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10/10/2007 | FRANCE | N°255213

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 10 octobre 2007, 255213


Vu, 1°), sous le n° 255213, la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 18 mars, 18 juillet et 4 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE SPS TARBES, dont le siège est parc Saint-Christophe, 10 avenue de l'Entreprise à Cergy-Pontoise (95862) ; la SOCIETE SPS TARBES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 1er de l'arrêt avant dire droit en date du 16 janvier 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du tribunal administratif de Pau du 13

octobre 1998 en tant qu'il avait retenu la responsabilité de la com...

Vu, 1°), sous le n° 255213, la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 18 mars, 18 juillet et 4 septembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE SPS TARBES, dont le siège est parc Saint-Christophe, 10 avenue de l'Entreprise à Cergy-Pontoise (95862) ; la SOCIETE SPS TARBES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 1er de l'arrêt avant dire droit en date du 16 janvier 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du tribunal administratif de Pau du 13 octobre 1998 en tant qu'il avait retenu la responsabilité de la commune de Tarbes sur d'autres fondements que celui de la méconnaissance des stipulations de l'article 10 de la convention par laquelle lui a été concédée la construction et l'exploitation du parc de stationnement de la place de Verdun et pour d'autres motifs que celui du non-alignement, sur ceux pratiqués dans ce parc, des tarifs d'abonnement mensuel des autres parcs de stationnement gérés par la commune ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Tarbes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu, 2°), sous le n° 271215, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 août et 14 décembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE SPS TARBES, dont le siège est parc Saint ;Christophe, 10 avenue de l'Entreprise à Cergy-Pontoise (95862) ; la SOCIETE SPS TARBES demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt en date du 17 juin 2004 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a ramené à 38 112,25 euros la somme que le tribunal administratif de Pau avait, par un jugement en date du 13 octobre 1998, condamné la commune de Tarbes à lui verser en réparation du préjudice subi par elle en sa qualité de concessionnaire du parc de stationnement de la place de Verdun ;


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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 septembre 2007, présentée pour la SOCIETE SPS TARBES ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alban de Nervaux, Auditeur,

- les observations de la SCP Gaschignard, avocat de la SOCIETE SPS TARBES et de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la commune de Tarbes,

- les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;




Considérant que les requêtes n° 255213 et 271215 présentées pour la SOCIETE SPS TARBES portent sur le même litige ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune de Tarbes a, par une convention conclue le 15 novembre 1990, concédé à la société Spie Aménagement, à laquelle s'est substituée la société Spie Park Tarbes, devenue la SOCIETE SPS TARBES, la construction et l'exploitation d'un parc de stationnement souterrain sous la place de Verdun ; que l'exploitation du parc s'étant révélée déficitaire, la société concessionnaire a recherché la responsabilité de la commune de Tarbes devant le tribunal administratif de Pau qui, par un jugement en date du 13 octobre 1998, a condamné la commune à verser à son concessionnaire la somme de 2 500 000 francs ( 381 122,54 euros), en réparation du préjudice subi du fait des pratiques tarifaires de la ville dans ses parcs de stationnement ; que par un premier arrêt en date du 16 janvier 2003, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du tribunal administratif de Pau en tant qu'il avait retenu la responsabilité de la commune sur d'autres fondements que celui de la méconnaissance de l'article 10 du contrat de concession et sur d'autres motifs que celui relatif au tarif d'abonnement et a ordonné une expertise afin de déterminer la réalité et l'étendue du préjudice subi par la société Spie Park Tarbes ; que, par un second arrêt en date du 17 juin 2004, la cour a ramené à 250 000 francs, soit 38 112,25 euros, la condamnation mise à la charge de la commune de Tarbes ; que la SOCIETE SPS TARBES se pourvoit en cassation contre ces deux arrêts ;

Sur l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 16 janvier 2003 :

Considérant, en premier lieu, qu' il ressort des écritures de la SOCIETE SPS TARBES devant la cour administrative d'appel de Bordeaux que si elle a fait état de la création par la commune de « zones vertes » de stationnement, il ne s'agissait que d'un élément postérieur à l'intervention du jugement dont elle interjetait appel et qu'elle indiquait, selon ses propres dires, pour éclairer la cour sur le comportement de la commune ; que cette mention ne constituait dès lors pas un moyen auquel la cour aurait été tenue de répondre ; que contrairement à ce que soutient la société requérante, la cour a répondu au moyen tiré de ce que la commune n'aurait pas veillé à l'application des règles relatives au stationnement ; qu'enfin, il ressort des écritures de la SOCIETE SPS TARBES devant la cour qu ‘elle n'avait pas soulevé de moyen tiré d'un manquement de la commune à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat conclu et qu'ainsi, elle ne saurait soutenir que l'arrêt de la cour, qui, contrairement à ce qu'elle allègue, ne dénature pas le jugement du tribunal, serait insuffisamment motivé faute d'avoir vérifié si les agissements reprochés à la commune ne constituaient pas un manquement à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat ;

