés par ce schéma ainsi qu'avec son annexe ; / 3° Satisfait à des conditions d'implantation et à des conditions techniques de fonctionnement. / Des autorisations dérogeant aux 1° et 2° peuvent être accordées à titre exceptionnel et dans l'intérêt de la santé publique après avis du comité régional de l'organisation sanitaire » ; qu'aux termes de l'article L. 6122-9 : « L'autorisation d'activités ou d'équipements relevant d'un schéma régional est donnée ou renouvelée par l'agence régionale de l'hospitalisation après avis du comité régional de l'organisation sanitaire... / Les demandes d'autorisation ou de renouvellement d'autorisation portant sur des activités de soins ou équipements de même nature sont reçues au cours de périodes déterminées par voie réglementaire. Elles sont examinées sans qu'il soit tenu compte de l'ordre de leur dépôt. / Dans le mois qui précède le début de chaque période, le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation publie un bilan quantifié de l'offre de soins faisant apparaître les territoires de santé dans lesquels cette offre est insuffisante au regard du schéma d'organisation sanitaire. Les demandes tendant à obtenir une autorisation de création d'une activité de soins ou d'un équipement matériel lourd au sens de l'article L. 6121-2 ne sont recevables, pour la période considérée, que pour des projets intéressant ces territoires de santé. Toutefois, dans l'intérêt de la santé publique, des demandes peuvent être reçues lorsqu'elles visent à satisfaire des besoins exceptionnels. / La décision de l'agence régionale de l'hospitalisation est notifiée au demandeur dans un délai maximum de six mois suivant la date d'expiration de la période de réception des demandes. Cette décision est motivée.... » ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la S.A. Clinique Durieux, qui avait elle-même présenté une demande en ce sens en 2005 sur le fondement du schéma régional d'organisation sanitaire antérieur et a renouvelé sa demande en 2006 sur le fondement du nouveau schéma régional d'organisation sanitaire, s'est vu refuser l'autorisation de créer une unité de soins et de réadaptation fonctionnelle ; qu'en l'état de la réglementation applicable, toute autorisation de création d'un nouvel établissement de soins de rééducation fonctionnelle est exclue selon la procédure normale dans les cinq ans à venir sur le territoire du département de la Réunion compte tenu de l'autorisation délivrée à la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS le 27 juin 2006, seule une demande présentée selon la procédure dérogatoire pouvant être examinée ; qu'il n'est pas allégué que des besoins exceptionnels de santé publique, seuls de nature à justifier une autorisation dérogatoire, existeraient en l'espèce ; que, par suite, la décision dont la suspension est demandée doit être regardée comme portant aux intérêts de la S.A. Clinique Durieux une atteinte suffisamment grave pour justifier l'urgence à suspendre, dès lors qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que cette suspension porterait atteinte aux intérêts de la santé publique, ni que la S.A. Clinique Durieux, qui s'est bornée à se conformer aux plages de demandes d'autorisation prévues par la réglementation, aurait fait preuve de négligence ;

Considérant, d'autre part, qu'en l'état de l'instruction, les moyens développés par la S.A. Clinique Durieux à l'appui de sa demande de suspension de la décision litigieuse et tirés de la méconnaissance de l'article L. 6122-9 du code de la santé publique relatif aux conditions et à la procédure d'autorisation d'exercice de l'activité en cause et de l'insuffisance de la motivation de la décision litigieuse paraissent de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité ; qu'il y a lieu, par suite, d'en prononcer la suspension ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de la S.A. Clinique Durieux, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS une somme de 3 000 euros au titre des frais de même nature exposés par la S.A. Clinique Durieux ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion en date du 11 août 2006 est annulée.

Article 2 : L'exécution de la décision du 27 juin 2006 de la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation de la Réunion-Mayotte est suspendue.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS versera à la S.A. Clinique Durieux la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIÉTÉ CLINIQUE LES EUCALYPTUS, à la S.A. Clinique Durieux et à l'agence régionale de l'hospitalisation de la Réunion-Mayotte. Copie en sera adressée, pour information, au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 297001
Date de la décision : 09/07/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2007, n° 297001
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: Mme de Silva
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:297001.20070709
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