Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 mars et 21 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la société BIOCODEX, dont le siège est 7, avenue Gallieni à Gentilly (94250) ; la société BIOCODEX demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté interministériel du 17 janvier 2006 portant radiation de spécialités pharmaceutiques de la liste mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique en tant qu'il concerne les spécialités Ultralevure Lyophilisée gélules B/20 et Ultralevure Lyophilisée gélules B/50 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité instituant la Communauté européenne ;
Vu la directive n°89/105/ CEE du Conseil des communautés européennes du 21 décembre 1988 concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d'application des systèmes nationaux d'assurance maladie ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Eric Berti, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité externe :
Considérant que pour assurer la transposition de l'article 6 de la directive n° 89/105/ CEE du Conseil des communautés européennes du 21 décembre 1988, l'article R. 163-14 du code de la sécurité sociale a prévu que les décisions portant radiation de la liste mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique étaient communiquées à l'entreprise avec la mention des motifs de ces décisions ainsi que des voies et délais de recours qui leur sont applicables, ceux-ci ne courant qu'à compter de la date de réception de la lettre de notification ainsi motivée ;
Considérant que, si l'arrêté litigieux se borne à viser les avis pertinents de la Commission de la transparence, la lettre du 6 février 2006 par laquelle cette décision a été notifiée à la société requérante lui fait connaître que la décision de radiation « repose sur le caractère insuffisant du service médical rendu par vos spécialités tel qu'apprécié par la commission de la transparence dans ses avis, dont les dates sont précisées en annexe à ce courrier, qui vous ont été transmis et que vous pouvez consulter sur le site de la Haute autorité de santé » et indique l'adresse de ce site ; que, eu égard aux termes de cette correspondance et alors même qu'elle est distincte de l'arrêté de radiation et postérieure à la publication de ce dernier, les ministres doivent être regardés comme s'étant appropriés les avis pertinents de la Commission de la transparence, et avoir ainsi communiqué les motifs de leur décision ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision de radiation serait entachée de défaut de motivation et aurait méconnu les prescriptions de l'article R. 163-14 du code de la sécurité sociale doit être écarté ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que d'autres spécialités seraient maintenues sur la liste des spécialités remboursables et sur celle mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique, alors qu'elles auraient un service médical rendu insuffisant est sans incidence sur la légalité de l'arrêté de radiation des spécialités Ultralevure Lyophilisée gélules B/20 et Ultralevure Lyophilisée gélules B/50 ; qu'à supposer même que le maintien de médicaments concurrents sur ces listes ait pour effet de placer les entreprises qui les exploitent en situation d'abus de position dominante, une telle circonstance ne peut être utilement invoquée à l'encontre de la mesure prise à l'égard de la spécialité exploitée par la société BIOCODEX ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du principe d'égalité et de l'article L. 420-2 du code de commerce prohibant les abus de position dominante ne peuvent qu'être écartés ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le déremboursement des spécialités pharmaceutiques exploitées par la société requérante serait sans incidence sur la réduction des dépenses d'assurance maladie par un effet de report sur d'autres spécialités pharmaceutiques, plus coûteuses ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la mesure contestée ne répondrait pas aux objectifs poursuivis par la procédure de radiation doit, en tout état de cause, être écarté ;
Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que pour qualifier d'insuffisant le service médical rendu par les spécialités Ultralevure Lyophilisée gélules B/20 et Ultralevure Lyophilisée gélules B/50, les auteurs de l'arrêté attaqué auraient retenu des faits matériellement inexacts ou entaché l'appréciation qu'ils ont ainsi portée d'une erreur manifeste ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société BIOCODEX n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2006 portant radiation de spécialités pharmaceutiques de la liste mentionnée à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique en ce qu'il concerne les spécialités qu'elle exploite ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande la société BIOCODEX au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la société BIOCODEX est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société BIOCODEX et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.