Considérant, en deuxième lieu, que dès lors que la cour a estimé que l'article 10 du contrat de concession n'imposait à la commune d'obligations tarifaires pour ses propres parcs de stationnement qu'en ce qui concerne le stationnement payant, elle a pu juger, sans entacher son arrêt de contradictions de motifs, d'une part, que si l'absence d'augmentation des tarifs communaux de stationnement méconnaissait les obligations contractuelles de la ville, tel n'était pas le cas du maintien du stationnement gratuit et d'autre part, que le tarif du stationnement horaire pratiqué par la ville était bien égal à celui du parc de son concessionnaire alors même que la commune avait maintenu la gratuité du stationnement de courte durée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le second alinéa de l'article 10 du contrat de concession en litige stipulait que « Les tarifs de stationnement payant de surface et des autres parcs publics seront progressivement augmentés pour atteindre ceux du parc « Verdun » le jour de son ouverture » ; qu'en jugeant que cette clause contractuelle impliquait uniquement un relèvement, à la date d'ouverture du parc « Verdun », des tarifs municipaux mais d'une part, n'imposait pas de les faire évoluer par la suite de la même façon que ceux du parc « Verdun », et d'autre part, n'interdisait ni de fractionner les tarifs municipaux pour des durées inférieures à une heure, ni d'attribuer des cartes de stationnement gratuit, la cour n'a pas dénaturé la commune intention des parties ;

Considérant, en dernier lieu, que lorsqu'un concessionnaire demande une indemnisation à la collectivité concédante du fait des activités concurrentes que cette dernière a organisées, le juge doit rechercher si la collectivité a méconnu les stipulations du contrat ou empêché le concessionnaire de poursuivre ses activités, et donc de remplir ses propres obligations contractuelles ; qu'il ne peut être utilement invoqué un principe général de protection du concessionnaire contre la concurrence par le concédant, indépendamment de toute clause contractuelle posant une telle obligation à ce dernier ; qu'ainsi, en censurant le jugement du tribunal de Pau, qui avait condamné la commune au motif que ses agissements avaient empêché son concessionnaire d'exploiter rentablement le parc de stationnement, la cour n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE SPS TARBES n'est pas fondée à demander l'annulation de l'article 1er de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 16 janvier 2003 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à sa charge le paiement à la commune de Tarbes de la somme de 3 000 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;

Sur l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 17 juin 2004 :

Considérant, en premier lieu, que dès lors que la présente décision rejette le pourvoi en cassation formé par la SOCIETE SPS TARBES contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 16 janvier 2003, le moyen tiré de ce que l'arrêt attaqué en date du 17 juin 2004 doit être annulé en conséquence de l'annulation de cet arrêt avant dire droit ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que, d'une part, contrairement à ce que soutient la société requérante, la cour a répondu à ses conclusions tendant à l'indemnisation de ses frais financiers ; que, d'autre part, si pour rejeter cette demande, la cour s'est bornée à juger que ce préjudice « n'est pas lié à la faute de la commune », elle a toutefois renvoyé à ce qu'elle avait dit précédemment dans son arrêt ; que dès lors que dans ses considérations précédentes, elle expliquait que le compte prévisionnel d'exploitation établi par la société requérante lors de la conclusion du contrat était sans rapport avec la réalité, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêt attaqué en ce qui concerne le rejet de la demande d'indemnisation des frais financiers doit être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le rapport d'expertise a déterminé le préjudice subi par la SOCIETE SPS TARBES du fait du manquement de la commune à son obligation de pratiquer des tarifs d'abonnement équivalents à ceux du parc de stationnement de la place de Verdun, en comparant le chiffre d'affaires effectivement réalisé par le concessionnaire avec le chiffre d'affaires prévisionnel établi par ce dernier lors de la conclusion du contrat ; que pour réduire le montant de l'indemnisation ainsi calculée, la cour qui ne s'est fondée, contrairement à ce que soutient la société requérante, ni sur la capacité excessive du parc de stationnement, ni sur l'évolution de la fréquentation relative des divers parcs de stationnement, a pu, sans dénaturer les pièces du dossier, juger que le compte d'exploitation prévisionnel établi par la société concessionnaire n'était pas réaliste ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE SPS TARBES n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en date du 17 juin 2004 de la cour administrative d'appel de Bordeaux ;





D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes n° 255213 et 271215 de la SOCIETE SPS TARBES sont rejetées.
Article 2 : La SOCIETE SPS TARBES versera à la commune de Tarbes la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SPS TARBES et à la commune de Tarbes.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 255213
Date de la décision : 10/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS. EXÉCUTION TECHNIQUE DU CONTRAT. CONDITIONS D'EXÉCUTION DES ENGAGEMENTS CONTRACTUELS EN L'ABSENCE D'ALÉAS. CONCESSIONS - DROITS ET OBLIGATIONS DES CONCESSIONNAIRES. - DROIT DU CONCESSIONNAIRE À ÊTRE INDEMNISÉ DES CONSÉQUENCES D'ACTIVITÉS CONCURRENTES ORGANISÉES PAR LA COLLECTIVITÉ CONCÉDANTE - FONDEMENT - A) EXISTENCE - STIPULATIONS DU CONTRAT OU FAIT DU PRINCE - B) ABSENCE - PRINCIPE GÉNÉRAL DE PROTECTION DU CONCESSIONNAIRE CONTRE LA CONCURRENCE [RJ1].

a) Lorsqu'un concessionnaire demande une indemnisation à la collectivité concédante du fait des activités concurrentes que cette dernière a organisées, le juge doit rechercher si la collectivité a méconnu les stipulations du contrat ou empêché le concessionnaire de poursuivre ses activités et donc de remplir ses propres obligations contractuelles.,,b) Il ne peut en revanche être utilement invoqué un principe général de protection du concessionnaire contre la concurrence par le concédant, indépendamment de toute clause contractuelle imposant une telle obligation à ce dernier.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 oct. 2007, n° 255213
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: M. Alban de Nervaux
Rapporteur public ?: M. Casas
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD ; SCP BARADUC, DUHAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:255213.20071010
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